Marseille: Des fenêtres antibruit à 1,5 million d'euros installées aux Baumettes, une mesure qui ne satisfait personne
PRISON•L’administration pénitentiaire va installer des fenêtres antibruit à la prison des Baumettes 2 pour éviter les nuisances sur le voisinage, loin d’être rassuré par cette mesureAdrien Max
L'essentiel
- L’administration pénitentiaire a annoncé l’installation de fenêtres antibruit pour éviter les nuisances des détenus auprès du voisinage.
- Eliane Gastaud, riveraine et présidente du collectif des voisins des Baumettes, n’est pas convaincue par cette solution.
- Des associations dénoncent la détérioration des conditions de détention avec cette solution.
Une solution à 1,5 million d’euros et toujours beaucoup de questions. L’administration pénitentiaire a annoncé à la mi-avril l’installation de fenêtres antibruit sur les bâtiments de la prison des Baumettes 2 à Marseille. Un dispositif pour éviter les nuisances engendrées par les détenus sur les voisins de ce bâtiment sorti de terre en 2017.
« Je suis très réservée, nous avons fait des tests sur le bâtiment des hommes et c’est très efficace contre le bruit. Par contre, pour ce qui est de la vue, cela ne change rien au problème », considère Eliane Gastaud, riveraine et présidente du collectif des voisins des Baumettes.
« Beaucoup de bambous ont été achetés pour se cacher »
Eliane ne se sent plus chez elle depuis l’ouverture du nouveau bâtiment des Baumettes, dont les étages supérieurs dépassent du mur d’enceinte. Et notamment le quartier pour les femmes. « Les fenêtres des cellules sont séparées de trois mètres. Du coup elles se parlent, quand c’est la journée ça va, mais les disputes à 1 heure du matin c’est l’enfer. Et ne parlons pas de quand elles nous apostrophent. Elles ont la vue sur nos jardins, nos habitations, on est constamment épiés. Beaucoup de bambous ont été achetés dans le quartier pour se cacher », relate la riveraine.
Après une rencontre entre le collectif et Nicole Belloubet, la ministre de la Justice, cette solution de fenêtres antibruit a été choisie. « C’est un énorme cadeau, vous vous imaginez, il y en a pour 1,5 million d’euros, quand la construction des Baumettes 3 est chiffrée à 80 millions. Mais le problème c’est la conception. Les Baumettes sont installées dans une ancienne carrière de calcaire, tous les bruits résonnent », regrette-t-elle.
Une dégradation des conditions de détentions
Philippe Dieudonné, de la ligue des droits de l’Homme, dénonce aux côtés de plusieurs associations, une dégradation des conditions de détention. « Ce dispositif coûteux va assombrir les cellules, mais aussi couper la ventilation. Quand les détenus vont ouvrir le tiers possible de leurs fenêtres, des clapets métalliques vont se rabattre pour empêcher le bruit de passer, mais aussi l’air. Cela va forcément influencer leur comportement », dénonce-t-il.
Eliane Gastaud, rejoint, à titre personnel, cette inquiétude. « Les cellules sont exposées à l’ouest, les détenues ont le soleil en pleine figure de 16 heures à 22 heures en été. L’an passé, il a fait 31 degrés dans les cellules, avec les fenêtres ouvertes. Je m’inquiète de leur sort avec ces fenêtres antibruit, elles vont finir par tout casser », avance-t-elle.
Pour cette riveraine, la solution est de surélever le mur d’enceinte quand Philippe DIeudonné préconise une végétalisation de celui existant. « De toute façon, on dit souvent que quand les Baumettes 3 arriveront, les Baumettes 2 seront dans le même état que les Baumettes historiques », prévient la riveraine.