Marseille : Concours, technicité, passion… La restauration collective est en pleine mutation
GASTRONOMIE•Un concours du meilleur cuisinier de restauration collective était organisé mardi à Marseille au salon « Food in Sud » afin de valoriser l’image de la professionAdrien Max
L'essentiel
- Jérôme Sailly, chef de la restauration collective du cercle mixte de la gendarmerie d’Antibes, a remporté la qualification pour la finale du concours Gargantua.
- Le concours Gargantua honore les chefs de restauration collective pour faire briller la profession qui souffre souvent d’une image négative.
- La filière est en pleine mutation avec la multiplication des circuits courts, les problématiques autour de l’alimentation et la nouvelle loi Egalim.
Une noix de quasi de veau braisée accompagnée d’un jus orangé et pour finir, une aumônière à la crème au citron, pommes et sirop d’agrumes. C’est la chance qu’ont les officiers et sous officiers du cercle mixte de la gendarmerie d’Antibes, dans les Alpes-Maritimes, de pouvoir déguster ce genre de plats au sein de leur cantine. Jérôme Sailly, chef de cette restauration collective, a remporté mardi au salon Food in Sud à Marseille les qualifications pour la finale nationale du salon Gargantua, le concours du meilleur cuisinier de collectivité en gestion directe de France, avec cette recette à 7.10 euros, 40 centimes de moins que la limite imposée.
Après avoir passé 33 ans dans la restauration dite traditionnelle dans le Pas-de-Calais, ce chef a décidé de rejoindre la gendarmerie il y a quatre ans. « Je voulais un peu me poser et élever mes enfants. Je me suis servi de mon expérience en cuisine pour rejoindre la gendarmerie et je fais aussi quelques missions de temps en temps », relate-t-il.
L’envie et la technicité
Il ne voit d’ailleurs pas énormément de différences avec son précédent poste. « L’envie est la même et j’essaye les mêmes choses à travers mes menus. La différence c’est qu’il faut sublimer un produit qui a un coût assez bas. Par exemple si j’ai un poulet congelé, je vais faire en sorte de le faire mariner. On agrémente le produit sans augmenter le coût financier », explique le chef.
Maîtrise des coûts, exigence en termes d’hygiène, lutte contre le gaspillage, équilibre alimentaire sont autant d’aspects qui demandent beaucoup de technicité. « La notion de partage autour du repas reste essentielle même en restauration collective. On dit que la meilleure troupe est celle qui a le mieux mangé. Mais il faut toujours avoir en tête les coûts, et minimiser les volumes pour éviter les pertes. J’essaye de réinjecter ces produits dans d’autres, c’est bon pour la planète », détaille-t-il en savourant sa qualification nationale.
10 millions de repas servis chaque jour
Comme le prouve ce concours, la restauration collective est en pleine mutation, et elle représente un véritable enjeu pour la population comme pour les collectivités puisque 10 millions de repas sont servis chaque jour dans la restauration collective, l’équivalent de la Grèce à nourrir. La restauration collective directe, qui représente 60 % du marché, est celle qui insuffle le plus le changement.
« La technique des chefs est essentielle car il y a des contraintes importantes. Il faut aussi qu’il s’adapte régulièrement en fonction du public. On ne nourrit pas de la même façon des bébés de six mois, un enfant de six ans et une personne âgée de 80 ans », explique Céline Emelin, responsable de la communication chez Restau Co, un réseau de professionnels de la restauration collective.
De nombreux enjeux
L’image vieillotte de la cantinière est en train d’évoluer, et ce concours y contribue. « Ce sont des chefs passionnés qui ont fait ce choix par valeurs. Il y a un lien social très fort dans la restauration collective et beaucoup d’enjeux. L’éducation au goût pour les plus jeunes, l’équilibre alimentaire, parfois il s’agit du seul repas équilibré de la journée pour un enfant, mais aussi la santé. Nous avons un projet pilote avec trois hôpitaux pour accompagner les soins par l’alimentation », relate-t-elle.
La restauration collective est un véritable enjeu pour les pouvoir publics, notamment avec la récente loi Egalim, mais aussi pour les élections municipales. « La restauration collective n’est pas le parent pauvre du secteur. On travaille en circuits courts, on rouvre des légumeries, on fait attention au gaspillage dans la gestion du coût grâce à une éthique environnementale et vertueuse, tout en restant convivial. On met les bouchées doubles pour redonner envie », admet Céline Emelin. De là à créer un Guide Michelin de la restauration collective ?