Bretagne : « Invisible » dans l’espace public, le gallo veut se faire un nom sur les panneaux
LANGUES RÉGIONALES•Le collectif « Du galo en Bertègn » dénonce une inégalité de traitement avec le bretonJérôme Gicquel
L'essentiel
- Deuxième langue régionale après le breton, le gallo est parlé par environ 191.000 personnes en Bretagne.
- La langue gallèse peine toutefois à être visible dans l’espace public.
- Le collectif « Du galo en Bertègn » appelle les élus à accélérer sur la signalétique bilingue en français-gallo.
C’est une langue parlée par environ 191.000 personnes, selon une étude de l’institut TMO Régions datant de 2018, soit presque autant que le breton et ses 207.000 locuteurs. Dans son territoire de Haute-Bretagne, une zone qui s’étend grossièrement à l’est d’une ligne entre Saint-Brieuc et Vannes, le gallo peine pourtant à être visible dans l’espace public.
Hormis quelques villes comme Saint-Brieuc (Saint-Berieu), Fougères (Foujër), Iffendic (Fendic) ou Liffré (Lifrë), rares les collectivités qui affichent leur nom en gallo sur leurs panneaux d’entrée de bourg. A Rennes par exemple, capitale de la Bretagne située en plein cœur du pays gallo, on ne trouve aucune trace d’un panneau bilingue « Rennes-Rene » aux entrées de la ville, alors que des panneaux Rennes-Roazhon sont bien visibles.
Reconnu au même titre que le breton
Une inégalité de traitement qui a du mal à passer pour le collectif « Du galo en Bertègn » (Du gallo en Bretagne), qui milite « pour le respect des droits culturels et linguistiques en pays gallo. » Car la Bretagne possède bien deux langues régionales. Le breton bien sûr, la plus connue, mais aussi la langue gallèse, une langue d’oïl comme le picard ou le wallon. En 2004, les deux langues ont d’ailleurs été reconnues conjointement « langues de Bretagne » par le Conseil régional. « C’est une chance d’avoir cette richesse linguistique », assure Raphaël Gouablin, ancien président de l’Institut de la langue gallèse.
Le 15 mars 2022, lors de la signature par Jean Castex d’une convention spécifique sur les langues de Bretagne, le gallo a également eu le droit à sa part de gâteau, avec notamment des aides en faveur de l’enseignement et de la formation en langue gallèse. « Cela avance mais pas comme on le veut car le gallo reste toujours invisible dans l’espace public », souligne Raphaël Gouablin.
Des panneaux pour « rendre réel son existence »
Pour alerter les élus sur l’invisibilité de la langue, classée comme sérieusement en danger par l’Unesco, le collectif a donc pris la plume et rédigé un manifeste, signé par 300 artistes, universitaires et personnalités et une quarantaine de structures associatives de la région. « On veut du gallo en pays gallo, c’est aussi simple que ça », indiquent ses militants. Et pour cela, il faut que la langue soit affichée sur des panneaux routiers. « Cela rend réel l’existence d’une langue, cela lui donne droit de cité », estime Nicolas Beurrier, coprésident de l’association Qerouézée.
Pas vénères, les défenseurs du gallo n’entendent pas pour autant déboulonner les panneaux en langue bretonne sur leur territoire. « Ce n’est en rien une opposition, les deux langues cohabitent très bien ensemble », souligne Guillaume Gérard, enseignant et président de la Granjagoul à Vitré. Ils espèrent tout de même que leurs efforts porteront leurs fruits et que des panneaux de signalétique en gallo fleuriront bientôt au bord des routes de « Haote-Bertègn ».
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