Prix de l’énergie : Ce n’est pas le tarif du gaz qui fait flamber le coût des incinérations
Partir en fumée•De manière générale, les tarifs des incinérations dans les crématoriums ont augmenté en ce début d’année. Si le prix du gaz y est un peu pour quelque chose, ce n’est pas cela qui détermine le montant, souvent salé, de la prestation
Mikaël Libert
L'essentiel
- Avec la guerre en Ukraine et l’arrêt de l’importation du gaz russe, le prix du gaz en France a fortement augmenté.
- Si cela impacte fortement certains domaines d’activité, comme les boulangers, c’est aussi le cas, dans une moindre mesure, pour les crématoriums.
- En effet, le coût de l’énergie ne constitue qu’une faible part du prix d’une prestation de crémation.
C’est un fait, déplorable, la crise énergétique pèse fortement sur les budgets des particuliers, des professionnels et des collectivités. Pour économiser, on éteint les lumières, on baisse le chauffage, on fait sa lessive la nuit, on utilise moins sa voiture… Autant de mesures contraignantes pour notre petit confort, certes, mais somme toute bénéfiques pour l’environnement. Sauf que, pour certains, l’augmentation des tarifs de l’énergie est autrement plus dramatique. On l’a vu avec les boulangers, par exemple, contraints de couper leurs fours pour éviter les factures indécentes. Dans un autre registre, les crématoriums, où on utilise aussi des fours. Mais l’impact du prix du gaz, s’il est bien réel, ne joue que très peu sur les tarifs des prestations.
Si l’on n’est pas égaux dans la vie, on l’est parfois encore moins dans la mort. Du moins, dans les prestations qui entourent la mort. Il existe en la matière une disparité qui ne cesse de faire bondir les associations de consommateurs. Des « yoyos tarifaires » comme le dénonçait, en 2019, l’UFC-Que choisir, même pour les « prestations standardisées ». Moins onéreuse que l’inhumation, la crémation n’est pas épargnée par les fluctuations des tarifs proposés.
Jusqu’à 80 % plus cher pour la même prestation
Selon les prix recueillis par 20 Minutes, la crémation d’un adulte coûte en moyenne 600 euros. En y regardant de plus près, on obtient 515 euros à Lille, 536 euros à Dijon, 711 euros à Brest, 762 euros à Chambéry et 936 euros à Ajaccio. Pour la crémation d’un enfant, âgé entre 1 et 12 ans, on passe d’un service gratuit à Dijon à un tarif de 400 euros à Brest, voire 478 euros à Ajaccio. Et, dans l’immense majorité des cas, les grilles tarifaires sont revalorisées chaque début d’année. A Paris, selon nos calculs, le prix de la crémation d’un adulte a augmenté de 7 % entre 2021 et 2022, passant de 571 à 611 euros. Même augmentation à Lille, mais entre 2020 et 2023.
Selon Patrick Lerognon, secrétaire général de l’Union du pôle funéraire public (UPFP), la facture énergétique des crématoriums n’est pas la cause première : « Le prix du gaz sur une incinération ne représente, en moyenne, que 35 euros pour un prix moyen global de 650 euros », assure-t-il. Cela vaut pour aujourd’hui, « parce que les anciens contrats de gaz de ces établissements courent encore », ajoute-t-il. Par conséquent, même si la facture de gaz venait à doubler, la répercussion sur le prix d’une crémation « ne changerait pas grand-chose au tarif ». Il ne faut pas chercher du côté de l’électricité, cette énergie étant très rarement utilisée pour faire fonctionner les fours des crématoriums.
En fait, l’essentiel du montant facturé pour une crémation sert à payer des charges : « Le personnel, l’amortissement des bâtiments, la maintenance… », énumère le professionnel. L’un des postes de dépense le plus élevé étant le traitement des fumées. Les nouvelles normes antipollution obligent les crématoriums a s’équiper de systèmes de filtration très efficaces, mais aussi très onéreux. « Aujourd’hui, le système de filtration coûte en moyenne le prix du four. Ça fait une addition à 600.000 euros », estime Patrick Lerognon. A titre d’exemple, pour la mise aux normes de son crématorium de Vendin-le-Vieil, la Communauté d’agglomération de Lens-Liévin a investi près de 2 millions d’euros, dont un million pour le seul « atelier de filtration ».