Accident de Pierre Palmade : Quels sont les risques de la drogue au volant ?
securite routiere•Les perceptions et les réflexes du conducteur sont altérées lorsqu'il est sous l'empire de stupéfiantsDelphine Bancaud
L'essentiel
- Dans le grave accident impliquant Pierre Palmade survenu vendredi, trois personnes, outre le comique, ont été grièvement blessées, parmi lesquelles une femme enceinte qui a perdu son enfant à naître.
- Pierre Palmade conduisait sous l’empire de la cocaïne. D’où l’importance de rappeler les dangers inhérents à la conduite sous drogue.
- En 2021, 605 personnes ont été tuées dans un accident impliquant un conducteur sous l’empire de stupéfiants.
Un drame qui rappelle les dangers de la drogue au volant. Vendredi, Pierre Palmade, qui conduisait sous l’empire de la cocaïne, a été impliqué dans un accident à Villiers-en-Bière (Seine-et-Marne) faisant, outre l’humoriste, trois blessés graves, dont un enfant et une femme enceinte qui a perdu son bébé.
Ce type d’accident n’est malheureusement pas rare. Car selon les derniers chiffres de l’Observatoire national interministériel de la Sécurité routière (Onisr), 605 personnes ont été tuées en 2021 dans un accident impliquant un conducteur sous l’empire de stupéfiants. Des évènements tragiques qui surviennent plus souvent la nuit et le week-end et qui impliquent majoritairement des hommes, en moyenne âgés de 18 à 34 ans.
« Lorsqu’on conduit, on prend une décision toutes les 5 secondes »
La Sécurité routière ne détaille pas le type de drogue consommée par les conducteurs impliqués, mais selon Anne Lavaud, déléguée générale de l’association Prévention routière, c’est le plus souvent le cannabis qui est en cause : « En France, 850.000 personnes consomment quotidiennement du cannabis, et 5 millions en fument une fois dans l’année. Concernant la cocaïne, 600.000 Français en consomment une fois dans l’année. »
Les effets de ces drogues sur la conduite ne sont pas identiques, même s'ils ont tous des répercussions sur les fonctions cognitives. Selon l’Onisr, un conducteur testé positif au cannabis multiplie par 1,65 son risque d’être responsable d’un accident mortel. « Les perceptions du conducteur vont être altérées. Il aura plus de mal à rester concentré, à maintenir sa trajectoire, à avoir les bons réflexes. Il peut rencontrer des problèmes de coordination, aura un temps de décision et de réaction allongé », indique Anne Lavaud.
Un conducteur sous l’empire de la cocaïne aura, lui, un autre comportement sur la route : « Il éprouvera un sentiment de toute-puissance, sera indifférent à la fatigue et aura une conduite plus agressive », poursuit-elle. Ce qui pourra le mener aussi à accumuler les fautes d’inattention et les erreurs de jugement. « Or, lorsqu’on conduit, on prend une décision toutes les 5 secondes », informe Anne Lavaud. « Et quand on associe drogue et alcool, on multiplie par 30 le risque d’accident mortel », a souligné ce lundi sur France Info Camille Chaize, porte-parole du ministère de l’Intérieur.
Des traces qui perdurent dans le sang
Même s’ils ne sont pas impliqués dans un accident, lesdits conducteurs risquent d’être fortement sanctionnés en cas de contrôle. D’autant que les tests salivaires de dépistage donnent des résultats très précis. En 2021, plus de 600.000 dépistages de stupéfiants ont été réalisés (+ 39,1 % par rapport à 2020). Et ce, parce qu’une mobilisation particulière des forces de l’ordre avait été demandée sur le sujet. Conséquence : près de 106.000 infractions pour conduite sous empire de stupéfiant ont été relevées (+ 28,6 %) en 2021. Les verbalisations de la conduite de véhicule après usage de stupéfiants ont représenté 15,5 % des délits routiers cette année-là.
Bien souvent, les automobilistes usagers de drogues ignorent un fait important : « Même si leurs effets s’estompent rapidement, les traces ne disparaissent dans le sang parfois que plusieurs jours après leur prise », insiste Anne Lavaud. La durée de détection dépend de la quantité de stupéfiant prise, de la fréquence de la consommation et de la morphologie du conducteur. Selon le site Drogue infos service, les traces du cannabis pour un usager occasionnel peuvent être détectées jusqu’à 72 heures après sa consommation et pour un usager quotidien, jusqu’à un mois après. La cocaïne, elle, est détectable dans le sang jusqu'à 24 heures après.
Des risques juridiques très importants
L’usage de stupéfiants étant considéré comme un délit, le conducteur encourt une amende de 4.500 euros et jusqu’à deux ans de prison. S’il est en même temps sous empire de l’alcool, il risque une amende 9.000 euros et jusqu’à trois ans de prison. De plus, 6 points de permis lui sont automatiquement retirés, et des peines complémentaires peuvent être décidées : obligation de soins, retrait du permis de conduire, stages de sensibilisation, travaux d’intérêt général…
Si le conducteur est responsable d’un accident corporel (blessures), il risque jusqu’à sept ans de prison et 100.000 d’amende. En cas d’accident mortel, il encourt jusqu’à dix ans de prison et 150.000 euros d’amende. « Le conducteur peut aussi faire l’objet d’une exclusion de garantie, c’est-à-dire que l’assurance ne le couvrira pas. S’il doit indemniser une victime, il devra la rembourser sur ses propres deniers, parfois toute sa vie », indique Anne Lavaud.
Booster la prévention, un impératif
Pour prévenir ce type de comportements très dangereux, la Sécurité routière a notamment diffusé en 2018 un film vidéo, baptisé Fumer du cannabis est illégal, sur la route ça peut être fatal. Mais pour Anne Lavaud, il faut aller plus loin : « Sam, le conducteur sobre de la soirée, est désormais bien connu. Il faut désormais relayer que Sam, c’est aussi celui qui ne fume pas de cannabis. »
Selon elle, il est aussi nécessaire d’apprendre aux jeunes à refuser de monter dans la voiture d’un ami si ce dernier a consommé du cannabis ou de la cocaïne : « C’est une manière de stigmatiser son comportement et de l’inciter à se remettre en cause. »