EnergieLe Sénat facilite la construction de nouveaux réacteurs nucléaires

Nucléaire : Le Sénat facilite la construction de nouveaux réacteurs

EnergieLe texte voté par les sénateurs fait aussi sauter le plafond de la part du nucléaire dans le futur mix énergétique
20 Minutes avec AFP

20 Minutes avec AFP

D’abord un projet de loi sur la construction de réacteurs nucléaires, puis un texte sur les énergies renouvelables, et enfin un projet de loi de programmation énergétique qui doit fixer les trajectoires de la France dans chaque énergie. C’est dans cet ordre que les deux Chambres sont amenées à discuter de l’avenir énergétique de la France, les deux premiers textes étant déjà discutés. Un calendrier contesté par les parlementaires, qui reprochent au gouvernement de légiférer dans le désordre. « Il nous faut respecter le débat public », a insisté la ministre de la Transition énergétique Agnès Pannier-Runacher.

Porté par une majorité de droite, le Sénat devait donc voter mardi soir un projet de loi très technique, visant à favoriser la construction de nouveaux réacteurs nucléaires. Mission accomplie, à 239 voix pour et 16 contre, au prix d’une version très décomplexée du texte. Examinée en mars à l’Assemblée, cette version simplifie les procédures administratives afin de favoriser la construction de nouveaux réacteurs. C’est « la première pierre d’un immense chantier pour la relance du nucléaire en France », a souligné Bernard Buis (RDPI).

Expropriations facilitées, constructions sans enquête publique engagées

Le projet de loi est borné à des installations nouvelles situées sur des sites nucléaires existants, ou à proximité. Cela pour une durée limitée à 15 ans dans le texte initial, portée à 27 ans par le Sénat. Concrètement, les sites seront dispensés d’autorisation d’urbanisme, le contrôle de conformité étant assuré par l’Etat. Le droit d’expropriation sera assoupli. Ou encore les travaux sur les bâtiments non destinés à recevoir des substances radioactives pourront être engagés avant clôture de l’enquête publique.

Selon Agnès Pannier-Runacher, ces dispositions permettront « de ne pas ajouter un délai de deux à trois années à la construction d’un réacteur ». Alors qu’Emmanuel Macron a annoncé vouloir construire au moins six nouveaux réacteurs, des deux prochains EPR devraient être implantés à Penly, en Seine-Maritime. Objectif « plutôt fin 2027 » pour « la première coulée de béton » et « 2035-2037 » pour la mise en service.

« Une mascarade démocratique »

Les sénateurs ont élargi la portée de ce texte technique, en faisant sauter des « verrous » de l’actuelle loi de programmation des énergies. Ils ont notamment supprimé l’objectif de réduction à 50 % de la part du nucléaire dans la production d’électricité d’ici à 2035 et imposé la révision du décret qui prévoit la fermeture de 12 réacteurs existants, en plus des deux de Fessenheim. Des dispositions qui pourront être revues dans la suite de la navette parlementaire mais qui ont suscité de vives réactions.

Greenpeace France et le réseau Sortir du nucléaire ont annoncé dans un communiqué commun « quitter le débat public » en cours sur de futurs réacteurs, dénonçant « une mascarade démocratique ». Les organisateurs de ce débat public s’étaient eux aussi alarmés de la tournure des discussions au Sénat. Chantal Jouanno, la présidente de la Commission nationale du débat public, « est en dehors des réalités », a réagi Gérard Longuet (LR) dans l’hémicycle.

Le texte sur les énergies renouvelables affaibli ?

« Le nucléaire doit être le fer de lance de la politique énergétique française pour les 30 années à venir », a affirmé la centriste Amel Gacquerre, relevant toutefois que « des questions centrales ne sont pas abordées » dans le texte, notamment le financement. Les sénateurs ont en outre adopté des amendements visant à intégrer les risques liés au changement climatique dans la démonstration de sûreté des réacteurs et la cyber-résilience, et alourdi les peines pour les intrusions dans les centrales. « Un panel de mesures pour une relance maximaliste du nucléaire », fustige l’écologiste Daniel Salmon.



Surtout, en faisant sauter le plafond du nucléaire dans le mix énergétique, ce texte rend bancal celui sur les énergies renouvelables, discuté entre les deux chambres au même moment. Outre Les Républicains et les centristes, ont voté en faveur du texte les groupes RDPI à majorité Renaissance et Indépendants et la majeure partie du groupe RDSE à dominante radicale. Les écologistes ont voté contre, les groupes PS et CRCE à majorité communiste se sont abstenus.