MEURTREComment les gendarmes ont poussé le mari de Magali Blandin à avouer

Ille-et-Vilaine : Des moyens exceptionnels et une faute… Comment le mari de Magali Blandin a fini par avouer le meurtre

MEURTREJérôme Gaillard avait fourni plusieurs alibis au début de l’enquête sur la disparition de sa femme, avant de craquer en garde à vue
Camille Allain

Camille Allain

L'essentiel

  • Le corps sans vie de Magali Blandin a été découvert samedi à Boisgervilly, plus d’un mois après qu’elle a été tuée.
  • Son mari, dont elle était séparée depuis septembre, a fini par avouer l’avoir frappée avec une batte de base-ball après 29 heures de garde à vue.
  • L’importante mobilisation des gendarmes et l’alerte lancée par le mari se plaignant d’une extorsion ont fait accélérer cette enquête complexe.

La première fois que l’on a abordé la disparition de Magali Blandin avec le colonel Sébastien Jaudon, c’était quelques jours seulement après l’annonce de sa disparition. Le parquet venait de lancer un appel à témoins et jugeait la disparition « très inquiétante ». Le jour même, le patron des gendarmes d’Ille-et-Vilaine envoyait plus de 150 hommes autour du domicile de Montfort-sur-Meu pour tenter de retrouver cette mère de famille sans histoire. Cette dernière ne s’était pas présentée au travail le 12 février et n’était pas présente pour récupérer ses enfants après l’école. A ce moment de l’enquête, seul Jérôme Gaillard, et peut-être ses parents et son voisin, poursuivis pour complicité dans cette affaire décrite comme « hors-norme », savaient que Magali Blandin était décédée. Ne privilégiant « aucune piste », les forces de l’ordre avaient déployé des moyens colossaux pour tenter de retrouver la trace de la mère de famille.

Pendant des semaines, des centaines de gendarmes ont arpenté les abords du domicile de la quadragénaire, multipliant les enquêtes de voisinage en quête d’indices, sondant les cours d’eau. Des plongeurs, la brigade nautique, des chiens pisteurs, des hélicoptères, des membres de l’armée et de nombreux habitants de Montfort-sur-Meu ont cherché la trace de Magali Blandin, avec l’espoir de la retrouver vivante. Dans le même temps, une quinzaine d’enquêteurs de la brigade de Montfort et de la section de recherche de Rennes planchaient sur le volet judiciaire de l’affaire. Les ordinateurs ont été disséqués, les appels téléphoniques épluchés. « C’est une affaire dramatique qui a demandé des moyens exceptionnels de recherches et d’investigations », rappelle le colonel Jaudon.

Dans un premier temps, les investigations n’avaient révélé « aucun élément associant le mari à cette disparition ou laissant à penser à sa présence à Montfort-sur-Meu au moment des faits ». Mais dès le début du mois de mars, les enquêteurs ont flairé la piste criminelle. Cette dernière s’est confirmée quand Jérôme Gaillard s’est présenté au juge en présence de son avocat pour évoquer une tentative d’extorsion dont il était victime. Un fait avéré, puisque plusieurs individus de nationalité géorgienne ont tenté de lui arracher 15.000 euros contre leur silence et la destruction d’un enregistrement audio qui l’incriminait. Cette « piste géorgienne » a sérieusement complexifié l’enquête. Mais elle l’a aussi grandement fait avancer. En surveillant la communauté géorgienne, les gendarmes ont détecté la présence régulière d’un suspect aux abords du logement de Magali Blandin. Mis en examen pour tentative de meurtre en bande organisée, cet homme aurait perçu 20.000 euros de la part de Jérôme Gaillard pour tuer sa femme.

Quand la piste géorgienne fait avancer l’enquête

Ce que le mari n’imaginait sans doute pas, c’est que cette dénonciation allait mettre les enquêteurs sur sa piste. Une « faute » qui a grandement contribué à la découverte du scénario de complot criminel familial. « Cela a été un accélérateur. Sans cela, il nous aurait sans doute fallu plusieurs semaines ou plusieurs mois pour élucider ce meurtre prémédité », a reconnu le procureur Philippe Astruc.

Placé en garde à vue dès jeudi, Jérôme Gaillard aura mis 29 heures avant de craquer face aux enquêteurs, comme l’a fait savoir son avocat Me Le Mintier. Démasqué, il a alors tout expliqué : comment il avait contacté des Géorgiens en novembre grâce à son voisin, également mis en examen. Puis comment il s’était caché devant l’appartement de Magali Blandin, après avoir déposé leurs enfants à l’école, guettant la sortie de sa victime. Puis comment il l’a frappée à deux reprises avec une batte, avant de rentrer le corps et de revenir à la nuit tombée pour effacer toutes les traces, laissant les gendarmes sans indices.

« Il n’y a qu’un seul coupable dans ce dossier »

Dans la nuit de vendredi à samedi, il a finalement indiqué où se trouvait le corps de la mère de ses quatre enfants. Le suspect l’avait enterrée à deux kilomètres de chez lui, sous une couche de chaux vive, censée accélérer la décomposition du corps. « Il n’y a qu’un seul coupable dans ce dossier », a fait savoir son avocat. Ses parents, âgés de 72 et 75 ans, son voisin, un Géorgien de 29 ans, et trois autres personnes de nationalité géorgienne sont également poursuivis dans ce dossier. L’enquête est loin d’être terminée.