Bordeaux : 63 % des 5.000 étudiants interrogés demandent la validation automatique du premier semestre
ETUDIANTS•Les deux tiers des étudiants interrogés affirment rencontrer des difficultés lors de cette année universitaire en raison de la crise sanitaireClément Carpentier
L'essentiel
- Des associations et organisations étudiantes ont réalisé une grande enquête sur la précarité des conditions de vie et d’études à l’université Bordeaux-Montaigne fin janvier.
- Les deux tiers des étudiants expliquent rencontrer des difficultés, un étudiant sur deux a envisagé d’arrêter son cursus notamment.
- Une majorité se dit par ailleurs favorable à la validation automatique du premier semestre.
«On a voulu mettre des chiffres sur cette précarité que beaucoup d’entre nous vivent au quotidien », voilà comment Petra Bernus, membre de l’association étudiante, Onzième Thèse présente cette enquête inédite. Celle-ci porte sur les conditions de vie et d’études et a été réalisée lors de la deuxième quinzaine de janvier par de nombreuses associations et organisations de l’université Bordeaux-Montaigne. Elle a aussi été soutenue par la direction car « elle a été faite avec beaucoup de sérieux et de méthode pour au final des résultats significatifs », se félicite Lionel Larré, son président.
Ce questionnaire a été envoyé par mail aux 18.000 étudiants du campus. Près de 5.000 y ont répondu, c’est-à-dire 25 % des effectifs. « Après les gestes dramatiques que nous avons vécus [suicides et tentatives de suicide], on souhaitait montrer à quel point les étudiants sont aujourd’hui en grande difficulté avec une situation qui s’est considérablement aggravée et l’absence de perspectives en raison de la crise sanitaire. Ce n’est pas qu’un ressenti, c’est une réalité ! », explique Jahan, étudiant élu au conseil d’administration. Et en effet, les résultats sont sans appel.
Un étudiant sur deux a envisagé abandonner son cursus
Premier enseignement, les étudiants en licence qui se sont fortement mobilisés sur cette enquête. Plus on est jeune, plus on est inquiet. Les deux tiers d’entre eux (66 %) affirment avoir rencontré des difficultés qui ont perturbé leur travail ces derniers mois et ne pas avoir eu d’espace dédié dans lequel ils pouvaient s’isoler pour se concentrer sur leurs études. 60 % ont dû faire avec des problèmes techniques : réseau (81 %), dysfonctionnements récurrents des outils en ligne (54 %), pas d’accessoires informatiques (20 %) ou d’ordinateur (8 %) pour suivre sa scolarité à distance dans de bonnes conditions.
Résultat, un étudiant sur deux a envisagé lors de son premier semestre d’abandonner son cursus et d’arrêter donc son année. Pire, 73 % expliquent avoir interrompu leur année pendant plusieurs jours en raison d’un manque de moral ou d’un découragement. En moyenne, pendant deux semaines. Si la plupart restent motivés, déterminés et maintiennent le cap malgré les difficultés (77 %), une part non négligeable (15 %) se dit totalement démotivée et surtout 7 % avouent être au bord du burn-out. Sur cette enquête, cela représente tout de même 351 étudiants.
1 % des étudiants déclarent être SDF aujourd’hui
Mais là où la précarité se fait encore plus sentir, ce sont sur les conditions de vie. 43 % des étudiants sont rentrés chez un proche au moment de la fermeture de leur université pour faire face aux difficultés que cela a entraîné ou pour ne pas se retrouver seul tout simplement. Au niveau alimentaire, près de 10 % affirment avoir des difficultés pour se nourrir correctement. Le chiffre monte à 12 % pour payer son loyer. Et 1 % d’entre eux expliquent carrément être SDF aujourd’hui.
« Ce sont des sources extérieures qui provoquent une énorme angoisse et de l’anxiété chez ces personnes. On peut voir des gens en détresse », insiste Petra Bernus. « Il faut vraiment que le gouvernement se rende compte de la situation, il faut arrêter avec la politique de l’accompagnement et les mesurettes type repas à un euro, lance Jahan, c’est très insuffisant pour lutter contre cette précarité. Il faut une rupture et des investissements massifs ».
63 % aimeraient une validation automatique du premier semestre
Enfin, l’enquête s’est aussi penchée sur l’avenir à court terme de cette année universitaire. 63 % des étudiants se disent d’accord avec l’idée de demander la validation automatique du premier semestre auprès des jurys. Une requête urgente des organisations et associations d’étudiants de l’université de Bordeaux-Montaigne. Les participants à cette enquête émettent aussi d’autres souhaits : l’abaissement du seuil de validation du semestre à 8 au lieu de 10, la mise en place de remises à niveau par le biais de tuteurs ou de stages, ne pas mettre au programme des œuvres sur le suicide par exemple ou encore renforcer le soutien psychologique.
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Etant donné le travail réalisé par ces étudiants, la direction pourrait prochainement faire suivre celui-ci au ministère de l’Enseignement supérieur. De leur côté, les associations et organisations de Bordeaux-Montaigne se retrouveront le 9 mars pour une journée contre la précarité étudiante avec notamment la distribution de repas solidaires.