Nantes : Une étudiante logée gratis contre du temps passé avec ses voisins seniors
DONNANT-DONNANT•A Nantes, la résidence Domitys permet à un étudiant de bénéficier d’un appartement gratuitement en échange d’un peu de son tempsJulie Urbach
L'essentiel
- Sonia, 22 ans, a emménagé il y a à peine un mois au sein de la résidence services seniors Domitys de Nantes.
- En échange d’un T2, elle doit consacrer 59 heures par mois à faire du lien et proposer des animations aux autres résidents.
Vous la croiserez dans le grand restaurant du rez-de-chaussée, à l’atelier chorale du mardi soir, ou le plus souvent dans le hall à la déco soignée. Pourtant, Sonia n’est pas une locataire comme les autres au sein de la résidence seniors Domitys, quartier Pirmil à Nantes. Déjà car la jeune femme de 22 ans, qui a emménagé il y a tout juste un mois, a en moyenne 58 ans de moins que ses voisins. Mais aussi car elle ne paie aucun loyer pour occuper son deux-pièces de 40 m2, avec coin cuisine et petit balcon, devant lequel baveraient bon nombre d'étudiants nantais.
C’est le concept de Génération Part’âges, lancé par le leader des résidences services (qui propose des appartements à partir de 1.100 € de loyer) destiné à des personnes âgées autonomes, mais parfois isolées. « En échange de l’appartement, Sonia donne 59 heures de son temps par mois [environ 15 heures par semaine], dont 20 heures pour les repas », explique Stéphanie Baconnais, directrice de la résidence. Trois dîners sont pris en charge, et l’étudiante a également un accès libre à la salle de sport et à la piscine couverte, comme les 80 autres résidents. « L’idée, c’est que l’étudiant et le senior puissent avoir des moments de partage, afin d’améliorer encore l’ambiance ici, surtout en fin de journée et le samedi après-midi », complète la directrice.
« La proximité se fait très vite »
En ce début de soirée pluvieuse, on donne de la voix dans l’espace de rencontre, où se déroule un blind test dédié aux musiques de film. Le sourire doux caché par son masque, Sonia compte les points et en profite pour s’assurer que les uns et les autres vont bien. « Sur mon contrat, c’est écrit "assistante animatrice" mais mon approche est plus personnelle, confie l’étudiante inscrite en Master 1 en droit de l’environnement. Ils me racontent leur journée, la proximité se fait très vite. Le soir, je partage le repas avec ceux qui ne veulent pas dîner seuls chez eux. On parle beaucoup, parfois comme si on se connaissait depuis toujours. »
Au-delà de cette écoute, la jeune femme doit faire preuve de créativité, notamment dans les activités proposées. En plus des traditionnels jeux de cartes ou promenades, Sonia espère faire mouche avec des conférences sur l’environnement ou de petits concerts de flûte traversière, qu’elle pratique. Elle a aussi lancé une séance hebdomadaire dédiée au « dépannage informatique », qui a déjà trouvé son public… « D’habitude, je suis plutôt à l’aise, mais heureusement que Sonia était là pour m’aider à envoyer des photos », explique Chantal, une coquette femme de 82 ans. « Elle est charmante et a toujours le sourire », juge Norbert, 80 ans, qui aimerait voir davantage de monde « se bouger » et participer aux animations.
Avant toute chose, il a fallu fixer des limites pour que l’étudiante, qui a « toujours aimé le contact avec les personnes âgées », garde son intimité. « On préconise le vouvoiement qui est une forme de respect et permet de garder une certaine distance », explique la directrice. Dans la même logique, le numéro de l’appartement de Sonia, qu’elle occupera pour toute l’année universitaire, n’a pas été communiqué aux autres résidents.