Coronavirus à Bordeaux : Des chiens formés pour traquer le Covid-19 avec la sueur humaine
EXPERIMENTATION•Des chiens des brigades canines de la gendarmerie et des sapeurs-pompiers de Gironde, s'entraînent à détecter le Covid grâce à la sueur des hommes20 Minutes avec AFP
L'essentiel
- Baptisé Cynocov, un projet coordonné par le CHU de Bordeaux expérimente la possibilité que des chiens deviennent des « alliés » dans la traque du coronavirus.
- Depuis le 4 janvier, à Libourne, cinq chiens s’entraînent à repérer des compresses de transpiration prélevée sous les aisselles de personnes positives au Covid-19, en début d’infection.
- « En moyenne, les chiens arrivent à détecter 95 % des cas positifs », assure le Pr Dominique Grandjean, à qui l’on doit la méthode Nosaïs-Covid19 enrichissant l’immense « bibliothèque olfactive » du chien, déjà utilisée pour la détection de certains cancers.
L’objectif est d’apporter une « solution complémentaire », dans la traque contre le coronavirus… Une étude coordonnée par le CHU de Bordeaux, associé avec Ceva santé animale, premier laboratoire vétérinaire français, dans ce projet, expérimente la possibilité que des chiens deviennent des « alliés » dans la traque du virus.
En temps normal, Eliot piste des malfaiteurs ou des personnes disparues. Mais depuis un mois, ce berger malinois s’entraîne aussi à détecter le Covid-19 grâce à la sueur des hommes. Comme Eliot, le Labrador Marvel et trois autres bergers malinois et allemand, tous membres de brigades canines de la gendarmerie nationale en Nouvelle-Aquitaine et des sapeurs-pompiers de Gironde, s’entraînent depuis le 4 janvier à Libourne, près de Bordeaux, à leur nouveau « jeu » : repérer des compresses de transpiration prélevée pendant dix minutes sous les aisselles de personnes positives au Covid-19, en début d’infection.
« Ils détectent des matières organiques de dégradation issues de l’infection »
Chaque jour ou presque, des échantillons de sueur arrivent du CHU pour être présentés à la truffe des chiens dressés au centre de formation installé par Ceva sur son siège de Libourne. « Ils détectent des matières organiques de dégradation issues de l’infection », dénuées d’expression virale, précise Dr Pierre-Marie Borne, référent chez Ceva.
Au signal « Au cône ! », les chiens se mettent au travail. Après Eskiss, spécialiste de la détection de « stups », armes et munitions, le malinois Eliot plonge à son tour le museau dans une rangée de cônes en métal. Soudain, il marque devant deux de ces entonnoirs, la queue remuante : à l’intérieur, se trouvent deux échantillons distincts de sueur prélevée sur des patients positifs. « C’est bien ! », félicite son maître avant de lui présenter en récompense une friandise et son jouet préféré. Il y a encore quelques jours, ce chien de piste-défense de la gendarmerie en Dordogne était lancé sur les traces d’une personne disparue.
« Les chiens arrivent à détecter 95 % des cas positifs au Covid-19 »
Baptisé Cynocov, ce projet soutenu par la région Nouvelle-Aquitaine s’appuie sur la méthode Nosaïs-Covid19 développée par le Pr Dominique Grandjean de l’Ecole nationale vétérinaire de Maisons-Alfort, qui vient enrichir l’immense « bibliothèque olfactive » du chien, déjà utilisée pour la détection de certains cancers.
« En moyenne, les chiens arrivent à détecter 95 % des cas positifs au Covid-19 », dit le Pr Grandjean. Cette méthode est notamment testée en Corse et selon les porteurs du projet, « 40 pays travaillent sur le sujet ».
Après six à huit semaines de formation à raison de quatre matinées par semaine, l’aptitude des chiens devra encore être démontrée au cours d’une étude clinique au CHU avant un éventuel déploiement de l’outil. Objectif : mettre à l’épreuve leur performance sur différents types de prélèvements renvoyant à différents terrains de la maladie, soit leur capacité à appréhender des formes graves ou non graves, les sujets contagieux ou moins contagieux, symptomatiques et asymptomatiques, mais aussi ceux infectés par un variant.
« L’outil sera principalement utilisé pour faire de la présélection » de personnes suspectes
En cas de succès, « l’outil sera principalement utilisé pour faire de la présélection » de personnes suspectes afin de « cibler les besoins en dépistage de confirmation » par le test de référence naso-pharyngé RT-PCR, explique Dr Pierre-Marie Borne, chez Ceva.
« Quand on sait qu’il va falloir faire bientôt du dépistage de personnes a priori asymptomatiques dans toutes sortes d’espaces – écoles, Ehpad, aéroports, ce type d’outils qui offre au moins un critère de suspicion fort, va permettre en termes d’acceptabilité et de réactivité de faciliter ce processus », estime Pr Denis Malvy, chef du service maladies infectieuses et tropicales au CHU.
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Pour le professeur, également membre du conseil scientifique, ces chiens sont « presque nos alliés dans la production d’un outil de dépistage qui aura », espère-t-il, « sa place dans la nécessité de gérer cette urgence sanitaire ».