PANDEMIEUn confinement local pour lutter contre le Covid-19, ça marche ?

Coronavirus : Un confinement local pour lutter contre la flambée des contaminations, ça marche ?

PANDEMIEAlors que Nice pourrait bientôt connaître un confinement local les week-ends, « 20 Minutes » a cherché à savoir si des mesures de restriction locales fonctionnaient pour limiter la circulation du virus
Rachel Garrat-Valcarcel

Rachel Garrat-Valcarcel

L'essentiel

  • Un reconfinement local les week-ends pourrait être mis en place dans la Métropole de Nice.
  • Si de telles mesures locales sont « pertinentes et justifiées », Michaël Rochoy, médecin interrogé par 20 Minutes, estime que cela ne peut être qu’un pis-aller.
  • D’autres mesures sanitaires sont à prendre outre la question du confinement, quelles que soient ses modalités.

Vers un confinement d’un nouveau type ? Le premier confinement de l’année 2021 pourrait être local (cantonné aux seules villes du littoral des Alpes-Maritimes) et limité dans le temps (les deux prochains week-ends). Alors que le gouvernement avait jusque-là refusé d’accéder aux demandes des élus de la Moselle et du Nord, surtout du côté de Dunkerque, aux prises avec une flambée des variants, notamment anglais, la mesure pourrait être officialisée ce lundi sur recommandation de la préfecture et des élus des Alpes-Maritimes. Une première en métropole.

Il faut dire que la situation de l’extrême sud-est de la France est critique : le taux d’incidence dépasse les 740 contaminations pour 100.000 habitants et habitantes à Nice, soit trois fois plus que la moyenne nationale, déjà haute. Ce samedi, en déplacement à Nice, le ministre de la Santé Olivier Véran a donc demandé aux élus et élues locales ainsi qu’aux services de l’Etat de se mettre autour de la table pour trouver un plan pour de nouvelles restrictions, à mettre en place dès cette semaine.

Des mesures locales, ça marche ?

Dès samedi soir, c’est l’option d’un reconfinement local les week-ends qui tenait la corde. Sur le papier, c’est une solution qui peut être « justifiée et pertinente » selon le médecin Michaël Rochoy, membre du collectif « Du côté de la science » : « Ce type de confinement peut même être très local. Dans un département, voire dans un canton ou une commune. Ensuite, on peut se baser sur des tests salivaires à l’aveugle dans certains secteurs pour ajuster les mesures », explique-t-il. « L’efficacité serait comparable à nos confinements nationaux », disait de son côté il y a quelques jours Mircea Sofonea, maître de conférences en épidémiologie à l’Université de Montpellier, dans Le Parisien.

Si une telle mesure n’a encore jamais été mise en place en France hexagonale (il y a eu quelques cas dans les outre-mer), ça a été le cas ailleurs dans le monde : sans parler des cas extrêmes en Chine, la Bavière, en Allemagne, a usé de ce type de mesures avec succès. Comme d’habitude, tout dépend de l’ampleur des mesures : un confinement le week-end sera forcément moins efficace qu’un confinement plus strict et plus général. La question du timing est également cruciale : « Le taux d’incidence est déjà très élevé dans les Alpes-Maritimes. Les urgences sont déjà quasi saturées or on sait que le confinement a un effet retard », souligne Marie-Aline Bloch, professeur à l’Ecole des hautes études en santé publique, qui se demande « si ce n’est pas déjà trop tard ».

Un risque de déplacer le problème

Autre interrogation : ces mesures locales ne déplacent-elles pas le problème ? D’une certaine manière : oui. Dans le temps d’abord : Nice et les Alpes-Maritimes sont des zones touristiques et son aéroport est le second aéroport français après Roissy-Charles-de-Gaulle à Paris. « Si la pression épidémique baisse effectivement dans les Alpes-Maritimes, le secteur peut redevenir encore plus attractif pour les touristes », note le Dr Michaël Rochoy.

Géographiquement, il faut aussi s’assurer qu’il n’y a pas trop d’échanges interdépartementaux. Or, nous sommes en période de vacances scolaires et il va y avoir encore des déplacements entre zones géographiques. Du coup, ce confinement local pourrait peut-être rater sa cible : « C’est peut-être traiter problème de manière trop partielle », juge Marie-Aline Bloch.

Il y a d’autres mesures à prendre

Pour être plus efficace, les deux spécialistes interrogés ne voient pas d’autre solution qu’un reconfinement national. « Le problème c’est qu’on n’est plus dans la même optique qu’il y a un an, note la spécialiste de santé publique. Les gens commencent à en avoir assez. C’est pour ça qu’on a évité des mesures plus dures ces derniers temps. Mais on voit que ça a ses limites. »

Local ou national, façon printemps ou façon automne, avoir recours à un confinement révèle toujours un « échec des mesures de prévention » et des « brèches », dans la stratégie sanitaire actuelle, estime toutegois Michaël Rochoy. « Le gouvernement organise tous les jours des situations où des personnes sans masques se retrouvent groupées dans des lieux clos », décrit le médecin, pointant du doigt les cantines scolaires ou d’entreprise.

Pour le médecin généraliste, il faut en revenir à la base : le port du masque. Mais aussi le dépistage, « surtout si on revient d’une zone où le virus circule beaucoup », dit Marie-Aline Bloch. « C’est un geste civique. » Indispensable pour descendre du « haut plateau » de contamination sur lequel la France est toujours nichée depuis le début de l’année.