FAKE OFFLe travail et l’école représentent-ils « 60 % des contaminations » ?

Coronavirus : Pourquoi il est difficile d'affirmer que « 60 % des contaminations ont lieu au travail, à l'école ou à l'université »

FAKE OFFJean-Luc Mélenchon a assuré mercredi que la majorité des contaminations survenaient au travail ou dans un milieu scolaire ou universitaire. Une affirmation hasardeuse en l’absence de données sur l’ensemble des cas
Mathilde Cousin

Mathilde Cousin

L'essentiel

  • Réagissant à l’annonce du couvre-feu, le leader de La France insoumise a avancé que « 60 % des contaminations ont lieu au travail ou à l’école ou à l’université entre 8 h et 19 h. »
  • 55 % des clusters en cours d’investigation correspondent bien à ces catégories.
  • Toutefois, les clusters ne représentent que 5 % des cas de Covid-19 confirmés.

Où se contamine-t-on le plus au coronavirus ? La question, épineuse, est au cœur des débats après l’annonce du couvre-feu imposé à huit métropoles et à l’Ile-de-France à partir de samedi. Réagissant aux annonces d' Emmanuel Macron mercredi soir, Jean-Luc Mélenchon, le chef de file de La France insoumise, a avancé sur Twitter que « 60 % des contaminations ont lieu au travail ou à l’école ou à l’université entre 8 h et 19 h. »

Olivier Véran, le ministre de la Santé, a rétorqué : « 60 % des clusters, ça signifie 10 % des contaminations identifiées. Vous confondez clusters et diagnostics. »

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FAKE OFF

Les chiffres avancés par le député LFI ne représentent pas l’ensemble des contaminations au Covid-19. Ils représentent seulement les cas identifiés au sein des clusters. Selon le dernier rapport de Santé publique France, daté du 8 octobre, 55 % des clusters en cours d’investigation provenaient du milieu scolaire et universitaire (35 %) et des entreprises privées et publiques (20 %). Les établissements de santé ne sont pas décomptés dans les entreprises – ils représentent 11 % des clusters en cours d’investigation.

Au total, depuis le 9 mai, le plus grand nombre de clusters ont été identifiés dans les entreprises (25 %) ainsi que le milieu universitaire et scolaire (21 %). Ces clusters représentaient 34.067 cas, pour 653.509 cas confirmés de Covid-19 depuis janvier, selon les données de Santé publique France, soit 5 % des cas confirmés.

Santé publique France reconnaît que, « face à l’augmentation de la circulation virale sur l’ensemble du territoire, le nombre de clusters identifié est probablement largement sous-estimé ». Toutefois, ces données restent « pertinentes » pour « contribuer à guider les mesures de gestion » de la pandémie, souligne l’organisme, car elles permettent « d’identifier les collectivités pour lesquelles la proportion de clusters à criticité élevée est la plus importante »

Alors, où sont contaminés les autres malades du Covid ? A l’heure actuelle, les données à ce sujet sont difficiles à obtenir. « Nous n’avons l’origine des contaminations que pour les clusters », rappelle Kévin Jean, maître de conférences en épidémiologie au Cnam.

Les limites du « contact tracing »

Le « contact tracing », mis en place notamment pour prévenir les cas contact, ne remonte pas la piste des contaminations individuelles. Cette technique « permet d’identifier les lieux de contamination collectifs », souligne l’Assurance maladie auprès de 20 Minutes.

Celle-ci a ses limites, souligne sur Twitter Maxime Gignon, professeur de santé publique à l’université de Picardie : « Tracer des contacts, c’est complexe. Identifier le moment où ils ont pu se contaminer l’est encore plus : le midi au restaurant du personnel ? Le soir quand ils sont allés boire un verre ? Le week-end avec les cousins ? […] On dit souvent qu’il n’y a pas/peu de cas de contamination à l’extérieur, peut-être. Mais allez identifier lors d’un tracing, la contamination lors d’un passage dans un centre-ville densément peuplé… impossible. Ce n’est pas le tracing qui nous donnera des éléments de réponse. »

Le gouvernement avait déjà avancé que l’on a « trois fois plus de chances de se contaminer dans un bar », ou bien que les transports en commun, à l’inverse, ne représentaient qu’un nombre infime de contaminations. Des affirmations hasardeuses en l’absence de données de grande ampleur.