Couvre-feu à Paris : « A 18h15, la messe est dite… » La police accentue les contrôles des commerces ouverts
REPORTAGE•« 20 Minutes » a suivi une patrouille dans le 11e arrondissement lors d’une opération de contrôles des établissements recevant du publicThibaut Chevillard
L'essentiel
- A Paris, les restaurants peuvent rester ouverts après 18h mais ils ne sont pas autorisés à proposer de la vente à emporter.
- Depuis quelques jours, les policiers accentuent les contrôles et vérifient que seuls des livreurs sont présents dans ces établissements. Ils s’assurent également que les épiceries soient bien fermées après 18h.
- Les contrevenants encourent une amende, mais aussi une fermeture de leur commerce pour une durée de 15 jours.
La gérante du restaurant chinois jette un regard inquiet dans la rue. Tandis qu’elle s’empresse de baisser le rideau métallique, elle observe les policiers contrôler le restaurant d’en face. Le couvre-feu est entré en vigueur il y a déjà une heure. Pourtant, à l’intérieur de cette pizzeria, deux clients s’apprêtaient à passer commande. « Ils n’ont rien à faire là », tonne le commissaire du 11e arrondissement de Paris, Ludovic Giral. Passées 18h, les restaurateurs ne sont pas autorisés à proposer de la vente à emporter afin de ne pas « inciter » les gens à sortir de chez eux, poursuit le fonctionnaire. Seules sont autorisées les livraisons par des professionnels jusqu’à 22h. Cette fois, le pizzaïolo de la rue Saint-Maur s’en sort avec un simple avertissement.
D’autres patrons de restaurant contrôlés en ce mardi soir par les policiers n’ont pas eu autant de chance. « Depuis vendredi, nous avons sensiblement augmenté les contrôles, souligne Ludovic Giral en référence aux récentes annonces du Premier ministre. Aujourd’hui, il n’y a plus aucune tolérance. Dès qu’une infraction est constatée, nous faisons remonter les informations à une direction de la préfecture de police et une décision de fermeture d’une durée de 15 jours peut être prise très rapidement, en moins de 24 heures. » En quelques jours, une petite dizaine d’établissements recevant du public ont été sommés de fermer boutique dans le secteur. « Nous devons faire respecter les règles afin d’avoir une chance d’éviter un reconfinement. »
« On a changé de braquet »
A l’intérieur d’un traiteur italien, sur la même de la rue, deux hommes sont assis à une table, l’un sans masque. Il s’agit de deux commerçants du quartier venus boire un verre de vin en fin de journée. « Ce qui était possible à une époque ne l’est plus », souffle le commissaire. Après avoir demandé aux deux employées de couper la musique, les agents en civil leur réclament tout un tas de documents en vue d’une fermeture administrative. Tandis que l’un des policiers prend des notes sur un petit carnet noir, un homme en trottinette se présente à l’entrée de l’établissement. « C’est ouvert ? Fermé ? » « Oui monsieur, c’est fermé. Il est plus de 18h ! Il faut regarder les infos », répond sèchement une policière.
Quelques mètres plus loin, une épicerie accueille encore des clients. Son gérant aussi sera verbalisé, et son commerce fermé durant deux semaines. « On a changé de braquet », martèle Ludovic Giral. Il faut que le message passe et, parfois, c’est un peu brutal. » Après vérification, le Franprix de la rue, pour sa part, semble respecter les règles. « A 18h, tout le monde doit être chez soi, temps de transport compris. Il y a une petite marge, les policiers doivent faire preuve de bon sens. Mais à 18h15, la messe est dite », souligne le commissaire de cet arrondissement, le plus dense de la capitale avec ses 150.000 habitants. L’un des plus festifs, aussi.
« A cette heure-ci, c’est fermé »
L’opération de contrôle se poursuit rue Oberkampf, une artère connue pour ses nombreux bars et restaurants. Les policiers tentent d’expliquer en anglais à l’employé d’une boutique de téléphones, originaire du Bangladesh, qu’il doit fermer… et pas uniquement pour la soirée. « A cette heure-ci, c’est fermé. Il n’a pas le droit d’ouvrir et vous, vous n’avez pas le droit d’être là », explique un policier à l’un des clients qui se trouvaient à l’intérieur, sans masque. « Il faut le mettre ! » Une autre pizzeria – décidément – est contrôlée. Son gérant est pris en flagrant délit de vente à emporter. Il se défend en affirmant que c’est la première fois. « C’est trop tard », souffle le commissaire, qui semble ne pas y croire. Et le policier de conclure : « Il y a encore du chemin à faire. »