InégalitésLes Français les plus riches paient le moins d’impôts proportionnellement

Pourquoi les Français les plus riches sont relativement moins taxés que les autres

InégalitésLes 37.800 foyers français les plus aisés ont un taux d’imposition global de 46 % mais il diminue progressivement, jusqu’à atteindre 26 % pour les 75 foyers fiscaux les plus fortunés
20 Minutes avec AFP

20 Minutes avec AFP

En haut, tout en haut de la pyramide des richesses, l’impôt régresse. C’est la conclusion d’une étude de l’Institut des politiques publiques (IPP) diffusée ce mardi. Les revenus des 37.800 foyers français les plus riches sont proportionnellement moins imposés que ceux du reste de la population. « L’ensemble des impôts personnels reste progressif jusqu’à un niveau élevé de revenu », observent les quatre auteurs de la note de l’IPP, basée sur des données de l’année 2016.

Mais ils constatent « une forte régressivité du taux d’imposition global » une fois franchi le seuil des 0,1 % de Français les plus riches. La note ne prend toutefois pas en compte les effets des réformes survenues depuis 2016, comme l’abaissement du taux d’impôt sur les sociétés de 33,3 à 25 %, le remplacement de l’ISF par un impôt sur la fortune immobilière ou l’introduction d’un prélèvement forfaitaire de 30 % sur les revenus du capital.

Les bénéfices des entreprises en question

Selon l’étude, les 37.800 foyers français les plus aisés, qui touchent plus de 627.000 euros annuels, ont un taux d’imposition global de 46 %. Mais ce taux diminue au fur et à mesure que les revenus de ces ultrariches progressent, jusqu’à atteindre 26 % pour les 75 foyers fiscaux les plus fortunés. Cela s’explique par la composition des revenus : ceux des Français les plus riches proviennent pour l’essentiel des bénéfices non distribués des entreprises, qui sont donc soumis à l’impôt sur les sociétés (IS) plutôt qu’à l’impôt sur le revenu (IR).

« Ce transfert d’une assiette de revenus imposables à l’IR vers une assiette de revenus uniquement imposables à l’IS n’est pas neutre », insiste l’IPP. « Par ce biais, le taux des impositions assises sur le revenu et le patrimoine personnels, situé au plus haut autour de 59 %, est remplacé par le taux bien plus bas de l’IS, de 33,33 % en 2016 », expliquent les auteurs.

Taxer les actionnaires

Mais « il ne faut pas conclure que la France est plus un paradis fiscal pour milliardaires que nos voisins », met en garde Laurent Bach, coauteur de la note. Les systèmes fiscaux néerlandais, suédois ou néo-zélandais sont également marqués par « une forme de régressivité en haut de la distribution des revenus », détaille l’IPP. Alors qu’un récent rapport de l’économiste Jean Pisani-Ferry suggérait de rétablir temporairement une forme d’impôt sur la fortune pour financer les coûteux investissements dans la transition écologique, ce type de prélèvement « n’a pu corriger la régressivité que nous documentons », avertissent les auteurs.

L’IPP juge en revanche « envisageable de taxer les revenus non distribués des holdings à l’impôt personnel sur le revenu » pour capter une partie des ressources des ultrariches qui échappent à l’impôt. « Si la taxation de la holding s’avérait générer de nouvelles formes d’optimisation, on pourrait envisager la taxation des actionnaires personnes physiques résidents fiscaux en France sur l’ensemble des résultats non distribués par les entreprises contrôlées », ajoute l’Institut. Une hypothèse qui n’enchante guère le gouvernement, Bercy estimant que les bénéfices non distribués « sont généralement réinvestis dans l’emploi et la croissance » des entreprises.