Déconfinement à Lyon : « L'urbanisme tactique » en faveur des vélos est-il déjà une référence ?
MODES DOUX•77 km de nouvelles pistes cyclables devraient voir le jour dans la métropole de Lyon pour la rentrée prochaineJérémy Laugier
L'essentiel
- La métropole de Lyon a profité du déconfinement pour rapidement adapter son offre d’un millier de kilomètres proposée aux cyclistes.
- Environ 30 km de nouveaux axes temporaires répondent à une demande ayant explosé depuis un mois.
- La crise entraînée par le Covid-19 a clairement mis au centre des enjeux la place des cyclistes à Lyon.
Lyon doit-elle figurer aux côtés de Bogota, New York, Mexico et Berlin dans la liste des grandes villes ayant lancé à toute vitesse des pistes cyclables temporaires pour répondre à la crise sanitaire du Covid-19 ? Une trentaine de kilomètres de nouvelles voies dédiées aux vélos sont en tout cas déjà apparues depuis un mois dans la métropole, qui en annonce au total 77 km pour la rentrée scolaire, afin de compléter ses 1.000 km de réseau cyclable.
« La crise a provoqué un déclic : on a par exemple pu appliquer en urgence rue Duquesne (Lyon 6e) des changements bénéfiques aux vélos qui étaient évoqués depuis des années », confie David Kimelfeld, actuel président de la métropole de Lyon. Une réactivité constatée en fin de confinement au sujet d’autres axes majeurs du centre-ville comme le cours Gambetta, la rue Garibaldi ou l’avenue Jean Jaurès.
« Une accélération phénoménale des aménagements »
« La période a permis d’accélérer de manière phénoménale les aménagements pour les vélos à Lyon, confirme Frédérique Bienvenüe, adhérente active de la Ville à Vélo. Tout le monde semble avoir compris qu’ils coûtaient bien moins cher que des voies pour les voitures. Quasiment tous les aménagements mis en place nous semblent pertinents, et notamment l’avenue Jean Jaurès (Lyon 7e), où l’utilisation forcée des trottoirs jusque-là était dangereuse. »
Adjoint à la ville de Lyon aux nouveaux modes de vie urbains, Alain Giordano tire un bilan plus nuancé de ce « réseau cyclable tactique » : « J’avais demandé qu’on traite en priorité la question des ponts. Hormis celui de la Guillotière où la piste cyclable vient d’être correctement replacée, ce n’est pas normal que les vélos n’aient pas d’autre choix que d’y circuler au milieu des piétons sur les trottoirs. Il y a beaucoup de communication faite dans la précipitation. »
Une prime de 500 euros en cas d’achat de vélo électrique
Via des visioconférences fin avril avec les décideurs politiques, plusieurs associations comme la Ville à Vélo (1.500 membres), qui œuvre depuis 26 ans pour la promotion et de lobbying du vélo à Lyon, se sont retrouvées plus « écoutées » que jamais. Si le bilan actuel est loin des 157 axes suggérés par la Ville à Vélo autour de Lyon, la métropole estime être « la collectivité en France ayant livré le plus de projets cyclables temporaires dans cette période ». A savoir 23 nouveaux axes, contre sept à Nantes et trois à Paris, ainsi qu’une prime conséquente de 500 euros pour les acheteurs, d’ici la fin d’année, d’un vélo à assistance électrique (VAE). Ces projets d'« urbanisme tactique » sont-ils amenés à durer ?
Ils s’inscrivent en tout cas dans une dynamique qui a vu Lyon intra muros passer de 147 à 300 km de pistes cyclables durant le dernier mandat de l’équipe de Gérard Collomb de 2014 à 2020, avant ces nouveautés temporaires pour le déconfinement. « Il faut absolument doubler à nouveau cette progression [de 300 à 600 km] en nous appuyant sur cette période qui a vu les idées se libérer », estime Alain Giordano, soutien de Yann Cucherat pour ces municipales.
« On attend que ces efforts soient pérennisés »
La métropole estime un trafic à 300.000 vélos par jour la semaine passée, contre 200.000 avant la pandémie de Covid-19. A Lyon, les mesures prises sont nombreuses, entre des voies élargies avec un nouveau marquage jaune, l’ouverture aux vélos de certains couloirs de bus et bientôt le passage du « tube modes doux » de la Croix-Rousse au 100 % vélos-piétons, les bus se retrouvant dans le tunnel routier. Autant d’initiatives qui pourraient dépasser le créneau estival. « Je ne suis pas dogmatique sur la question de la place des vélos et on ne s’interdit rien, indique David Kimelfeld, opposé à Bruno Bernard (EELV) et François-Noël Buffet (LR) au second tour des élections métropolitaines. Il faudra observer et s’adapter à la nouvelle donne à la rentrée. »
Une rentrée que suivra de près la Ville à Vélo. « On sait que la suite va dépendre des élections mais on attend que ces efforts soient pérennisés, annonce Frédérique Bienvenüe. Il faut que le vélo continue de prendre de la place aux voitures en ville. Les transports en commun pourraient être surchargés à la rentrée avec le retour des étudiants. Si on revient vite en arrière, cette période n’aura été qu’un gadget politique. »