VENGEANCEUne possible vendetta évitée de justesse en Corse

Corse : Une possible vendetta évitée de justesse

VENGEANCETrois hommes circulants dans des véhicules volés et armés ont été arrêtés le 4 janvier dernier près d’Ajaccio
Photo prise après l'assassinat de Maxime Susini, militant indépendantiste anti-mafia.
Photo prise après l'assassinat de Maxime Susini, militant indépendantiste anti-mafia.  - Pascal POCHARD-CASABIANCA / AFP
20 Minutes avec AFP

20 Minutes avec AFP

L'essentiel

  • Trois hommes interpellés début janvier près d’Ajaccio sont soupçonnés d’avoir voulu venger la mort du fils de Louis Carboni, Tony assassiné à Ota, en Corse-du-Sud, en août 2020.
  • Louis Carboni, 64 ans, a été condamné depuis 1976 à un total de 50 ans de prison pour notamment meurtre, vol, recel, port d’arme, trafic de stupéfiants ou évasion.
  • « Je veux savoir pourquoi mon fils a été tué. Si c’est par rapport à moi, c’est comme si j’avais armé les tueurs », a déclaré Louis Carboni lors d’un récent procès en décembre 2020.

Une vendetta a-t-elle été évitée en Corse ? L’enquête s’oriente vers cette hypothèse après la mise en cause d’un homme, emprisonné et hanté par l'assassinat de son fils. Lundi 4 janvier, trois hommes circulant en voiture et à moto, toutes deux volées, sont arrêtés à Alata, en périphérie d'Ajaccio:​ « Ils étaient sur le point de passer à l’action », indiquent des sources proches de l’enquête, sans que l’objectif précis ne soit connu. Les jours suivants d’autres arrestations suivent et Louis Carboni, 64 ans et condamné depuis 1976 à un total de 50 ans de prison, est extrait de sa cellule des Baumettes à Marseille.

Déféré devant les magistrats de la Juridiction interrégionale spécialisée (Jirs) de Marseille, compétente en matière de grand banditisme, il est notamment mis en examen, comme six autres personnes, pour association de malfaiteurs en vue de la préparation de crimes en bande organisée, annonce la Jirs.

Collectif antimafia

L’enquête, menée par la police judiciaire (PJ) et la section de recherche de la gendarmerie en « excellente collaboration » selon un connaisseur du dossier, avait débuté à l’origine au lendemain de l’assassinat de Tony Carboni, le fils de Louis, à Ota (Corse-du-Sud) en août 2020.

A l’époque, le ton s’envenime publiquement entre les Carboni et une autre famille corse, les Susini, elle aussi endeuillée par l’assassinat en 2019 de l’un des siens, Maxime, un militant indépendantiste. Les Carboni dénoncent dans un communiqué le « lâche assassinat » de Tony au « seul motif qu’il était membre de notre famille ». Entre les lignes, ils regrettent d’avoir été pointés du doigt dans l’assassinat de Maxime Susini sans citer son nom.

Le collectif antimafia Maxime Susini rétorque alors se sentir visé par les déclarations des Carboni qu’il assimile à des « menaces de mort ». Sur Facebook, le comité s’estime « en droit de se défendre si la vie de ses membres se voyait menacée ». Les plus hauts représentants de la justice sur l’île interviennent alors publiquement en appelant à éviter les « actions de vengeance ».

« Certainement pour aller commettre un crime »

Une vendetta a-t-elle été évitée de justesse des mois plus tard avec l’arrestation la semaine dernière du commando près d’Ajaccio ? « Ça ne sera jamais écrit en procédure, mais on sait qu’il y a une ambiance particulière et qu’ils sont tous en lien avec Louis Carboni », résume une source proche de l’enquête.

« Ils sont connus pour commettre des méfaits, ils se sont équipés, ils ont des véhicules volés, une kalachnikov… tout cela très certainement pour aller commettre un crime. L’association de malfaiteurs est constituée », poursuit cette source. « Les faits sont contestés », insiste Me Antoine Vinier-Orsetti qui défend trois des sept mis en examen.

Le 11 décembre à Ajaccio, Louis Carboni avait été condamné pour la 18e fois, à quatre ans de prison pour détention et transport d’arme après avoir été arrêté dans l’île avec un pistolet chargé dans un 4x4 blindé immatriculé en Russie.

« Je veux savoir pourquoi mon fils a été tué »

Lors de son procès, le sexagénaire, déjà condamné pour meurtre, vol, recel, port d’arme, trafic de stupéfiants ou évasion, avait reconnu les faits, précisant qu’on lui avait donné cette arme, dont il « ne voulait pas », pour pouvoir se « défendre ».

Il aurait, selon ses dires, « été désigné par la rumeur publique comme la prochaine victime » après la mort de son fils, Tony. « Je veux savoir pourquoi mon fils a été tué. Si c’est par rapport à moi, c’est comme si j’avais armé les tueurs et avec ça, je ne peux pas vivre », avait-il confié au tribunal. Il a « la volonté de régler les choses seul », avait alors estimé Geoffrey Makan, représentant du ministère public.