Canicule à Paris : A cause de l'« effet de retard » du béton, la ville ne refroidit pas
LAISSE BETON•Le béton et le bitume, en particulier, risquent de chauffer et de réchauffer encore plus l’air en ce début de semaine avec les 40 degrés annoncés à ParisMathilde Desgranges
L'essentiel
- La France est touchée par une vague caniculaire dont le pic est atteint ce lundi et mardi.
- La température du béton, qui emmagasine de la chaleur pendant la journée, va augmenter aussi.
- Utiliser d’autres matériaux ou de la peinture claire permet de limiter l’augmentation de la température des sols.
Même si les grosses chaleurs du début de semaine vous assomment, abstenez-vous de vous asseoir à même le sol. La température y est probablement encore plus élevée. Ce lundi et mardi, le pic de l'épisode caniculaire est atteint à Paris et en Ile-de-France avec des températures pouvant dépasser les 40 degrés. Les revêtements au sol, qui accumulent de la chaleur tout au long de la journée, risquent de chauffer. « Le bitume ou encore le béton réfléchissent peu la lumière, et de la chaleur potentielle s’emmagasine dans ces matériaux », explique Erwan Cordeau, chargé d’études sur le climat, l’air et l’énergie à l'Institut Paris Région.
Un phénomène difficile à quantifier. « La température du béton varie en fonction de son poids, de sa porosité, ainsi que de son albédo, un facteur qui change selon la couleur, détaille-t-il. Si sa couleur est foncée et sa masse importante, le matériau emmagasine davantage de chaleur. »
Le béton réchauffe les villes la nuit
La chaleur contenue dans les revêtements du sol n’est restituée dans l’air que 6 à 10 heures plus tard, pendant la fin de la journée puis la nuit. Cet « effet de retard » complique le refroidissement des villes et aggrave les vagues de grosses chaleurs. « Au contraire de la campagne qui se refroidit facilement la nuit, la chaleur se disperse difficilement en ville à cause de ce que dégagent les matériaux », précise Erwan Cordeau.
Le risque de surmortalité lors d’une vague de grosse chaleur est notamment évalué à partir des indicateurs de chaleur nocturne. Dans la capitale, la situation est considérée comme dangereuse à partir de trois nuits consécutives sans que la température ne descende sous les 20°. « Notre corps a besoin de retomber en température la nuit, rappelle l’expert. S’il fait chaud jour et nuit, cela peut poser problème. »
Rafraîchir les sols
Peinture blanche, moins de béton… Faire baisser la température, « c’est un jeu subtil, affirme le chargé d’études. On joue sur la couleur, on utilise des matériaux plus ou moins naturels ». Dans cette perspective, la mairie de Paris expérimente son projet Cool & Low Noise destiné à réduire les émissions de chaleur et de bruit. Elle se laisse jusqu’à 2027 pour étudier les propriétés de nouveaux revêtements routiers sur cinq rues pilotes, à Paris.
Les villes de la petite couronne ne manquent pas non plus d’imagination. « Les cours d’écoles oasis, vouées à végétaliser les sols, essaiment dans les villes », explicite-t-il. A Aubervilliers, l’ancien parking d’un foyer de jeunes travailleurs a été transformé en un revêtement poreux capable de laisser la végétation s’épanouir. Pour Erwan Cordeau, « on peut tout à fait végétaliser tout en répondant aux contraintes de la circulation, en étudiant bien les possibilités des sols. »