Coronavirus à l’université : Des lacunes, mais pas de décrochage massif au premier semestre
ENSEIGNEMENT SUPERIEUR•Les profs craignaient des notes en chute libre en raison de l’isolement des étudiants, ça n’a pas tout à fait été le casG. N. avec AFP
Les étudiants, qui ont eu majoritairement cours à distance au premier semestre, ont-ils raté leurs examens, comme beaucoup le redoutaient ? S’il y a bien eu par endroits des « catastrophes », les dégâts semblent pour l’heure limités, selon les premiers résultats des partiels. La ministre de l’Enseignement supérieur Frédérique Vidal s’en félicite : « aux examens du premier semestre, il y a eu seulement 3 % d’absences en plus par rapport à l’année dernière ». « Vous avez tenu et vous n’avez pas décroché massivement », a-t-elle lancé mardi à des étudiants, lors d’un déplacement à Poitiers.
S’ils sont bien venus passer leurs partiels – un impératif pour ceux qui veulent conserver une bourse – les ont-ils pour autant réussis ? De nombreux profs redoutaient un désastre, après plus de deux mois de cours en « distanciel » et une avalanche de témoignages d’étudiants racontant leurs difficultés à les suivre derrière un écran.
« Les résultats sont assez mauvais, voire catastrophiques »
Dans certaines facs, le crash s’est bien produit. « Les résultats sont assez mauvais, voire catastrophiques », rapporte Nelly Ferreira, doyenne de la faculté de droit de Cergy Paris université. « On a plus de notes en dessous de la moyenne que les années précédentes et le groupe habituel, qui a généralement entre 7 et 10/20, a, cette année, récolté des notes bien inférieures ; ceux-là n’ont pas du tout acquis les notions de base. » Elle craint désormais que ces mauvais résultats aient un « effet décourageant » au second semestre.
« On aborde ce deuxième semestre dans l’incertitude », confirme Rachid El Guerjouma, président de l’université du Mans. Selon les premiers résultats des partiels, les taux de réussite ne seront « pas calamiteux » mais « plus faibles que les années précédentes ». « On sent que les connaissances sont là, mais que les questions de méthode ne sont pas bien acquises », poursuit-il. Les plus pénalisés seraient selon lui les premières années, qui n’ont pas vraiment pu finir le lycée l’an dernier ni commencer l’université cette année.
« Le mental en a souvent pris un coup »
Mais dans de nombreux endroits, les résultats semblent « stables ». Comme au collège de sciences et technologie de l’université de Bordeaux, où les taux de réussite en première année sont, à un point près, les mêmes que l’an dernier. « On se demandait vraiment ce qui allait se passer pour les primo-arrivants à l’université », confie Ghislaine Godinaud, la directrice du département licence. « Au final, on en a certes perdu quelques-uns, mais pas plus que les années précédentes ».
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A l’université de Strasbourg aussi, les premiers retours révèlent des résultats « plutôt stables ». Nouveauté cette année, il y a eu du décrochage dans tous les niveaux, pas seulement en première année, comme c’est généralement le cas. Preuve, selon Michel Deneken, le président de l’université, que le « téléenseignement, l’éloignement de la fac, le stress » ont affecté un très grand nombre d’étudiants : « le mental en a souvent pris un coup, quand ce ne sont pas les capacités de travail ou d’assimilation ».
Moins de vie sociale, plus de travail
C’est également le message que tient à faire passer Nadia Dupont, vice-présidente de l’offre de formation de l’université de Rennes 2. Les résultats des partiels s’y révèlent soit équivalents à l’an dernier soit, étonnamment, légèrement au-dessus. Une bonne surprise qu’elle explique en formulant plusieurs hypothèses : « les étudiants étaient peut-être tellement stressés qu’ils ont "surinvesti" leurs examens ; l’absence de vie sociale les a sans doute aussi conduits à travailler davantage ».
Mais « attention, ces résultats ne doivent pas masquer les difficultés qu’ils continuent de rencontrer », fait-elle valoir. « Les trop rares occasions qu’ils ont de sociabiliser, le manque de lien avec les professeurs qui perdure malgré le retour à la fac un jour par semaine, auront peut-être des conséquences qui ne se seront visibles que dans quelque temps », prévient-elle.