EDUCATIONNos lecteurs craignent la rentrée scolaire et expliquent pourquoi

Santé des enfants, contamination des parents, absence de mesures adaptées… Nos lecteurs expriment leurs craintes pour la rentrée scolaire

EDUCATIONA deux semaines de la rentrée, les parents d’élèves angoissent à l’idée de renvoyer leurs enfants en classe
Romarik Le Dourneuf

Romarik Le Dourneuf

L'essentiel

  • A seulement deux semaines de la rentrée, la gestion des gestes barrières pose encore question alors que le ministère de l’Education nationale n’a pas mis son protocole sanitaire à jour depuis le mois de juillet.
  • Les parents s’inquiètent pour la santé de leurs enfants mais aussi pour la leur, à cause des contaminations qui pourraient faire passer le virus de l’école à la maison.
  • Beaucoup craignent également des fermetures totales ou partielles d’école qui les obligeraient à se réorganiser.

Le blues laisse sa place au stress pour cette rentrée 2020. Après une année scolaire 2019-2020 qui s’est terminée dans une improvisation jamais vue auparavant, celle qui lui succède entraîne déjà son lot d’interrogations.

A seulement deux semaines du retour en classe de millions d’élèves, les syndicats d’enseignants s’alarment devant l’absence de protocole adapté à la situation actuelle de l’épidémie de Covid-19 (le dernier protocole date du mois de juillet), alors que le ministre, Jean-Michel Blanquer, doit prendre la parole ce jeudi soir au JT de France 2. Face à ces incertitudes, les parents d’élèves aussi s’inquiètent. Pour 20 Minutes, ils racontent.

« On joue à la roulette russe avec la vie de nos enfants »

« Je suis très anxieuse à l’idée de renvoyer mes enfants dans un nid à contamination. » Comme Deborah, les lecteurs de 20 Minutes se sont massivement exprimés, dans notre appel à témoignages, sur leurs peurs de la rentrée en période de progression du virus. La première des inquiétudes va, bien évidemment, vers les enfants. Pour Carlos, père de deux enfants, un en primaire et l’autre au collège, les conditions pour l’accueil des élèves ne sont réunis nulle part : « Ils sont toujours une trentaine dans des classes de 50 m². Le port du masque n’est pas obligatoire pour tous et ils ne seront pas fournis ».

Pauline pense, elle, à la cantine que fréquente sa fille lycéenne : « Ils sont 900 dans quelques salles. Je ne vois pas comment ils pourraient respecter les distances ou garder leur masque en mangeant ». Même inquiétude pour Dominique, qui n’imagine pas son fils et ses camarades garder un masque toute la journée en classe : « J’ai l’impression qu’on joue à la roulette russe avec la vie de nos enfants ». Nombreux sont les parents qui se plaignent de l’absence de mesures concrètes et réalistes à quelques jours de la rentrée. Hormis les masques pour les enseignants et du gel hydroalcoolique, ils ont le sentiment que rien n’est fait. Surtout les parents dont les enfants ont une santé fragile. La fille de Maria souffre d’un asthme sévère. « Si je ne l’amène pas, serais-je sanctionnée ? Les autres élèves n’auront pas de masque. Elle va se retrouver dans un aquarium à virus ».

Les adultes s’inquiètent pour eux

Si Grégoire relativise, en expliquant que les enfants ne sont pas « la principale cible du virus », l’argument ne devrait pas convaincre les parents qui s’inquiètent pour leur propre santé. « Mon mari et moi sommes des personnes à risque. Nous avons été extrêmement vigilants depuis le début de l’épidémie. Mais que notre fille se mêle à ceux qui sont allés dans la foule, qui ne respectent pas les mesures barrières… Cela nous angoisse profondément », explique Barbara, maman d’un adolescent et personne vulnérable. Elle se dit même terrorisée à l’idée d’un retour à l’école : « S’il est contaminé, il sera probablement asymptomatique et donc je risque de l’attraper à tout moment ». Chez Sabine aussi, les questions et les doutes se multiplient. Les grands-parents, qui vont régulièrement chercher les enfants aux grilles de l’école, peuvent-ils encore s’y aventurer ? Les autres familles ont-elles été aussi précautionneuses que la sienne ? « Soyons réalistes : un enfant de 8 ans ne peut pas tenir toute la journée avec un masque. Ils sont dans un environnement à risques ».

