Hérault : A Carnon, bastion de la gratuité, se garer devient payant (et ça rouspète)
PLAGE•C’était l’une des dernières stations du littoral montpelliérain où il n’était pas nécessaire de passer par le parcmètre avant d’aller faire un ploufNicolas Bonzom
L'essentiel
- La commune de Carnon, l’un des derniers bastions de la gratuité sur le littoral héraultais, a décidé de faire payer le stationnement, dès le mois de juin.
- « Je ne suis pas contre les automobilistes, confie Yvon Bourrel (divers gauche), le maire de Mauguio-Carnon. Je souhaite remettre de l’ordre dans un espace public qui est complètement embolisé l’été, et même certains week-ends. »
- Elus de l’opposition et habitants se révoltent contre cette décision. Pas parce que les touristes devront mettre la main à la poche. Mais plutôt parce qu’eux aussi devront payer, toute l’année. Et à des tarifs qu’ils jugent beaucoup trop élevés.
Carnon (Hérault) était l’un des derniers bastions de la gratuité, sur le littoral héraultais. Si par bonheur vous aviez la chance de trouver une place, l’été, dans cette station balnéaire ultra-prisée, le stationnement était gratuit, pour tout le monde. Mais, comme sa voisine Palavas-les-Flots il y a six ans, la commune a cédé aux sirènes du parcmètre : dès le 1er juin, avant d’aller bronzer sur les plages de Carnon, il faudra s’acquitter d’un ticket de stationnement. La décision a été votée, le 13 février, au dernier conseil municipal.
Selon les zones, les automobilistes devront débourser entre 1,20 et 6 euros de l’heure. Dans la zone rouge, où se garer l’été est le plus délicat, ils auront tout de même droit à 30 minutes gratuites, avant de devoir passer à la caisse. « Je ne suis pas contre les automobilistes », confie à 20 Minutes Yvon Bourrel (divers gauche), le maire de Mauguio-Carnon. Son idée, c’est de repartager la rue, en incluant, désormais, les transports doux. Et d’apaiser la station. « La finalité, ce n’est pas de pressurer les gens, note l’élu. Je souhaite simplement remettre de l’ordre dans un espace public qui est complètement embolisé l’été, et même certains week-ends le reste de l’année. »
« Palavas-les-Flots, La Grande-Motte et Le Grau-du-Roi n’ont pas connu un désamour »
La mairie va investir 1 million d’euros dans la mise en place de parcmètres. Mais, chaque année, selon ses premières estimations, le stationnement devrait lui rapporter environ 500.000 euros. Une manne financière plutôt bienvenue, alors que la commune est engagée dans une requalification profonde de sa station balnéaire. Car ces aménagements, Yvon Bourrel ne souhaite pas les voir « supporter, seulement, par les contribuables. Cela me paraît acceptable que l’usager, quand il vient, peut en être le contributeur, aussi. Rester sur un modèle où le contribuable est le seul à assumer l’entièreté d’un service qui ne lui est pas spécifiquement destiné », c’est inconcevable.
Les Montpelliérains, et les touristes, peuvent-ils tirer définitivement un trait sur Carnon, s’il faut payer le stationnement ? Non, assure le maire. Un cabinet spécialisé, à qui la commune a fait appel, a constaté que « contrairement à une idée reçue, Palavas-les-Flots, La Grande-Motte et Le Grau-du-Roi n’ont pas connu un désamour de la part des gens », quand la gratuité du parking a été abandonnée dans ces communes du littoral, indique Yvon Bourrel. « Les gens disent plutôt "Au moins, on aura une place !" »
« Nous allons au suicide »
Cette décision a provoqué, dans cette station pourtant tranquille l’hiver, un vent de révolte. Si de nombreux habitants rouspètent, ce n’est pas parce que les touristes devront mettre la main à la poche. Mais plutôt parce qu’eux aussi devront payer. Serge Wolniewicz, président du collectif Citoyens de Carnon, est l’un des fers de lance de cette colère. « Nous ne sommes pas forcément pour la gratuité totale du stationnement à Carnon », car la manne financière que les passages au parcmètre représentent peut éventuellement « améliorer le quotidien des habitants à l’année », confie ce Carnonnais à 20 Minutes.
Mais, déplore-t-il, les abonnements annuels proposés pour les résidents sont beaucoup trop chers. Pour les particuliers, il faudra débourser 20 euros pour une voiture, 100 euros pour la deuxième, et 200 euros pour une voiture supplémentaire. Pour les professionnels, c’est plus onéreux encore : 100 euros pour le premier véhicule et 200 euros pour un deuxième. « Nous souhaitons que soient mis en place les mêmes tarifs qu’à Palavas-les-Flots, c’est-à-dire 20 euros par an et par véhicule, pour les particuliers ou les professionnels, poursuit Serge Wolniewicz. Ce sont des tarifs raisonnables. Sinon, nous allons au suicide : Carnon deviendra une station morte, dans peu de temps. » Le collectif Citoyens de Carnon espère « entamer une discussion [avec la mairie], reprend son président. Sinon, nous entamerons une procédure devant le tribunal. »
Un recours devant le tribunal administratif
Alternative citoyenne n’a pas attendu : le groupe d’opposition au conseil municipal a déposé, lundi, un recours contre cette mesure devant le tribunal administratif. « L’été, on sait qu’il faut faire quelque chose », a confié Marianne Pelletier (sans étiquette), l’une des élues de ce groupe, lors du conseil municipal du 13 février. Mais l’hiver, pour cette conseillère municipale, c’est inutile. « Les visiteurs, à Carnon, l’hiver, toute l’année, ce sont beaucoup les familles et les amis, souvent des personnes âgées, a ajouté Daniel Bourguet (sans étiquette), membre du même groupe. Ces gens-là, comment vont-ils faire ? Ils vont devoir payer, cher, à chaque fois qu’ils viennent leur rendre visite ? »
Alternative citoyenne demande, notamment, que le stationnement soit payant uniquement du 15 juin au 15 septembre, quand la station est bondée. Et que le parking des plages, où se trouvait la fête foraine, reste gratuit, toute l’année. Ces opposants au maire demandent, aussi, comme le collectif Citoyens de Carnon, qu’un forfait de 20 euros par véhicule soit mis en place. Et c’est tout. Mais pour Yvon Bourrel, 20 euros pour la première voiture, puis 100 euros pour une deuxième, ce n’est pas si cher. « Pour une famille qui a deux voitures, cela représente 10 euros par mois, note l’élu. Est-ce que cela vous paraît vraiment excessif ? » Mais l’élu est ouvert aux discussions avec les habitants de Carnon et les professionnels. « Nous allons apporter des améliorations », assure-t-il. Une fois amendées, les modalités de la mise en place du stationnement payant seront revotées, au prochain conseil municipal. Mais d’ici là, le débat promet d’être houleux.