DESERT MEDICALA Marseille, cités recherchent médecins désespérément

Marseille : « Comment on va faire, nous ? » Cités recherchent médecins désespérément

DESERT MEDICALMalgré la mobilisation des habitants, le centre de santé situé dans la cité Jean-Jaurès va fermer ses portes, mettant en lumière un inégal accès au soin
Alexandre Vella

Alexandre Vella

L'essentiel

  • Un centre médical va fermer ses portes dans la cité Jean-Jaurès à Marseille, laissant plusieurs milliers d’habitants sans offre de soins à proximité.
  • Le problème est récurrent et s’aggrave dans la ville.
  • Les habitants se mobilisent pour tenter de se faire entendre. Des réunions avec les autorités ont eu lieu.

Vendredi, les portes du centre de santé situé avenue des Arnavaux, dans le 14e arrondissement de Marseille, fermeront une dernière fois. L’un des deux médecins généralistes qui y officient prend sa retraite. Et sa collègue a décidé de partir s’installer un peu plus loin, à Sainte-Marthe, ne pouvant pas supporter seules les charges du centre, ses deux secrétaires et ses trois cabinets.

Chaque médecin de ce cabinet médical reçoit habituellement une soixantaine de patients par jour et couvre une zone où vivent plusieurs milliers d’habitants, répartis dans trois cités des quartiers Nord : Jean-Jaurès, Massalia et Campagne-Larousse. Vendredi, une centaine de personnes ont manifesté devant pour interpeller publiquement les autorités. « Comment on va faire, nous ? », s’interroge Daouiya Hassani, mère de trois enfants, une des habitantes à l’origine de la mobilisation. « Déjà, là où on habite [à Jean-Jaurès], il n’y a rien, regrette-t-elle. Il n’y avait que deux choses : le centre médical et la pharmacie, et elle aussi va fermer sans médecins. Nous, on est jeunes, ça va, mais les personnes âgées, comment vont-elles faire ? Et les enfants à 40°C de fièvre le soir ? On va aller aux urgences ? »

« Aujourd’hui c’est Jean-Jaurès, hier le Merlan, demain la Busserine »

Avant cette manifestation, deux réunions ont eu lieu avec les habitants, des représentants de l’agence régionale de santé, de la métropole et du préfet au plan Marseille, Laurent Carrié, et Yazid Attallah, médecin et président de l’association Sept (Santé et environnement pour tous). Sans toutefois permettre d’avancer dans l’immédiat.

La problématique de désertification médicale dans les quartiers pauvres du nord de la ville n’est pas nouveau, et le phénomène continue de s’aggraver. « Aujourd’hui c’est Jean-Jaurès, hier le Merlan, demain la Busserine ; il y a toujours un sujet, soupire Yazid Attallah. Cela fait un an et demi que je cherche un médecin pour la Castellane, et on n’a pas trouvé. Un médecin ne viendra pas seul. Il va se demander s’il y a un kiné, un cabinet infirmier… Il faut aussi une structure qui porte un projet de santé et puisse régler les problèmes annexes, de CMU, de carte Vitale. » Et de prendre en exemple quelques réussites, comme les quartiers de Malpassé (13e) ou Consolat (15e).

Un besoin de « financements importants »

L’idéal serait de pouvoir salarier des médecins au sein d’associations qui porteraient le projet, comme Yazid Attallah est en passe de le faire au Carrefour Merlan (14e), où il va créer une maison pluridisciplinaire. « Mais cela demande des financements importants », appuie le médecin.

Il y a aussi une question d’attractivité de ces territoires, car les praticiens sont libres de choisir où ils s’installent. Les réseaux de vente de stupéfiants peuvent notamment susciter la peur. « Je ne comprends pas : la sécurité pour les médecins, elle y est, même s’il se passe des choses et que c’est vrai qu’il y a eu des meurtres, résume une habitante. Mais, à l’intérieur du centre, on ne risque rien. »