Ce risque, d’autres parents pourraient s’y exposer davantage encore : les enseignants. Ceux qui témoignent, comme Claude, ont le sentiment de subir une double peine. « Nous serons face à 35 élèves sans masques. Même si on en porte un, nous sommes en plein dedans. Et on va ramener ce virus chez nous. »

Des mesures sanitaires inapplicables

Parmi les inquiétudes des enseignants revient souvent la question de l’organisation et de la mise en place des gestes barrières. Si Virginie ne voit pas dans « quel univers les mesures prônées par le gouvernement seraient applicables », d’autres ne voient pas comment ils pourraient imposer le masque chez les plus de 11 ans, comme le protocole sanitaire le prescrit. Ludivine, mère de deux enfants en maternelle et primaire, évoque tout de même la situation en Asie : « Les enfants, dans ces pays, arrivent dès leur plus jeune âge à porter des masques toute la journée et les Français en seraient incapables ? C’est aberrant. »

Ressurgit alors la peur de possibles fermetures ou de présence partielle à l’école. En premier lieu pour l’organisation. Stéphanie redoute de devoir trouver des solutions au pied levé comme lors du déconfinement : « Cela impactera forcément notre situation professionnelle et engendrera du stress. » Même son de cloche du côté de Marie : « Je ne suis pas certaine de tenir physiquement et psychologiquement si les écoles ferment à nouveau : je ne pourrai pas assumer le quotidien, l’enseignement à distance et mon travail à nouveau. Je suis encore épuisée du confinement. »

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Des différences à gérer

D’autant que cette période n’a pas été bénéfique pour tous les élèves et certains sont dans une période importante. Aurélie cite le cas de sa fille qui doit entrer en CP dans deux semaines : « Je ne la vois pas apprendre à lire et à écrire en alternance, un jour sur deux. C’est une année charnière ». Elle tient tout de même à féliciter les enseignants pour leur gestion des derniers mois. L’expérience des cours à distance n’a pas plu à France non plus. Pour elle, ne pas ouvrir totalement les écoles reviendrait à « sacrifier la scolarité de ses enfants », elle qui travaille et ne se sent pas la compétence pour faire la classe à ses enfants en collège et lycée. Enora s’inquiète aussi des conséquences d’une année perturbée par le virus pour son fils qui entre en 6e : « Le passage à l’école des grands est déjà suffisamment perturbant pour lui. Avec toutes ces mesures et les risques d’avoir une année hachée, ça ne va vraiment pas être facile ».

Ces peurs sont même exacerbées lorsque l’on évoque le cas d’enfants dont les différences demandent des conditions particulières. Elodie, maman d’un garçon autiste, appréhende une année à rebondissements : « Le confinement l’a beaucoup perturbé et a accentué ses troubles, alors si l’école ouvre puis referme… » Pour Sandra, maman d’une jeune fille malentendante, les cours à distance seraient préférables au port du masque : « Déjà que la compréhension n’est pas facile pour elle en temps normal, alors sans lecture labiale, j’ai peur qu’elle s’épuise. »

Quelles que soient leurs craintes, tous les témoignages expriment l’impatience de nos lecteurs à savoir comment la rentrée va se dérouler, et beaucoup regrettent le manque de communication de Jean-Michel Blanquer. Ludivine résume : « L’épidémie reprend de la vigueur et pendant ce temps, le ministre de l’Education nationale fait du kayak ! ». Mais l'attente pourrait prendre fin dès ce jeudi soir, lors du passage du ministre au JT.