La faim de la finQui sont ces militants prêts à tout pour stopper l’autoroute A69 ?

Autoroute A69 : « Si je dois mourir, je le ferai », qui sont ces militants prêts à tout pour stopper le chantier ?

La faim de la finLe plus connu d’entre eux, Thomas Brail, est toujours perché à Paris devant le ministère des Transports. Mais du côté de Toulouse, sept autres « anonymes » ont entamé une grève de la faim pour protester contre la construction de l’autoroute A69
Lucie Tollon

Lucie Tollon

L'essentiel

  • Le défenseur des arbres Thomas Brail en est à son 21e jour de grève de la faim pour protester contre la construction de l’autoroute A69 entre Castres et Toulouse.
  • Et dans la Ville rose, sept autres opposants ont aussi cessé de manger.
  • Ils sont prêts à mettre leur vie en danger alors que ce jeudi, une rencontre avec les pouvoirs publics a capoté et que les militants ont déposé un nouveau recours contre le projet, dont le chantier se poursuit.

Les joues creuses, le teint pâle, l’air absent et une élocution traînante… Marion, Olga, Reva, Matthieu, Victoria et Bernard sont en grève de la faim depuis plus d’une dizaine de jours. Et, ils le disent et le répètent, ils ne recommenceront à s’alimenter que si le chantier de l’autoroute A69 entre Castres et Toulouse est suspendu.

Le doyen, Bernard, âgé de 68 ans s’oppose au projet depuis plus de vingt-cinq ans. Ce jeudi pour son 10e jour sans manger, le retraité, ancien responsable d’entreprise dans le traitement des eaux, garde des forces en exigeant l’arrêt immédiat des travaux en attendant les décisions de justice. C’est la seule condition pour qu’il mette fin à son jeûne. Tout comme ses camarades qui ont tout stoppé pour se concentrer sur leur lutte. « Si je dois mourir, je le ferai. C’est mon dernier recours », lance difficilement et à bout de forces Olga. A 21 ans, celle qui a commencé sa grève de la faim il y a quinze jours, alors qu’elle était encore en garde à vue pour s’être attachée à un engin de chantier en mouvement, n’a plus d’autres choix. « Je suis sous contrôle judiciaire, donc je ne peux pas participer aux manifestations », avoue la militante à plein temps, frêle sous son tee-shirt.

Des directives anticipées en cas de problème

Ces « jusqu’au-boutistes » ont, pour le moment, perdu environ cinq kilos et se sentent « amoindris et affaiblis », comme l’explique le géant Reva. Ce chef d’entreprise arboriste de la région parisienne, membre du Groupe National de Surveillance des Arbres (GNSA), continue à porter la voix du mouvement. A ses côtés, l’électricien Matthieu, en lutte depuis le mois de mars et qui ne pensait pas « que le projet allait aboutir ». Résultat, il s’est joint au mouvement de grève de la faim depuis dix jours.

Marion et Victoria, des riveraines du tracé de l’autoroute sont desséchées par la faim, « le froid » et la fatigue. Tous peuvent compter sur l’aide financière du mouvement La Voie est Libre et sur l’hébergement dans une association toulousaine. Un véritable collectif, mais « à bout de souffle ». Car le groupe s’inquiète pour Thomas Brail, le plus connu des « écureuils » qui lui est toujours perché dans la capitale, devant le ministère des Transports, et dont « la vie est en danger » après 21 jours de grève de la faim. Il pourrait d’ailleurs se lancer également dans une grève de la soif. « C’est possible », confirme ses camarades. « On ira jusqu’au bout s’il le faut ». Ils sont suivis par des médecins et ont même rempli des directives anticipées. « Au cas où » …

Un nouveau recours déposé

Théoriquement, ce jeudi, le dialogue aurait pu être renoué. Les préfets, les élus partisans du projet du Tarn et de la Haute-Garonne, et la présidente de région Carole Delga (PS) avaient accepté le principe d’une rencontre avec les opposants. Mais les exigences de ces derniers – l’arrêt du chantier et un rendez-vous médiatisé – n’ont pas été acceptées. Ils ont donc décliné. « Nous prenons acte de cette décision et ne pouvons que la regretter. Nous restons ouverts au dialogues », ont réagi les élus ce jeudi soir.

Mercredi, les opposants, qui livrent aussi bataille dans les prétoires, ont déposé un nouveau recours contre l’abattage d’arbres « multicentenaires ».

Pour les plus fervents de la cause, la grève de la faim continue et les appuis se font de plus en plus nombreux. Trois habitants du Burkina Faso se sont lancés en soutien dans une grève de la faim et des jeûnes solidaires ont lieu devant l’hôtel de Région de Toulouse. Même chose à Paris, devant le ministère de la Transition écologique, tous les soirs à 19 heures.