Loire-Atlantique : Des vestiges « exceptionnels » mis au jour dans le lit de la Loire
ARCHEOLOGIE•Une dizaine d’épaves de bateaux des XVIIème et XVIIIème siècles viennent de refaire surface, près d’Ancenis20 Minutes avec AFP
L'essentiel
- Un chantier de fouilles se tient jusqu’au mois d’octobre dans le cadre d’un vaste programme de rééquilibrage du lit de la Loire.
- Submergées par les eaux une grande partie de l’année, l’île Coton et l’île Poulas sont devenues le théâtre de découvertes inédites.
Des épaves et pêcheries dans un état de conservation « exemplaire ». Voilà les vestiges récemment mis au jour sur les berges sableuses de la Loire, près d’Ancenis (Loire-Atlantique), et qui font le bonheur des archéologues de l’Institut national de recherches archéologiques préventives (Inrap). Submergées par les eaux une grande partie de l’année, l’île Coton et l’île Poulas sont en effet devenues le théâtre de découvertes inédites. Près de la première, une dizaine d’épaves de bateaux des XVIIème et XVIIIème siècles, viennent d’être exhumées. Fait rare et notable, ces embarcations, qui portent des traces d’usure, ont été sciemment remplies de pierres et installées sur le flanc, pour créer deux enrochements de plus de 40 mètres de long.
« La première hypothèse, c’est qu’il s’agissait de digues permettant de protéger la pointe de l’île Coton », explique Anne Hoyau-Berry, archéologue. « Mais la découverte d’un troisième enrochement perpendiculaire nous fait pencher vers l’aménagement d’un port ou une volonté d’acheminer de l’eau à cet endroit précis ». Ces barges à fond plat sont caractéristiques des bateaux de charge de l’époque qui transportaient des matières premières (bois, pierres, ardoises, sable), du sel ou du vin.
Longs d’environ 14 mètres, ils sont déblayés pierre après pierre par les archéologues à pied d’œuvre, qui doivent à la fois pomper l’eau remontant du sol et arroser le bois pour éviter qu’il ne se détériore en séchant. « C’est un travail de fourmi physiquement difficile, reconnaît l’archéologue. Mais la sécheresse de l’été nous a permis de travailler dans de bonnes conditions ». Et c’est désormais une « course contre-la-montre avant le retour de l’eau » qui s’engage pour les scientifiques, commente Denis Fillon, délégué à la direction de l’Inrap dans les Pays-de-la-Loire et responsable scientifique des sites. Le chantier prendra fin en octobre avec l’arrivée des crues.
Des pêcheries du XIIème siècle
En amont, sur l’île Poulas, ce sont trois pêcheries fixes du XIIème siècle, faites de pierres et de pieux en bois, qui ont été découvertes. Disposées en « W », elles servaient à capturer les poissons qui remontent le courant (saumons) comme ceux qui le redescendent (anguilles). Appartenant aux seigneurs et ecclésiastiques locaux, elles permettaient de respecter les quelque 150 « jours maigres » par an imposés par l’Église à l’époque. Des traces d’accueil de moulins-bateaux ont également été mises au jour, signe de la densité des activités fluviales.
Ces chantiers archéologiques mobilisant 33 scientifiques, au budget de 1,6 million d’euros, interviennent dans le cadre d’un vaste programme de rééquilibrage du lit de la Loire conduit par Voies navigables de France (VNF), entre Les Ponts-de-Cé et Nantes. Les travaux devraient démarrer l’année prochaine.