Tornade dans le Pas-de-Calais : « J’ai mis ma famille à l’abri dans la cave », raconte le maire de Bihucourt
CATASTROPHE•Dimanche soir, une partie des Hauts-de-France a été touchée par un violent épisode orageux. Certaines communes ont été particulièrement impactées par de fortes rafales de vent. A Bihucourt, dans le Pas-de-Calais, une tornade a dévasté le villageMikaël Libert
L'essentiel
- Une tornade a ravagé le village de Bihucourt, dans le Pas-de-Calais.
- Si aucune victime n’est à déplorer, les dégâts matériels sont impressionnants.
- Selon le maire de la commune, ce sont plus des trois quarts des habitations qui ont été touchées.
De notre envoyé spécial à Bihucourt (Pas-de-Calais),
Le jour d’après. Dimanche soir, le village de Bihucourt, dans le Pas-de-Calais a quasiment été rayé de la carte après le passage de ce que les pompiers locaux qualifient eux-mêmes de tornade. L’événement météorologique, survenu aux alentours de 18 heures, n’aura duré que quelques instants. Il n’en fallait pas davantage pour faire de cette commune une véritable scène de guerre. Ce lundi matin, les habitants demeuraient incrédules en constatant l’étendue des dégâts.
L’ensemble des routes pour accéder au village de Bihucourt est bouclé par des barrages de gendarmerie. Pour pénétrer à l’intérieur, il faut être pompier, secouriste, technicien EDF ou pouvoir prouver que l’on habite la commune. « C’est avant tout pour éviter l’affluence des curieux et éviter les pillages », assure à 20 Minutes l’un des militaires chargé de filtrer les entrées par la route principale. Dans les champs aux abords de Bihucourt sont éparpillés çà et là des tôles de toiture, des arbres arrachés et des effets personnels emportés par le vent. Mais ce n’est rien comparé au spectacle de désolation qu’offre le centre-village.
« Je n’ai plus rien, même ma voiture est sous les décombres »
« Sur les 150 habitations que compte la commune, plus d’une centaine ont été touchées. Il faudra reloger plus de la moitié des habitants », se désole le maire, Benoît-Vincent Caille. Evidemment, l’élu était chez lui quand les éléments se sont déchaînés : « Ça a été très rapide. Les nuages sont apparus, on les a vus descendre et commencer à former des tourbillons. Quand j’ai vu une tôle s’envoler, j’ai mis ma famille à l’abri dans la cave », poursuit-il. Un bon réflexe, reconnaît un pompier, qui a été suivi par beaucoup d’habitants : « C’est grâce à cette présence d’esprit, mais aussi parce que les gens n’étaient pas encore couchés, qu’il n’y a pas eu de victime », nous explique-t-il.
Pas de victime, mais des dégâts innombrables. Dans toutes les rues, des débris de tuiles jonchent le sol. Murs écroulés, charpentes effondrées, arbres et poteaux électriques brisés. « On s’en sort bien dans notre malheur, je crains maintenant les infiltrations d’eau », souffle Sébastien en contemplant le toit de sa maison déshabillé de la moitié de ses tuiles. Autour de lui, plusieurs maisons sont réduites à un tas de gravats. « Je n’ai plus rien, plus rien, même ma voiture est sous les décombres », lâche, encore ébahi, un habitant. Lui n’a pas encore pu pénétrer dans sa maison, il devra attendre que les pompiers reconnaissent les lieux pour écarter tout risque.
« On ne peut emporter que le strict nécessaire »
Les reconnaissances par les pompiers de la cellule Sauvetage déblaiement ont commencé dès ce lundi matin. Ils marquent les maisons touchées qui risquent de s’effondrer. « Nous aurons un état des lieux précis ce soir, affirme Philippe Rigaud, contrôleur général du SDIS 62. En attendant, les habitants sont accueillis en mairie dans une cellule psychologique. » Vers midi, on commence néanmoins à croiser des silhouettes sortant de maisons délabrées, traînant des valises, portant des sacs ou poussant des brouettes. A l’intérieur, ce qu’il reste de leurs vies. Pour Anne, cela se résume à deux sacs remplis : « On ne peut emporter que le strict nécessaire, comme des vêtements, des papiers. Franchement, je suis dégoûtée. »
Depuis la grille de son jardin, Jean-François interpelle les gendarmes : « Faut dire à la mairie que j’ai besoin d’un groupe électrogène, mes poissons sont en train de crever », crie-t-il. Lui a relativement été épargné, seules quelques tuiles de son toit ayant été emportées. « J’en avais en rab alors j’ai reposé ça moi-même. Mais le plus grave, c’est l’électricité. J’ai une centaine de cichlidés dans des bacs mais tout le monde se fout bien des poissons », peste-t-il.
Dès la fin de matinée, on pouvait assister au ballet des entreprises de couverture. Les plus chanceux, comme Jean-François, voyaient leurs toits regarnis des quelques tuiles qui manquaient. Aux autres, on proposait des bâches. « On a au moins 150 personnes qui seront relogées pour une durée très longue », affirme le maire. Soit dans les communes alentour, soit dans un camping proche, qui met plusieurs mobile-homes à disposition des sinistrés. Mais l’heure est avant tout au déblayage, et pour y parvenir rapidement, la ville en appelle aux bénévoles. « C’est un drame, à quelques semaines de Noël en plus », souffle l’employée d’une friterie qui arpente les rues de Bihucourt pour distribuer des sandwichs aux sinistrés. La solidarité n’a pas attendu l’appel du maire pour s’organiser.
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