Rentrée scolaire : « C’est moi qui choisis »… Les ados pas hyper chauds pour enfiler l’uniforme
c’est mon choix•Le ministre de l’Éducation nationale Gabriel Attal a annoncé vouloir lancer une expérimentation à l’automne pour une « tenue scolaire unique »
Camille Allain
L'essentiel
- Depuis sa nomination au poste de ministre de l’Education nationale, Gabriel Attal a exprimé son souhait de tester un retour d’une « tenue scolaire unique ».
- En marge de sa visite avec Elisabeth Borne ce lundi près de Rennes, 20 Minutes a interrogé des adolescents sur un éventuel retour à l’uniforme.
- L’écrasante majorité des élèves et enseignants rencontrés sont plutôt opposés à l’adoption d’un uniforme.
Il a annoncé sa volonté de lancer une expérimentation « dès cet automne ». Tout juste nommé ministre de l’Éducation nationale, Gabriel Attal s’est attaqué au sujet du retour de l’uniforme à l’école. Souvent brandie par la droite française comme symbole d’une école plus respectée, la « tenue scolaire unique » pourrait être imposée dans les écoles élémentaires, collèges et lycées de France qui la réclameraient. Depuis cette annonce, certains élus comme le maire RN de Perpignan Louis Alliot ou le président des Républicains Éric Ciotti se sont portés volontaires pour généraliser l’uniforme dans leurs territoires. « Je ne pense pas que ce soit la solution miracle mais ça mérite d’être testé », a rappelé Gabriel Attal lors de son déplacement en Ille-et-Vilaine ce lundi aux côtés de sa Première ministre Élisabeth Borne. Habillé d’un sobre costume bleu et d’une chemise blanche, l’ancien porte-parole du gouvernement a fait savoir qu’il présenterait les modalités « à l’automne » mais invitait « dans l’intervalle » tous ceux qui voudraient se saisir du sujet à le solliciter.
Plusieurs fois évoqué par ses prédécesseurs, le retour de l’uniforme divise dans la classe politique. Toujours utilisée dans certains établissements scolaires britanniques, la tenue unique a disparu en France depuis une cinquantaine d’années. Plutôt que de demander à de vieux députés s’ils y sont favorables, nous avons choisi d’interroger les principaux concernés. À l’occasion de la visite ministérielle de ce lundi, nous avons demandé à des collégiens et des lycéens ce qu’ils penseraient d’un uniforme obligatoire. Et leurs réponses sont quasiment unanimes. « On n’en veut pas ». « Moi, je suis vraiment contre, parce que j’aime bien m’habiller comme je veux, lance Maëlys, élève de 4e inscrite à Melesse (Ille-et-Vilaine). Tu peux t’exprimer à travers tes vêtements. C’est moi qui choisis ». A ses côtés, Enola dit la même chose. « J’ai envie de pouvoir porter ce que je veux », témoigne la collégienne. Sa tenue préférée ? « Un truc simple, genre jean tee-shirt ». Inscrit dans le même collège, Nathan est aussi catégorique. « Moi, je n’ai pas envie, j’ai envie de mettre ce que je veux. Des fois, je viens en jogging, des fois en jean, ça dépend de mon envie ».
Élève de 3e, Lilou est plus mesurée. « Oui, ça me dérangerait qu’on m’impose l’uniforme. Mais je pense que ça nous permettrait d’être tous égaux. On ne verrait pas les différences de catégorie sociale, tout le monde serait habillé pareil ». L’adolescente n’a « jamais eu de problème » en raison de sa tenue vestimentaire. Mais elle a conscience que d’autres ont pu en souffrir.
« « Mes parents ont les moyens de m’acheter des vêtements, j’en suis consciente. Quand tu croises une personne, les vêtements, c’est la première chose que tu vois ». »
Son amie Elena se souvient d’une fois où des camarades avaient critiqué son jogging. « On m’avait dit que ça ressemblait à un pyjama ». L’adolescente ne l’avait pas vraiment mal vécu. « Mais je ne l’ai jamais remis au collège ». Pourtant, elle non plus n’est pas favorable à la tenue unique.
« Je ne vais pas venir en paréo »
Dans la cour du lycée Simone-Veil de Liffré où les trois ministres du gouvernement Macron sont passés ce midi, l’ambiance était la même. « Quand je viens au lycée, je sais que je dois avoir une tenue correcte, je fais attention, je ne vais pas venir en paréo non plus. Mais j’aime bien changer », témoigne Angeline, 16 ans, qui a choisi une robe orange pour cette rentrée. Son amie Lucie « n’accepterait pas bien » qu’on lui impose une tenue. « Chacun a son style. Et souvent, le style, ça reflète ta personnalité, ça te permet de te sentir à l’aise ». Quant à l’argument d’égalité, il ne convainc pas vraiment. « Pour moi, ce n’est pas la solution. Des moqueries, on en subit et il y en aura toujours. Souvent, ce n’est rien de méchant », assure Noélie, qui fait son entrée en seconde. Des vêtements, elle reconnaît d’ailleurs « en acheter beaucoup ».
Le seul adolescent favorable à l’uniforme que nous ayons croisé s’appelle Axel. Élève au lycée Saint-Exupéry, à Rennes, le jeune homme ne serait pas contre un uniforme. « Moi, je trouve ça plutôt habillé, ça ne me dérangerait pas. Au moins, on serait tous pareils ».
Pour trouver un peu de soutien à Gabriel Attal, nous avons tenté notre chance auprès d’enseignants. Mais eux non plus ne semblaient pas convaincus. « J’aime bien voir mes élèves s’exprimer en trouvant leur tenue. Au lycée, on voit qu’ils s’affirment, qu’ils se diversifient. Leurs vêtements, c’est leur moyen d’expression, de montrer qui ils sont », témoigne Aurélie, enseignante au lycée public de Liffré.
Assis à ses côtés, Hugo partage le même avis. Ce professeur de physique-chimie estime même que l’uniforme serait un véritable frein à la créativité de chacun. « En classe, je les invite à développer leur esprit critique. Les élèves ont peu de possibilités de s’exprimer et de s’affirmer car on décide souvent pour eux. Quand on met un pantalon plutôt qu’un short, c’est un choix », estime l’enseignant. Avant de lancer une interrogation : « et pour l’uniforme, on sait qui va le payer ? ». Le ministre de l’Éducation nationale a déjà fait savoir qu’il préciserait les modalités de son expérimentation « à l’automne ». On peut déjà voir qu’elle sera loin, très loin de faire l’unanimité.