Lot-et-Garonne : Quatre ans avec sursis pour le chauffeur de camion qui avait mortellement fauché un « gilet jaune »
JUSTICE•Le chauffeur de camion, bloqué par des voitures lors d’une manifestation de « gilets jaunes » dans le Lot-et-Garonne, s’était déporté sur la gauche et avait percuté un homme de 60 ans qui avait trébuché20 Minutes avec AFP
Un conducteur de camion de 65 ans, poursuivi pour homicide involontaire après avoir renversé et tué au volant de son poids-lourd un « gilet jaune » au Passage d’Agen (Lot-et-Garonne), lors des débuts du mouvement en décembre 2018, a été condamné vendredi à Agen à quatre ans de prison avec sursis.
Le tribunal correctionnel d’Agen a également condamné le camionneur à l’annulation de son permis de conduire. Cinq ans de prison dont quatre avec sursis avaient été requis.
Des « gilets jaunes » se sont interposés, lui ont fait signe de s’arrêter
Le 20 décembre 2018, des « gilets jaunes » bloquaient en partie la circulation à proximité d’un rond-point où ils se retrouvaient depuis plus d’un mois. Ils avaient obtenu du renfort de « gilets jaunes » venus de Villeneuve-sur-Lot d’où était originaire la victime, âgée de 60 ans, car les forces de l’ordre devaient les déloger.
Le chauffeur, bloqué par des voitures, voyant une voie libre, s’était déporté sur la gauche. Il a indiqué à l’audience, tenue ce vendredi, qu’il ne conduisait pas vite mais « par à-coups à cause de la boîte de vitesses automatique ». Des « gilets jaunes » se sont interposés, lui ont fait signe de s’arrêter. Lui-même leur a fait signe de s’écarter, a-t-il raconté, deux l’ont fait mais le troisième a trébuché sans que le chauffeur ne le voie.
« Un regret que j’aurai à vie » exprime le chauffeur
A la barre, le prévenu, également poursuivi pour mise en danger de la vie d’autrui, a assuré qu’il ne s’en « remettrait jamais. Je regrette d’avoir endeuillé une famille sans l’avoir voulu. C’est un regret que j’aurai à vie. Je ne sais pas comment m’excuser auprès de la famille. Je n’ai pas vu la personne, du tout (…) J’ai paniqué ».
Selon ses avocats, le prévenu n’avait aucun casier judiciaire, 40 ans d’expérience et 12 points sur son permis de conduire avant le drame. « C’est un accident qui aurait pu arriver à tout le monde », a indiqué Me Virginie Belacel après la décision, « c’est un homme qui est condamné par la justice mais qui est à vie condamné moralement. Depuis les faits, c’est un homme dévasté qui ne se relèvera jamais de ce qui s’est passé ».
« Difficile de se dire que c’est un accident »
Selon le procureur, « le drame qui s’est joué ce jour-là, c’est d’abord le drame d’une mauvaise décision. Il aurait pu passer par une autre route. Il y a aussi une mauvaise action, il a franchi une ligne continue. Il y avait trois personnes devant lui, deux se sont jetées en arrière mais la victime a trébuché ».
Avocate d’une partie civile, Me Sophie Lagarde a évoqué la victime, « proche de sa famille et de ses amis », « c’était quelqu’un qui n’avait pas beaucoup d’argent mais qui était extrêmement généreux, qui était de tous les combats qui lui paraissaient justes ».
Me Anne-Claire Bonner-Brissaud, avocate des enfants de la victime, s’est affirmée « pas certaine que la famille a eu toutes les réponses aujourd’hui. C’est difficile de se dire que c’est un accident quand on parle de la disparition de quelqu’un dans ces circonstances ».