BATAILLE DE L'IMAGEAvec son « livre blanc », l’Intérieur veut booster sa communication

Sécurité : Dans son « livre blanc », le ministère de l’Intérieur affiche sa volonté de booster sa communication

BATAILLE DE L'IMAGEInitié par le prédécesseur de Gérald Darmanin place Beauvau, le « Livre blanc de la sécurité » suggère un meilleur contrôle de l’information par le ministrère de l’Intérieur
Thibaut Chevillard

Thibaut Chevillard

L'essentiel

  • Le Livre blanc de la sécurité intérieure, document de 322 pages rendu public lundi par le ministère de l’Intérieur, est le fruit d’un travail d’un an associant gouvernement, syndicats et grands corps de la police et de la gendarmerie. Il a été initié par le prédécesseur de Gérald Darmanin place Beauvau, Christophe Castaner.
  • Ses auteurs – des responsables du ministère qui ont mené plusieurs phases de concertations – constatent que les forces de l’ordre font désormais « l’objet d’un rejet d’une frange non négligeable de la population ». Ils estiment que les Français, mal informés, méconnaissent les missions des forces de l’ordre.
  • Face à cette situation, le Livre blanc préconise une réorganisation de la communication du ministère de l’Intérieur.

Textes et mesures visant à mieux maîtriser l’image des forces de l’ordre se succèdent. Présenté en septembre dernier, le schéma national de maintien de l’ordre évoque l’obligation, pour les journalistes souhaitant couvrir des manifestations, d’être « titulaires d’une carte de presse et accrédités auprès des autorités ». L’un des articles de la proposition de loi sur la « sécurité globale » prévoit de punir la diffusion d’images ou d’éléments d’identification de policiers ou de gendarmes lorsqu’ils sont en opération. Un autre que les vidéos issues de leurs « caméras piétons » puissent être rendues publiques.

Le Livre blanc sur la sécurité intérieure, publié lundi, contient également son lot de mesures ayant pour but de renforcer la communication ministérielle et d’améliorer l’image des forces de l’ordre. Ce document de 322 pages, qui a nécessité un an de travail, rassemble près de 200 propositions devant « inspirer l’action du ministre de l’Intérieur pour les prochaines années », selon l’expression de Gérald Darmanin. Il aborde notamment la question des relations population et les forces de sécurité, principalement sous le prisme de la communication.

Mieux faire connaître les missions des forces de l’ordre

Ses auteurs, essentiellement des cadres du ministère de l’Intérieur, partent d’un constat : les agressions contre les policiers, gendarmes et sapeurs-pompiers ont fortement augmenté en 2019. « Ce phénomène, dont l’ampleur et l’intensité sont inédits dans notre histoire récente, est une des démonstrations de la défiance développée par une partie des Français à l’égard des forces de sécurité. » Acclamées en 2015 après les attentats, ces dernières font, cinq ans plus tard, « l’objet d’un rejet d’une frange non négligeable de la population ».

Cette défiance s’expliquerait surtout, selon eux, par la méconnaissance de leurs missions par la population. En substance, les Français sont mal informés et ne retiennent que les « aspects négatifs » des forces de l’ordre, « relatés à travers les médias et les réseaux sociaux », ces derniers étant vecteurs de « fausses nouvelles » et d’informations manipulées. Rien à voir, donc, avec les affaires de violences policières qui ont défrayé la chronique ces dernières années, ni avec les contrôles au faciès régulièrement dénoncés par les associations ou les institutions comme le Défenseur des droits. Ces sujets ne sont tout simplement pas évoqués dans le Livre blanc.

Le document, dont la parution a été plusieurs fois repoussée, insiste en revanche sur un point : la communication du ministère de l’Intérieur, qui fait défaut jusqu’à présent, doit évoluer. Elle doit « faire connaître et valoriser l’action des forces de l’ordre pour ne pas laisser le champ libre aux mises en cause dont elles font de plus en plus systématiquement l’objet ». « Cela implique notamment de mieux expliquer les règles et les cadres d’intervention afin qu’ils soient mieux acceptés et mieux intégrés par chacun. »

Ses auteurs soulignent aussi la nécessité, pour la place Beauvau, de développer « une communication de proximité, portée au quotidien par les acteurs de terrain », afin que « les forces de sécurité intérieure soient localement mieux connues de la population ».

« Freiner au plus vite la propagation de fausses nouvelles »

Le ministère de l’Intérieur est prié de « réorganiser » sa communication, notamment en se dotant « d’un maillage et d’une chaîne de communication adaptés aux enjeux de la sécurité intérieure », et de renforcer le réseau territorial des communicants par des community managers. Ces derniers devront développer leur présence sur les réseaux sociaux afin de « freiner au plus vite la propagation de fausses nouvelles ».

« Il n’est ni possible ni souhaitable de réagir à la moindre vidéo diffusée sur les réseaux sociaux », concèdent leurs auteurs du Livre blanc. En revanche, « il faut que les différents acteurs de la communication du ministère de l’Intérieur soient en capacité d’être présents et réactifs sur les réseaux sociaux, de faire entendre rapidement et régulièrement une parole officielle en situation de crise, de produire leurs propres images et contenus, de vérifier le plus rapidement possible les informations en circulation pour être en mesure, le cas échéant, de les infirmer et de les décrypter ».