L’association L214 dévoile l’horreur d’un abattoir de truies d’Intermarché en Bretagne
MALTRAITANCE ANIMALE•A Briec, dans le Finistère, des images de truies maltraitées ont été tournées dans un site surveillé par les autorités sanitairesCamille Allain
L'essentiel
- L’association L214 a diffusé des images d’horreur d’un abattoir de truies situé dans le Finistère.
- Propriété du groupe Les Mousquetaires, l’établissement avait déjà été averti par les autorités sanitaires de ses manquements aux règles.
- Des images d’animaux blessés mais aussi les maltraitances subies par des truies mal orientées ont été révélées. L’association a porté plainte. La société a décidé de suspendre la ligne de production.
EDIT: Suite à la diffusion de la vidéo tournée par L214, le parquet de Quimper a ouvert une enquête. La préfecture du Finistère a par ailleurs indiqué que l’abattoir ne rouvrira « que quand toute la lumière sera faite sur ses pratiques ».
Les images montrent ce que l’on ne voit jamais. Un intérieur d’abattoir vieillissant où des milliers de truies sont entassées chaque semaine pour y être tuées puis découpées. Les vidéos tournées par l’association L214 ne sont jamais agréables à regarder. Celles réalisées en février dans les murs de la Société briécoise d’abattage (SBA), dans le Finistère, ne font pas exception.
Dans cette unité propriété du groupe Intermarché, on abat des truies « de réforme ». Appelées « coches », ces femelles souvent âgées de trois ou quatre ans sont « en fin de carrière » après une vie passée sur un caillebotis à donner naissance à des porcelets, dont elles seront rapidement privées. Sans voir la lumière du jour, ou presque. Leur dernier voyage n’est pas plus agréable. Sur les images tournées par L214, on voit des animaux blessés mais surtout paniqués, qui cherchent à s’enfuir. Sans solution, les salariés usent d’aiguillons électriques, parfois dans les yeux ou l’anus, pour les faire avancer dans un tunnel mal fichu. L’horreur atteint son apogée dans un box d’immobilisation sous dimensionné où les ouvriers utilisent une pince électrique pour maîtriser les truies les plus véhémentes. Une pratique douloureuse et interdite.
Un site déjà averti en 2016
Ce mardi, l’association a porté plainte contre le groupe Agromousquetaires pour « sévices graves ». Elle a aussi déposé un recours en responsabilité contre l’État, qu’elle accuse de manquements. Car l’établissement de Briec avait déjà été épinglé en 2016, après une vague d’audits demandés par le ministre de l’Agriculture de l’époque, Stéphane Le Foll. Des non-conformités avaient été révélées lors de l’immobilisation et lors du cheminement vers ce que les autorités appellent « le piège ». « Il n’y a rien eu de fait depuis et ces images le prouvent, estime Sébastien Arsac, l’un des porte-parole de L214. Il y a de vrais problèmes de structure et ils ne sont pas réglés. Les employés font ce qu’ils peuvent et on ne veut pas les accabler. Mais ces images nous ont choqués, elles montrent que la réglementation, qui est déjà minimale, n’est pas respectée. Il y a de la souffrance. »
La société suspend la ligne de production
L’utilisation d’un aiguillon électrique est par exemple interdite dans tout établissement labellisé bio ou Label rouge. «Les images sont choquantes et la direction de la Société briécoise d'abattage comprend l’émotion qu’elles peuvent susciter auprès du public. Dès prise de connaissance de ces images aujourd’hui, la direction de la Société Briécoise d'Abattage a décidé, par mesure conservatoire, de suspendre provisoirement la ligne de production concernée», a réagi le groupe dans un communiqué.
L’association L214 espère « une fermeture administrative immédiate » de l’abattoir, le temps de mener un audit précis au sein de l’établissement. La société évoque de son côté «des audits et enquêtes internes qui ont été immédiatement diligentés, en lien avec les autorités sanitaires». Dans cet abattoir, qui voit passer 2.300 truies par semaine, le groupe agroalimentaire prépare certaines pièces de charcuterie utilisées dans des pâtés, des rillettes ou des saucissons. Des pièces pas vraiment nobles qui sont ensuite utilisées pour la conception des produits des marques Intermarché mais aussi de clients bien connus comme Aoste, Hénaff ou encore Bordeaux Chesnel. « Sur son site, l’abattoir veut montrer qu’il a de bonnes pratiques et prend en compte le bien-être animal mais la réalité est toute autre. Ce que l’on veut, c’est dénoncer ces pratiques routinières. On a plus de cinq heures d’images où l’on voit les infractions. On ne comprendrait pas qu’il ne ferme pas », poursuit le militant de L214.
« Pourquoi ils ne font rien ? Ils en ont pourtant les moyens »
Poids lourd de l’abattage en Bretagne, le groupe Intermarché dispose de trois établissements. C’est la première fois que l’enseigne de grande distribution est épinglée par l’association de défense du bien-être animal. « Ce qu’on ne comprend pas, c’est pourquoi ils ne font rien. Ils en ont pourtant les moyens. Ce n’est pas un petit abattoir de la commune », critique l’association.
Depuis plusieurs mois, l’association a révélé plusieurs cas de maltraitances animales, notamment dans des élevages de poules en Vendée et dans les Côtes d’Armor. Mais aussi dans un élevage de canards utilisés par la filière du foie gras, situé à Lichos, dans les Pyrénées-Atlantiques. Des enquêtes administratives ont été ouvertes pour faire la lumière sur les conditions de vie des animaux.