Accident mortel de TGV en Alsace : Cinq ans après, les familles attendent toujours un procès
COMMEMORATION•Onze personnes sont mortes dans un accident de TGV de test sur la ligne nouvelle près de Strasbourg le 14 novembre 201520 Minutes avec AFP
Cinq ans après le déraillement d’un TGV lors d’un test sur la nouvelle ligne à grande vitesse Paris-Strasbourg qui avait fait onze morts au lendemain des attentats de Paris, les familles des victimes oscillent entre détresse et résignation. « On a toujours le même état d’esprit. Novembre, c’est pas le meilleur mois de l’année », euphémise Nicolas Heury, le fils de Daniel Heury, décédé dans l’accident survenu à Eckwersheim ( Bas-Rhin), à 20 kilomètres au nord de Strasbourg. « C’est un mois qui nous rappelle beaucoup de chose. »
Il se souvient avec douleur de ce 14 novembre 2015 et de ce qui devait être l’ultime essai avant la mise en service du dernier tronçon de la ligne. Après une carrière de contrôleur à la SNCF, son père, retraité, avait été sollicité pour être chef de bord. Au total, 53 personnes, salariées de l’industrie ferroviaire ou invités, avaient pris place dans le train, dont quatre enfants. « C’était gratifiant qu’on l’appelle. Depuis le début de l’existence du TGV, il n’y avait eu que 14 chefs de bord pour des essais. C’était une consécration, à sa place, personne n’aurait refusé. »
Une très longue instruction
Mais peu après 15 heures, au niveau d’Eckwersheim, le train aborde une courbe à 265 km/h, très largement au-dessus des 176 km/h prévus. Il déraille 200 mètres plus loin, avant de percuter un pont et de basculer dans le canal de la Marne au Rhin. Outre les 11 personnes décédées, toutes adultes, les 42 autres voyageurs avaient été blessés. Cette catastrophe demeure le seul accident mortel impliquant un TGV depuis sa mise en service en 1981. Mais sa couverture médiatique avait été atténuée par les attentats jihadistes qui avaient ensanglanté la capitale la veille.
L’enquête pénale, menée par les juges du pôle « Accident collectifs » du tribunal de Paris, se poursuit. « Etant donné la complexité du dossier, on est encore dans un délai raisonnable », estime l'avocat de Nicolas Heury, Claude Lienard. « C’est un dossier complexe, on a tout intérêt à ce que l’instruction soit bien faite et que toutes les hypothèses soient examinées ». En octobre 2016, trois personnes, deux employés de la SNCF, et un de Systra, ont été mises en examen pour homicides et blessures involontaires, et placées sous contrôle judiciaire. En décembre 2017, la SNCF et Systra ont à leur tour été mises en examen, puis la filiale SNCF Réseau, en 2019.
Depuis plus de deux ans, les parties civiles n’ont plus été reçues par les juges. Gérard Chemla, avocat de la plupart des familles de victimes, regrette l’absence d’échanges plus réguliers avec les magistrats instructeurs. « Je pense que la moindre des choses, c’est de tenir informées les victimes de ce que disent les experts. Mon attente c’est qu’une concertation se tienne prochainement. »