Déguster un menu de fête (presque) comme au restaurant… Un « kit Réveillon » préparé par les chefs
NOEL•Les restaurateurs, très éprouvés par les deux confinements, se mobilisent pour les fêtes de Noël20 Minutes avec AFP
A l’approche des fêtes de fin d’année, certains restaurateurs, las d’attendre les décisions du gouvernement sur une future réouverture, ont déjà mis au point un « kit Réveillon », à emporter ou à se faire livrer.
« Je pense que les restaurants ne rouvriront pas pour les fêtes, donc je me suis dit : il faut qu’on prenne les devants », a expliqué le chef triplement étoilé Eric Frechon. Comme tous les professionnels du secteur, il a très mal vécu la succession d’annonces gouvernementales sans anticipation des derniers mois : la fermeture brutale mi-mars qui a fait perdre des milliers d’euros de stocks, puis la réouverture avec distanciation physique qui n’a pas permis d’éviter le couvre-feu, et une nouvelle fermeture fin octobre.
« L’art de vivre à la française en a pris un coup »
« J’ai senti le vent venir, même s’il n’y a rien d’officiel », avance le chef du restaurant de l’hôtel Bristol à Paris, aussi à la tête de la brasserie Lazare, pour laquelle il a concocté des menus de Noël et de Saint-Sylvestre « prêts à dresser » chez soi – à emporter ou à se faire livrer. Il propose tartare de daurade, saumon confit, fricassée de pintadeau cuisiné aux châtaignes, oignons et lard fumé, purée de céleri rave, brie et millefeuille à la vanille, à déguster le 31 décembre, en passant commande au moins cinq jours avant, pour 95 euros hors boisson.
Non sans une certaine frustration : pour le chef, « l’art de vivre à la française en a pris un coup » avec la « généralisation d’un "take away" qui est davantage dans les mœurs anglo-saxonnes ». « Avec la vente à emporter, il n’y a plus de contact humain, tout se passe par téléphone. J’ai besoin de discuter avec mes clients, de voir leurs sourires, leurs réactions quand ils mangent. Pas de réchauffer mes plats », lance Eric Frechon.
Des annonces attendues la semaine prochaine
A La Rôtisserie d’Argent aussi, un menu festif a été concocté par Sébastien Devos, un chef quadragénaire formé au Ritz et au Café de la Paix : gougères au comté, médaillon de canard roulé au foie gras, chapon farci aux champignons et fricassée de pommes de terre, champignons et marrons, bûche au chocolat. Un menu à 49 euros proposé à emporter ou livré à domicile à Noël, mais aussi les trois derniers week-ends de décembre, pour ceux qui festoient « en décalé », précise le chef.
« Il faut prévoir tous les scénarios, explique Sébastien Devos. Si le restaurant rouvre, l’offre sera plus riche en salle, mais en tout cas nous avons déjà une offre à emporter pour les fêtes de fin d’année ». Car si le gouvernement, sous intense pression alors que la période des fêtes démarre, devrait permettre aux commerces de rouvrir avec un protocole sanitaire renforcé, le 1er décembre ou un peu avant, bars et restaurants, soupçonnés d’être des lieux importants de contamination, devront sans doute attendre 2021. Les annonces devraient être faites par Emmanuel Macron la semaine prochaine.
Une question de survie
Pour de jeunes restaurateurs à l’activité récente, la livraison est une question de survie, même si elle ne couvre que « la moitié des frais fixes », indique Capucine Frerejean, co-fondatrice de Cali Sister, un restaurant californien de 100 couverts, qui livre un « brunch à la maison » : granola, yaourt, fruits, pancakes ou gaufres et beurre de sirop d’érable… « Nous sommes nés pendant le confinement : nous devions ouvrir le 17 mars ! Il nous a fallu attendre deux mois, et dès le mois de mai nous faisions de la livraison… puis nous avons ouvert la terrasse l’été, et repris dans le flou en septembre, avant de retourner à la vente à emporter depuis le confinement », résume la jeune restauratrice.
« On réfléchit à un menu de fête… mais on vit au jour le jour, on se réinvente quotidiennement, rapidement », constate Capucine Frerejean, dont la trentaine de salariés sont au chômage partiel. « Ça ne pourra pas durer indéfiniment », prévient-elle toutefois, car « les charges comme le loyer continuent à tomber, ce qui grève très fortement notre activité ». Et avec les restaurateurs, « c’est aussi tous les fournisseurs, les pêcheurs, les éleveurs, les maraîchers qui souffrent », rappelle le jeune chef Juan Arbelaez, devenu célèbre sur les réseaux sociaux pendant le confinement, et dont la moitié des huit restaurants sont fermés.