RECRUTEMENTSComment se faire embaucher sur le « marché invisible de l’emploi » ?

Comment intégrer le « marché invisible de l’emploi », qui représente 41 % des embauches ?

RECRUTEMENTSSur près de sept millions d’embauches l’année dernière, près de 2,9 millions sont passées par le marché invisible
Lucie Bras

Lucie Bras

L'essentiel

  • Candidatures spontanées, CDD qui se transforment en CDI ou cooptation : il existe un marché « invisible » de l’emploi qui ne passe pas par les petites annonces.
  • Selon une étude Randstad SmartData publiée ce mercredi, ce marché a représenté 41 % des recrutements en 2020.
  • Réseau personnel, professionnel ou agences d'intérim... « Il y a plusieurs façons d’intégrer ce marché », explique Patrick Valoni, responsable de produit Randstad SmartData.

C’est la partie cachée du marché de l’emploi. Des recrutements qui ne passent pas par des petites annonces, mais par d’autres biais : une candidature spontanée ou une cooptation. En pleine crise sanitaire, se faire une place sur le « marché invisible » de l’emploi est devenu un passage obligé. Alors comment candidater autrement ? Des spécialistes vous donnent leurs conseils.

« On a souvent coutume de dire que le marché de l’emploi est assez binaire, avec l’offre et la demande. Mais quand on creuse, on voit qu’il y a un marché visible, celui de l’offre d’emploi, mais on sait aussi que des personnes trouvent du travail sans forcément répondre à des offres », explique Patrick Valoni, responsable de produit Randstad SmartData. En 2020, c’est un marché qui a représenté 41 % des nouvelles embauches, et même jusqu’à 49 % dans les Hauts-de-France selon cette même étude. En d’autres termes : sur plus de sept millions de recrutements en 2020, 2.860.000 embauches ont été réalisées en France en 2020 sans publication d’offre d’emploi, selon l’étude publiée ce mercredi par Randstad SmartData.

Une tendance chez les employés, pas chez les cadres

Ces recrutements prennent des formes variées : une candidature spontanée, une cooptation, « pour les postes un peu difficiles à trouver ou qu’on a du mal à attirer », précise Patrick Valoni, une fin de stage ou un CDD qui se transforme en CDI. « Quand on regarde les pratiques d’embauche des entreprises, on s’aperçoit qu’elles ont diversifié leurs canaux de recrutement », analyse Marie-Andrée Joulain, consultante relations entreprises à l’Association pour l’emploi des cadres (Apec). Pour preuve : aujourd’hui, les réseaux sociaux sont même le quatrième canal de recrutement, rappelle-t-elle.

Mais elle préfère ne pas parler de « marché invisible » : « Chez les cadres, le marché invisible n’existe plus vraiment. On observe que 85 % des projets de recrutement de cadres ont fait l’objet d’une diffusion quelque part à un moment donné », nuance-t-elle. Un chiffre corroboré par l’étude Randstad. Les métiers les plus concernés par ces pratiques invisibles sont les postes employés et ouvriers comme les chauffeurs de poids lourds, les agents administratifs, les employés de ménage ou les commis de cuisine, des secteurs très concernés par le recours aux CDD ou le bouche-à-oreille. En la matière, c’est le secteur de l’hôtellerie-restauration qui remporte la palme : « Plus de sept recrutements sur dix (71 %) y sont réalisés sans qu’aucune annonce n’ait été publiée », confirme l’étude.

En parler autour de soi

Si ce marché de l’emploi est « invisible », il n’en est pas moins accessible avec des méthodes simples. « Il y a plusieurs façons de l’intégrer », confirme Patrick Valoni. « Il faut déjà avoir conscience que ce marché existe. » Son premier conseil : « travailler son réseau. Pas forcément son réseau professionnel, mais on peut parler de sa recherche autour de soi : on a tous un cercle familial ou amical, des anciens étudiants ou copains de classe, qui connaissent eux-mêmes d’autres personnes ».

De fil en aiguille, il émerge parfois de ce réseau des informations et des pistes pour proposer sa candidature. « Se renseigner sur les entreprises qui recrutent auprès de son réseau permet aussi d’avoir accès à des jobs avant qu’ils ne soient publiés », ajoute Noëlla Gavier, DRH chez Welcome to the Jungle. « Il faut garder contact avec tout le réseau professionnel que l’on a construit tout au long de sa vie », conseille également Marie-André Joulain, qui incite à « entrer dans des associations ou des ateliers mais surtout ne pas rester seul avec son projet ».

Ne pas négliger les annonces classiques, « plus commodes »

La candidature spontanée est un autre outil du marché invisible, quand elle est envoyée de manière ciblée. Sur LinkedIn, par exemple : « Des candidats me contactent via LinkedIn et je relaie leur candidature dans l’équipe. Ça se fait tout à fait d’approcher des recruteurs ainsi. Ce qui fait la différence, c’est le candidat qui a une approche personnalisée, il a compris ce que fait la société, ses valeurs et qui met en avant ses compétences », explique Noëlla Gavier. Patrick Valoni conseille enfin d’aller rencontrer les agences d’intérim, qui sont un gros pouvoyeurs d’emplois. « Quand la relation avec le candidat est faite, l’entreprise va proposer des postes à des gens qu’elle connaît déjà et qu’elle a pu tester. »

Mais attention à ne pas oublier le marché des petites annonces : « ce sont deux composantes indissociables du marché de l’emploi », affirme Patrick Valoni. « C’est hyper important », abonde Noëlla Gavier. « Du point de vue du recruteur, c’est même plus commode, car tous les CV arrivent au même endroit, ça permet de ne louper personne. » L’offre d’emploi reste incontournable, mais avec la crise sanitaire, des tensions peuvent apparaître sur le marché de l’emploi. « Certaines entreprises ont des difficultés à gérer une trop grande affluence de candidatures sur certaines offres. Ce qui peut les inciter à ne pas communiquer sur ces offres et à passer par d’autres canaux », indique Marie-Andrée Joulain. Des difficultés qui peuvent inciter les chercheurs d’emploi à développer ces nouvelles stratégies. « Il ne faut négliger aucune piste, tirer tous les fils », résume Patrick Valoni.