OBESITEComment l'homme de 300 kg bloqué chez lui à Perpignan va-t-il être évacué ?

Perpignan : Comment l'homme de 300 kg bloqué chez lui depuis plus d'un an va-t-il être évacué ?

OBESITEL'homme devrait être pris en charge dans une quinzaine de jours
Nicolas Bonzom

Nicolas Bonzom

L'essentiel

  • Alain P., qui pèse plus de 300 kg, est bloqué au sol, dans un appartement insalubre.
  • L’évacuation du quinquagénaire, demandée par ses proches et son avocat depuis plus d’un an, devrait avoir lieu dans une quinzaine de jours. Mais elle est complexe.
  • Son état de santé est préoccupant, selon un médecin qui l’a observé.

Une grue viendra bientôt délivrer Alain P. de l'enfer qu'il vit depuis plus d'un an. Cet homme, qui pèse près de 300 kg, est bloqué chez lui, dans un appartement, insalubre, d’un immeuble du quartier Saint-Jacques, à Perpignan (Pyrénées-Orientales). Une chute, qui lui a cassé la jambe, l’a immobilisé au sol. Depuis, ce quinquagénaire ne peut plus bouger, et ce sont ses proches qui s’occupent de lui.

Le 22 octobre, tandis qu’il remuait ciel et terre depuis plus d’un an pour que l’Etat évacue Alain P. vers un hôpital, son avocat, Jean Codognès, avait écrit à Gérald Darmanin, le ministre de l’Intérieur, pour réclamer que l’on se penche sur le sort de cet homme. Une plainte pour « non-assistance à personne en danger » et « omission de porter secours à personne en péril », à laquelle s’était associée la Ligue contre l'obésité, avait suivi. « C’est à croire qu’ils veulent qu’il meure à la maison, ça devient une affaire criminelle. On ne sait plus quoi faire », se désolait son frère, auprès de l’association, le 30 octobre.

Une évacuation complexe

Quelques semaines plus tard, l’Etat bouge. Une opération doit avoir lieu, a priori, dans une quinzaine de jours, pour évacuer Alain P. vers l’hôpital de Montpellier (Hérault), où il sera pris en charge par un service spécialisé dans les cas de grande obésité. Le quinquagénaire sera transporté dans l’Hérault à bord d’une ambulance médicalisée. L’opération aura lieu « probablement le 1er décembre », confie ce lundi matin à 20 Minutes Jean Codognès. Sollicités, les services de la préfecture des Pyrénées-Orientales confirment que son évacuation est bien prévue, sans préciser de date.

L'homme est bloqué chez lui, au sol, depuis plus d'un an
L'homme est bloqué chez lui, au sol, depuis plus d'un an - Alain ROBERT/SIPA

Mais son évacuation, qui avait été prévue, puis reportée, cet été, est « complexe et délicate », confie à 20 Minutes Joël Pérez, le directeur de cabinet adjoint de la préfecture des Pyrénées-Orientales. Et elle n’est pas sans risques. Il est en effet impossible de le transporter par les escaliers. C’est une grue de levage qui va prendre en charge Alain P., « en position semi-allongée » dans cette rue étroite du quartier Saint-Jacques.

« L’immeuble va être renforcé, par des pieds métalliques, au rez-de-chaussée et au premier étage, explique son avocat, Jean Codognès. Une partie de la façade va être enlevée, pour le faire glisser, dans un conteneur, placé dans le prolongement de la pièce dans laquelle il se trouve. C’est une grue qui va fera ensuite descendre le conteneur dans la rue. » L’opération devait débuter très tôt, aux alentours de 5 h du matin. Et elle devrait durer « toute une journée », explique, à la préfecture des Pyrénées-Orientales, Joël Perez, et mobilisera au moins huit sapeurs-pompiers, des infirmiers, des policiers municipaux ainsi que des ouvriers pour manœuvrer la grue de levage.

Son état de santé est alarmant

Au début du mois de novembre, « une dizaine de personnes, dont des professeurs du centre spécialisé dans l’obésité du CHU de Montpellier, un anesthésiste, des médecins de l’hôpital de Perpignan, des pompiers experts dans les sauvetages à risque, mais aussi les services du département et de la mairie de Perpignan, ainsi qu’une chef d’entreprise d’engins de levage, se sont rendus au chevet du patient […] pour établir […] un scénario d’évacuation et un diagnostic précis », indique la Ligue contre l’obésité, qui s’est fortement mobilisée pour que les services de l’Etat agissent.

Si son évacuation soulage quelque peu Alain P. et lui donne « un espoir », indique son avocat, il reste dans une situation critique. Un médecin, au début du mois de novembre, avait décrit son état de « péril imminent ». Selon la Ligue contre l'obésité, ce docteur avait observé que son obésité « ne cesse d’augmenter depuis plus d’un an […]. Le patient est assis par terre depuis cette date […]. Il a des escarres, des surinfections de plis et des troubles trophiques graves ». Le médecin avait également pointé, selon l’association, « une insuffisance respiratoire restrictive avec saturation à 87 % ».

« On ne pouvait pas ne pas dénoncer cette situation, inhumaine et inacceptable au XXIe siècle, soulignait, le 10 novembre, la directrice générale de la Ligue contre l’obésité, Agnès Maurin. Cet exemple est symptomatique du drame de l’obésité. J’espère qu’il va réveiller les consciences, car il s’agit d’une maladie qui n’est pas reconnue par l’État comme une pathologie chronique, pas prise en charge, sans soins nécessaires. On peut arriver à des situations extrêmes comme celle-là, des cas d’autant plus invisibles pour la société que ce sont des petites gens, plus pauvres, plus isolés. »