« Starfield » : L’exploration spatiale, une vieille lune du jeu vidéo qui fascine toujours
Un peu plus près des étoiles•Plusieurs jeux à grand budget mettent en avant la thématique de l’exploration spatiale, idéale pour « répondre au besoin d’imaginaire » des joueursXavier Regnier
L'essentiel
- Le nouveau jeu vidéo RPG du studio Bethesda, Starfield, est sorti officiellement le mercredi 6 septembre.
- Comme dans les grosses productions Star Citizen, encore en développement, et Star Wars Jedi : Fallen Order, sorti au mois d’avril, l’exploration de la galaxie y est un thème central et une mécanique de jeu mise en avant.
- Pour « répondre au besoin d’imaginaire » des joueurs, le spatial est un matériau particulièrement apprécié, même s’il propose souvent des planètes monolithiques. « Une limite de nos connaissances », souligne l’expert Olivier Sanguy, que Starfield s’efforce d’éviter.
C’est l’histoire de trois mastodontes partis à la conquête des étoiles. D’un côté, une saga culte depuis plus de quarante ans. De l’autre, un projet mis en route il y a dix ans, dont les levées de fonds et la lenteur de développement sont devenues un sujet de plaisanterie dans le milieu. Et au centre, un studio trentenaire connu pour ses séries de RPG et ses jeux de tirs. Dans l’univers du jeu vidéo, 2023 a été placée sous le signe de l’exploration spatiale. Un thème central dans le Jedi : Fallen Order de Star Wars, le MMORPG Star Citizen et le nouveau titre de Bethesda, Starfield, qui est sorti officiellement ce mercredi.
Toute la quête principale de Starfield tourne autour de cette thématique, puisque « le protagoniste va rejoindre un groupe d’explorateurs » composé des « dernières personnes à repousser les limites de l’univers et de ce que l’on connaît », explique Hadrien Cheru, marketing manager chez Bethesda France. Et les étoiles, à la fois visibles au quotidien mais si lointaines et inaccessibles, avaient de quoi titiller l’imagination et le désir d’exploration des joueurs.
De Galactic Empire à Outer Wilds
La découverte d’autres planètes n’est pourtant pas une nouveauté dans le jeu vidéo. En 1980, au moment même où résonnait pour la première fois dans les salles de cinéma le célèbre « je suis ton père », les premiers gamers se lançaient à la conquête de la galaxie dans Galactic Empire. Pour Olivier Sanguy, responsable actualités spatiales à la Cité de l’Espace de Toulouse, « le spatial a toujours intéressé une partie de la population », mais a connu « des vagues d’intérêt ». « En France, les deux missions de Thomas Pesquet ont servi à réinitialiser cet intérêt », décrypte-t-il.
Dans le jeu vidéo, cela a donné la licence Mass Effect, puis les titres Endless Space et FTL en 2012. Puis viennent, coup sur coup, Interstellar et Seul sur Mars côté cinéma, Kerbal Space Program, Stellaris et No Man’s Sky côté jeu vidéo, entre 2014 et 2016. Dernières pépites vidéoludiques en date, Outer Wilds et Astroneer se partagent l’affiche en 2019, et Ad Astra, matériau d’inspiration des développeurs de Starfield, sort au cinéma la même année. Tous, à leur manière, proposent de « participer de manière fictionnelle » à la découverte d’autres mondes.
Les étoiles, si proches et si loin
Car si la passion est présente dans le grand public, « le spatial a quelque chose de frustrant », pour Olivier Sanguy : prendre part à l’aventure est « extrêmement difficile, c’est un domaine encore vu comme élitiste ». Devant le nombre extrêmement réduit de personnes qui vont dans l’espace chaque année, le jeu vidéo représente alors la solution idéale pour répondre à cette frustration. Dans Starfield, passé la création de personnage, il suffit d’une bonne heure de jeu pour pouvoir quitter les rails de la quête principale et se retrouver libre d’aller quasiment où on veut dans l’espace. « Très vite, le joueur peut se dire "qu’est-ce qui se passe si je choisis d’atterrir à tel endroit sur telle planète ?", la force du jeu est de répondre à ce besoin d’imaginaire », développe Hadrien Cheru.
Car l’exploration, Bethesda sait faire. Dans les Elders Scrolls ou les Fallout, le joueur passait déjà son temps à parcourir la carte en quête de détails soignés et à naviguer entre des villes et des environnements radicalement différents. « C’est une thématique très forte » du studio, confirme Hadrien Cheru. Restait à l’appliquer au spatial. Depuis Star Wars, la découverte d’une nouvelle planète ou d’un satellite se résume souvent à la vision d’un unique biome : Endor et sa forêt infinie, Hoth couverte de glaces, Kamino la planète-océan. Autant de surfaces monolithiques « influencées par notre système solaire », selon Olivier Sanguy.
En effet, autour du Soleil, c’est sur Terre qu’on trouve « la plus grande diversité géologique, de faune et de flore ». Mais elle nous est familière. En revanche, l’altérité, et donc l’inconnu, le lointain, c’est « Vénus, 400 °C à la surface, assez monotone, la Lune, qui semble uniforme pour les néophytes, Mars pareil », même si les scientifiques en connaissent la richesse et les subtilités et que « la vision monolithique est une limite de nos connaissances ». Starfield, où l’exploration est parfois plus un sujet qu’une expérience, contourne à sa manière le problème : depuis la vue spatiale, certaines planètes laissent voir des continents, des océans, des pôles glacés, mais l’on ne peut y atterrir que dans des zones correspondants à certains archétypes (mine abandonnée et surface rocailleuse, avant-poste scientifique entouré de végétation rase).
Heureusement, parfois, l’imagination dépasse la connaissance. En 1977, quand Tatooine apparaît dans le premier Star Wars, orbitant autour d’une étoile double, « on classait ça dans la science-fiction. Ce n’est que des années plus tard qu’on a découvert un système stable autour d’une étoile double » en vrai, raconte Olivier Sanguy. « Il y a un aller-retour entre réalité et fiction », sourit-il. Parmi les 1.000 planètes qu’offre Starfield, y en a-t-il une que les astronomes observeront un jour ?