Nîmes : S’estimant victimes de discrimination, quatre clubs de sport féminins saisissent le défenseur des droits
Égalité•Les quatre clubs ne toucheront plus un euro de l’agglomération de Nîmes en 2023. De son côté la collectivité dénonce un procès d’intention et évoque des décisions fondées sur le droitJérôme Diesnis
L'essentiel
- Quatre clubs féminins ont saisi le défenseur des droits, s’estimant victime de discrimination.
- Ils dénoncent la décision de l’agglomération d’arrêter de les financer, alors qu’elle continue à abonder les clubs masculins de foot, hand et rugby.
- Pour l’agglomération, il s’agit d’une obligation juridique. En continuant ces financements, elle se serait mis hors-la-loi, n’ayant pas la compétence en matière de sports.
Quatre clubs féminins (volley, football, basket et hand) de l’agglomération de Nîmes ont décidé de saisir le défenseur des droits. Ils s’estiment « victimes de la part de la communauté d’agglomération d’une discrimination en raison du sexe, ce qui est susceptible de constituer une infraction pénale au sens des articles 225-1 et 432-7 du Code pénal », souligne leur avocate Hortense Douard. Le dossier a été déposé de façon symbolique ce 8 mars, journée internationale des droits des femmes.
« Ces quatre clubs représentent plus de 1.200 licenciées féminines sur le territoire de Nîmes Métropole et vingt salariés, expliquent les dirigeants dans un communiqué commun. Ils sont mis en danger depuis septembre dernier à la suite du soudain retrait de la métropole dans leur financement. » Les handballeuses de Bouillargues et les footballeuses évoluent en D2 (l’antichambre de l’élite), Nîmes Volley-Ball en N2 et les basketteuses en prénationale.
Depuis juillet 2020, changement de politique
La fin du versement à ces quatre clubs (de 60.000 euros pour le hand à 15.000 euros pour le basket) est la dernière étape d’un processus engagé à l’arrivée de la nouvelle équipe dirigeante à l’agglo en juillet 2020, après l’élection à la présidence de Franck Proust (LR). « On nous fait un procès d’intention. Il ne s’agit en aucune manière de viser les femmes, souligne le directeur de cabinet, Bernard Baumelou. Nous avons hérité d’une situation intenable juridiquement. La précédente mandature a multiplié par cinq les aides à un certain nombre de clubs en cinq ans. Or, l’agglomération de Nîmes n’a pas la compétence en matière de sport et n’a pas à subventionner de clubs sportifs. En 2020, nous avons d’ailleurs arrêté de financer une vingtaine de structures, mixtes ou masculins. Pour ces quatre clubs, on a au contraire choisi une baisse sur plusieurs années pour leur permettre d’anticiper ».
Pour les quatre clubs féminins, pourtant, l’équité est bafouée. « Les contrats de marché public jusqu’ici conclus reposaient sur des prestations de communication, ce que la métropole est habilitée à faire et qu’elle continue de faire auprès des clubs masculins. » Trois clubs masculins continuent de percevoir des sommes de l’agglomération. « Pour le club de foot (50.000 euros) du Nîmes Olympique (L2) et du Hand (200.000 euros) de l’Usam (Star Ligue), nous pouvons poursuivre les contrats de marché public par la promotion de l’image, justifie Bernard Baumelou. Ceci, grâce à la visibilité médiatique et leur exposition sur les chaînes nationales. D’ailleurs ce marché s’arrêtera si Nîmes Olympique est relégué en National. Concernant le Rugby Club nîmois (N2), le marché public (57.000 euros) concerne notre compétence pour le développement économique. Le rugby possède un club d’entreprises avec plus de 300 entreprises partenaires. Ce marché public nous permet d’y intervenir régulièrement ».
Le dossier dans les mains du défenseur des droits
Pas du tout convaincus par ces explications, les clubs féminins ont donc saisi la Défenseure des droits. « Elle va interroger Nîmes Métropole et lui demander de s’expliquer sur cette situation. Elle dispose également d’un pouvoir d’investigations », précise Hortense Douard, à France Bleu Gard Lozère. « En fonction des éléments, elle pourrait demander à Nîmes Métropole de revoir sa position et, si l’institution ne défère pas à cette invitation, lui transmettre une recommandation. Enfin, elle dispose d’un pouvoir d’injonction, qui est un pouvoir ultime ».