A Lille, la ségrégation de l’habitat selon les revenus est plus forte qu’à Lyon
VIVRE pas ENSEMBLE•Développement urbain et fortes inégalités de revenus provoquent une séparation de l’habitat entre riches et pauvres plus grande à Lille qu’à Lyon20 Minutes avec AFP
La séparation de l’habitat entre riches et pauvres est plus forte à Lille qu’à Lyon, selon un constat de l’Insee, l’institut national des statistiques. Cette ségrégation s’explique par divers facteurs dont le développement urbain et les fortes inégalités de revenus, analysent deux experts.
A Lille, « dès le XIXe siècle, la bourgeoisie, qui ne souhaitait pas vivre dans les quartiers ouvriers pour ne pas subir la pollution ou par peur des troubles sociaux, crée ses propres quartiers d’habitation comme Barbieux à Roubaix, autour de l’hippodrome à Lambersart ou à Marcq-en-Barœul », rappelle Yoann Miot, maître de conférences à l’Université Gustave Eiffel.
Concentration des classes populaires
Mais l’effondrement de l’industrie textile à partir des années 1960 et la tertiairisation de l’économie ont engendré une « précarisation des classes populaires, notamment des ouvriers, et fini par exclure les plus pauvres du marché classique du logement pour les concentrer dans le parc social », poursuit le chercheur.
A la clé, une concentration des classes populaires « dans le seul endroit où le marché reste accessible, c’est-à-dire autour de Roubaix ». Parallèlement, la concentration des populations dans les quartiers les plus riches est « beaucoup plus forte que celle des pauvres dans les quartiers les plus pauvres », avec en banlieue, des « lotissements de cadres structurés autour de golfs ».
Lorsque du logement social est construit dans des communes aisées comme Bondues, « ce sont plutôt des ménages situés dans les franges éligibles les plus aisées qui vont y vivre, dans la mesure où une partie des attributions de logements sociaux reste l’apanage de la commune », assure Yoann Miot.
Ecarts de revenus sont moins élevés à Lyon
A l’inverse, la métropole lyonnaise fait partie des grandes villes les plus homogènes dans la répartition de l’habitat, selon l’Insee. « L’une des raisons est que les écarts de revenus sont moins élevés à Lyon qu’à Paris ou Marseille », explique Jean-Yves Authier, professeur de sociologie à l’Université Lumière Lyon-2.
De même, le marché immobilier lyonnais est « certes tendu » mais « beaucoup moins que le marché parisien », poursuit Jean-Yves Authier. Troisième facteur d’atténuation, la présence « sans doute plus importante de logements sociaux dans le centre-ville de Lyon » et une politique de rénovation urbaine « dans les quartiers de La Duchère, Mermoz ou dans les communes populaires de l’Est qui amène à faire diminuer la part de logements sociaux ».
L’agglomération présente cependant des contrastes sociaux « extrêmement importants, à la fois à l’intérieur de Lyon et en proche banlieue » rappelle-t-il, avec une « opposition très nette entre les communes de l’ouest et du nord-ouest, très bourgeoises, et celles de l’est, beaucoup plus populaires ».