Lettres d'amour d'enfant : « En lisant certaines missives, on se croirait dans "Les Feux de l’amour"…»
INTERVIEW•Dans « Tu n’es pas belle, tu es pire ! », qui sort mercredi *, Morgane Pellennec, a reproduit une centaine de lettres écrites par les enfantsPropos recueillis par Delphine Bancaud
L'essentiel
- Pendant deux ans, Morgane Pellenec, a compilé une centaine de lettres écrites par les enfants.
- Dans son ouvrage, Tu n’es pas belle, tu es pire !, qui sort mercredi*, on passe du rire à l’émotion.
- Ces mots doux témoignent de l’intensité des sentiments qu’éprouvent certains enfants et des souvenirs mémorables que laissent les premières amours.
Des petits trésors que l’on garde précieusement au fond d’un tiroir. Dans Tu n’es pas belle, tu es pire !, qui sort ce mercredi *, Morgane Pellennec a reproduit une centaine de lettres d ’amour écrites par les enfants, le plus souvent âgés de 5 à 11 ans. Deux ans lui ont été nécessaires pour parvenir à collectionner ces bijoux de poésie, d’humour, de naïveté…
Pour 20 Minutes, l’autrice analyse ces mots doux et leur résonance à travers le temps.
Avez-vous reçu des lettres d’amour pendant votre enfance et en avez-vous écrites ?
Oui, et c’est d’ailleurs en retrouvant la lettre de mon premier amour de colonies de vacances, Simon, que j’ai eu envie de faire ce livre. Car sa lettre était drôle, touchante et un peu absurde. J’ai alors lancé un appel sur Facebook et sur Twitter pour que des gens m’envoient leurs lettres d’enfance.
Beaucoup de personnes entre 30 et 40 ans l’ont fait. Mais des parents m’ont aussi transmis des lettres rédigées ou reçues par leurs enfants. Car aujourd’hui, les enfants s’écrivent encore. Ils envoient des cartes postales à leur amoureux (se) ou se remettent en mains propres des petits mots à la récréation.
Comment expliquez-vous leur besoin de coucher sur le papier leurs sentiments ?
C’est plus facile pour eux d’exprimer leurs sentiments à l’écrit qu’à l’oral, car cela leur permet de trouver le mot juste. C’est moins intimidant et l’on est moins pudique à l’écrit. Les lettres des enfants sont très créatives, elles s’accompagnent de dessins, de couleurs… Sur une enveloppe, un enfant a collé un papier de Carambar. Dans une autre, une petite fille a écrit avec un stylo parfumé à la fleur d’oranger. C’est comme un cadeau qu’on offre à son amoureux (se), ce qui explique le plaisir de chacun à les écrire.
Certaines lettres sont d’une intensité incroyable. Comment l’expliquez-vous ?
Les premières amours sont bouleversantes et on les accueille de manière assez brute, sans se défendre. « Ton cœur compte plus que le mien », écrit par exemple Maxime. Les mots sont d’ailleurs définitifs : « Je ne t’oublierai jamais ». « Les meilleurs moments de ma vie, c’était avec toi ». Ou Damien qui déclare à Coco : « Même si tu ne m’aimes plus, je t’aimerais toujours, parce que tu es la plus belle de l’univers ».
Il y a aussi un mimétisme car les enfants utilisent les mots d’amour des adultes. Et ils reproduisent un cadre assez normatif : ils parlent de mariage, de bébé…. « Il faudra qu’on se marie », suggère ainsi Emilie à Sébastien.
Ces amours sont-elles toujours réciproques ?
Non. Certains destinataires se prennent des râteaux par écrit. Et c’est parfois brutal. Comme Marion qui écrit à Maxime : « Avec toi, ça ne va pas plus loin, mais t’es un super pote ». Ou Hugues qui lance à Lucie : « Je te trouve super sympa, mais je ne t’aime pas ». Et en lisant certaines lettres, on se croirait dans Les feux de l’amour, avec des histoires de jalousie, de trio amoureux, de ruptures…
Quelles sont les lettres les plus drôles ?
Celles qui passent du coq à l’âne ou qui contiennent des expressions un peu absurdes, comme : « Je t’aime comme le lait, mais le lait pour boire ». Ou « Margaux (…) tu as un menton à manger comme un cordon-bleu ». Ou bien encore « Océane, notre cœur est un océan d’amour ». Sans oublier la tirade de Gauthier à Justine : « Tes cheveux ressemblent à des pétales ».
Si les propriétaires de ces lettres les ont gardées, c’est qu’elles témoignaient de souvenirs très précieux ?
Oui, beaucoup de personnes ont été très marquées par leurs amours d’enfance. Et ces lettres sont le témoignage d’une époque et invitent à la nostalgie.
Espérez-vous que les protagonistes de ces lettres se retrouvent ?
Oui, j’adorerais qu’ils se reconnaissent et qu’ils se recontactent. De là à imaginer que des couples puissent se créer par ce biais, peut-être pas ! Moi-même j’ai retrouvé Simon sur Facebook et nous avons échangé quelques messages. Mais il m’a vite retirée de sa liste d’amis !
* Tu n’es pas belle, tu es pire !, Morgane Pellennec, Albin Michel, 96 pages, 10 euros.