Lyon : Associations, forces de l'ordre et parquet s'activent pour renforcer la lutte contre les violences conjugales
VIOLENCES FAITES AUX FEMMES•Le procureur de la République de Lyon a détaillé ce mardi un protocole signé par les associations, les forces de l’ordre et le parquet pour améliorer l’accueil et la protection des femmes victimesElisa Frisullo
L'essentiel
- Un plan d’actions a été lancé dans le ressort du TGI de Lyon pour renforcer la lutte contre les violences conjugales.
- Tous les maillons de la chaîne pénale (parquet, police, gendarmerie, associations d’aide aux victimes) sont mobilisés autour d’un même objectif : améliorer la prise en charge et la protection des victimes.
- « 20 Minutes » vous détaille ce qui a changé pour les victimes et les auteurs de violences.
«Nous sommes face à un contentieux de masse qui nécessite une réponse individuelle. Il n’y a pas un dossier qui ressemble à un autre ». Le procureur de la République de Lyon Nicolas Jacquet a dévoilé ce mardi un nouveau plan d’actions contre les violences conjugales mobilisant tous acteurs de la chaîne pénale (associations, forces de l’ordre, services d’insertion et de probation, parquet…) autour d’un seul et même objectif : améliorer l’accueil et la protection des victimes. Des mesures imaginées il y a plusieurs mois, avant même le Grenelle assure le parquet, pour « mieux coordonner les dispositifs existants à toutes les étapes de la procédure, de la plainte de la victime à l’exécution de la peine ». 20 Minutes vous explique ce qu’il faut retenir.
Des faits nombreux en augmentation
En 2018, 1.800 procédures ont été engagées dans le ressort du TGI pour des faits de violences conjugales et quatre femmes sont mortes sous les coups de leurs conjoints, comme cette année. Dans 90 % des affaires pouvant donner lieu à une réponse pénale, le parquet a engagé des poursuites à l’encontre des auteurs de violences ou des mesures alternatives aux poursuites. En 2019, déjà 205 personnes ont été jugées en comparution immédiate pour des violences conjugales, contre 127 en 2018, soit une hausse de 60 % selon le parquet. Les défèrements et mesures d’éloignement des auteurs ont progressé de 40 %, et pour l’heure 28 téléphones Grave danger, remis aux victimes en situation de forte menace, ont été confiés contre 11 l’an passé.
Entre 2018 et 2019, les plaintes ont progressé de 25 %, selon la direction départementale de la sécurité publique du Rhône. Une progression sans nul doute liée à la mobilisation observée en France contre les violences faites aux femmes, à la médiatisation et aux mesures mises en place, comme à Lyon, pour renforcer la lutte. « Cette libération de la parole fait qu’il y a peut-être moins de honte à venir porter plainte aujourd’hui pour une femme, observe Pascale Fournand, en charge de l’aide aux victimes au sein de l'association Le Mas. A Lyon, il y a aussi la volonté d’un parquet déterminé à ne plus laisser passer ».
Plus de mains courantes, une enquête systématique
Désormais, les mains courantes n’existent plus pour ce type d’affaires. « Toute suspicion de violences conjugales donne lieu à une enquête. S’il n’y a pas assez d’éléments ou que la victime ne dépose pas plainte, un procès-verbal de renseignements judiciaires est établi », détaille le procureur Nicolas Jacquet. Autre nouveauté, toute femme qui refuse de porter plainte et pour laquelle il y a une suspicion de violences est mise en contact rapidement avec une association d’aide aux victimes, Le Mas, Viffil ou Lavi selon le secteur du département concerné. « La nouveauté, c’est que ce n’est plus à l’initiative de la victime », souligne le procureur. « Nous allons entrer en contact avec la femme et l’accompagner jusqu’à ce qu’elle accepte de porter plainte et qu’elle soit prête à préparer son départ », ajoute Pascale Fournand. Une étape qui peut prendre plusieurs mois selon les associations, une femme victime quittant en moyenne le domicile conjugal cinq et sept fois avant son départ définitif.
Un référent dans chaque commissariat et brigade
C’est l’une des grandes nouveautés de l’année. Chaque brigade de gendarmerie compte deux référents et chaque commissariat un référent. Ils sont chargés d’accompagner les victimes les plus fragiles. Leur rôle n’est pas d’enregistrer la plainte mais d’être l’interlocuteur privilégié des associations, de leurs collègues ou de la justice en cas de nécessité. « Si par exemple, il y a un problème d’accueil d’une victime au moment du dépôt de plainte, l’association qui accompagne cette femme peut contacter le référent du commissariat ou de la gendarmerie pour régler rapidement la situation. De la même manière, s’il y a violation du contrôle judiciaire par l’auteur ses violences, c’est plus facile d’alerter les forces de l’ordre, de le convoquer ou de l’interpeller », illustre le parquet de Lyon. Pour les associations, la mise en place de référents est une véritable « révolution » permettant aussi de mieux préparer l’accueil des femmes dans les services de police et de gendarmerie, notamment lorsque le chemin jusqu’au dépôt de plainte a été difficile.
Les peines prises en compte plus rapidement
L’une des mesures du plan d’actions vise à intervenir plus rapidement lorsque l’auteur des violences a été condamné à une peine avec sursis et mise à l’épreuve. Jusqu’alors, le délai avant qu’il ne soit convoqué par le service pénitentiaire d’insertion et de probation (Spip) pouvait courir jusqu’à cinq semaines. Aujourd’hui, l’auteur est reçu sous sept jours par le service chargé de veiller au respect des obligations imposées par les juges de l’application des peines. Le Spip est aussi davantage mobilisé aujourd’hui pour identifier et évaluer les détenus présentant des risques de réitération à leur sortie de prison.