À Strasbourg, un dispositif pour les adolescents « empêchés par l’anxiété d’aller vers l’école »
éducation•Expérimentée depuis la rentrée 2021, « Brik’école » a accueilli 16 jeunes du Bas-Rhin en plein refus anxieux scolaire. Parmi eux, 12 ont retrouvé un cursus et tous ont repris confiance en euxThibaut Gagnepain
L'essentiel
- A Strasbourg, une expérimentation a été lancée il y a un an et demi. « Brik’école », permet aux collégiens et lycéens « empêchés par l’anxiété d’aller vers l’école » d’y retourner peu à peu ou du moins de trouver leur voie.
- Une quinzaine d’élèves ont donc été accueillis d’octobre à mai l’an dernier, avant de laisser la place à une autre promotion.*
- « Ça a été un endroit de partage et de découverte où se comprenait entre nous, où on n’était pas jugé », témoigne Aminata.
Trois heures de cours non traditionnels par-ci, trois autres par-là, des temps d’écoute, d’ateliers avec des artistes, des entretiens… Bienvenue à « Brik’école », ce dispositif lancé depuis un peu plus d’un an à Strasbourg par la Maison des adolescents (MDA). Son but ? Permettre aux collégiens et lycéens « empêchés par l’anxiété d’aller vers l’école » d’y retourner peu à peu ou du moins de trouver leur voie.
« Il existe ce type d’expériences un peu partout mais elles se passent souvent dans les établissements ou à l’hôpital », poursuit Alexandre Feltz, médecin généraliste et président de la MDA. « Ici, nous sommes dans un tiers lieu, c’est un cas unique en France. » Où une quinzaine d’élèves ont donc été accueillis d’octobre à mai l’an dernier, avant de laisser la place à une autre promotion.
Quel bilan pour le premier millésime ? « Très satisfaisant car 12 adolescents sur les 16 ont repris leur cursus ou une formation », répond Corinne David, médecin scolaire coordinatrice du projet. Comme elle, différents professionnels sont intervenus tout au long de l’année : pédopsychiatre, psychologue, assistante sociale, enseignants mais aussi différents artistes.
Car « Brik’école » ne veut vraiment pas ressembler au milieu scolaire traditionnel. Chaque semaine, les adolescents ont ainsi la possibilité de découvrir la vidéo, la sérigraphie, le théâtre, la photo… « Cette médiation culturelle ouvre des champs et peut permettre d’avancer vers des symptômes », détaille le docteur Feltz.
Quant aux cours, trois matins par semaine afin de « ne pas surcharger les élèves », ils sont aussi particuliers. « On commence toujours par un temps collectif sur l’estime de soi puis on fait des rappels généraux et on s’attaque enfin à des chapitres précis », détaillent Elodie Laag et Marie Lang, les deux professeurs qui se relaient. « On essaie de suivre au mieux le programme mais ce n’est pas toujours évident. En tout cas, le travail en petit groupe les met en confiance. »
Pauline peut confirmer. Arrivée fin 2021 alors qu’elle était déscolarisée depuis la classe de 4ème, la jeune fille de 16 ans originaire de Weyersheim (Bas-Rhin) s’est complètement relancée depuis son passage au sein du dispositif. « Elle rayonne », apprécie même sa mère. « Je ne pouvais plus aller à l’école, c’était trop un endroit d’insécurité », rappelle l’adolescente, ravie d’être désormais inscrite en CAP fleuriste.
« Un endroit de partage et de découverte »
À côté d’elle, Aminata et Terry n’ont elles pas encore trouvé leur voie. « On cherche des formations ou services civiques », expliquent les deux adolescentes qui tirent néanmoins un bilan très positif de leur passage. « Ça a été un endroit de partage et de découverte où se comprenait entre nous, où on n’était pas jugé », témoigne la première. « Avant, j’étais incapable de prendre le tram ou même de sortir de chez moi. Tout n’est pas encore parfait mais ça va beaucoup mieux », complète la deuxième.
« L’essentiel est qu’il y ait une remobilisation de leur part et qu’ils repassent en mode projet », synthétise le pédopsychiatre Vincent Berthou, sans savoir si cette expérimentation sera reconduite à la fin de cette année scolaire. Financée par l’Agence régionale de santé, l’Éducation nationale, la Caisse d’allocations familiales et la Ville de Strasbourg, elle est dotée d’un budget annuel de 200 000 euros.
« Nous sommes à la disposition d’autres Maisons des adolescents pour le dupliquer ailleurs », lance Alexandre Feltz. En attendant, il reste quelques places à « Brik’école » cette année. « Le groupe est évolutif », conclut le docteur David.
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