VIDEO. Marseille: «La mairie est complètement incompétente» dans sa gestion de l'habitat indigne
MAL LOGEMENT•Le Haut comité pour le logement des personnes défavorisées a annoncé un rapport sur l’habitat indigne en France, avec un zoom particulier sur Marseille et la Seine-Saint-DenisAdrien Max
L'essentiel
- Le Haut comité pour le logement des personnes défavorisées a annoncé ce mercredi à Marseille le lancement d’un rapport national sur l’habitat indigne et insalubre en France.
- Les membres du Haut comité feront un éclairage particulier sur la situation à Marseille et en Seine-Saint-Denis.
- Selon leurs premiers constats, la gestion de l’habitat indigne, comme de la crise qui a suivi le drame de la rue d’Aubagne, est marquée d’incompétences.
«Je suis frappé de voir à quel point les autorités sont dans le déni de leurs responsabilités alors que la police du maire concernant ces compétences date de 1830 ! Ils n’ont jamais rien fait, il y a un vrai manque de volonté politique. Cela concerne aussi l’Etat via l’agence régionale de santé », constate Christian Nicol. C’est la première fois que l’auteur d’un rapport sur l'habitat indigne à Marseille en 2015 revient dans la ville, depuis le drame de la rue d’Aubagne, emportant dans la chute de deux immeubles la vie de huit personnes début novembre.
S’il revient à Marseille, c’est en sa qualité de membre du Haut comité pour le logement des personnes défavorisées. Celui-ci a annoncé ce mercredi matin le lancement d’un rapport sur l’habitat indigne en France. « Nous avons choisi d’orienter ce rapport sur le logement insalubre et indigne car il tue. De façon violente, comme à Marseille, mais aussi de façon sournoise avec des maladies », a détaillé Marie-Arlette Carlotti, présidente du Haut comité et également conseillère municipale PS à la mairie de Marseille. Entre 450.000 et 600.000 logements sont concernés en France, soit environ un million de personnes.
« Pas besoin de faire croire qu’il faut de nouvelles lois »
Le drame de la rue d’Aubagne a mis en lumière cette problématique du mal-logement dans la France entière. « Nous souhaitons partir du terrain, en rencontrant les associations, en discutant avec les citoyens, en rencontrant le préfet, la mairie. Nous le lançons à Marseille mais cet éclairage sera également réalisé en Seine Saint-Denis », a précisé l’ancienne ministre déléguée à la lutte contre l’exclusion.
« On sait qu’à Paris le problème a été abordé au début des années 2000. Depuis 1.000 immeubles ont été traités. Pourquoi est-ce fait à Paris, et pas à Marseille ? », s’interroge Christophe Robert, délégué général adjoint de la fondation Abbé Pierre. »
Pour Christian Nicol, « l’appareil législatif existant est suffisant, pas besoin de faire croire qu’il faut de nouvelles lois comme le prétend Bruno Gilles, sénateur marseillais ».
Incompétence criante
Les premiers constats, après une rencontre avec le préfet de région Pierre Dartout et différentes associations mobilisées depuis le drame de la rue d’Aubagne, sont sans appel quant à la gestion de la crise par la ville de Marseille. « On ne sait même pas précisément combien de foyers sont à reloger, et la ville les oblige à passer par des associations, comme si elle ne pouvait pas gérer seule. Selon plusieurs témoignages, le contingent de logements sociaux dont dispose la ville n’est même pas fléché vers les sinistrés, ils en gardent pour leur logique clientéliste. La mairie est complètement incompétente », avance Christian Nicol, pour qui un chapitre du rapport pourrait être consacré à cette gestion de crise.
« Il y a un manque d’intelligence et de réponse dans cette gestion de crise. Heureusement qu’il y a des collectifs citoyens qui font face, seuls, à cette situation. Il faut absolument soutenir les victimes, et ceux qui les aident », considère Christophe Robert. L’urgence pointe avec la fin de la trêve hivernale (le 31 mars), et la reprise des expulsions, avec la menace d’un « tri » des victimes. « L’été approchant, les hôtels vont également probablement vouloir récupérer les chambres pour les touristes », estime Marie-Arlette Carlotti.
Mise en garde sur les logements sociaux
Pour Christophe Robert, la problématique de l’habitat indigne rejoint la politique sociale, notamment en matière de logement. « Quand vous voyez que certains arrondissements de Marseille culminent à 40 % de logements sociaux et que d’autres ne sont qu’à 2 % », fait-il remarquer. Le préfet a d’ailleurs mis en garde la métropole quant au prochain Plui, dans lequel la place des logements sociaux n’est pas assez importante.
Le Haut comité a prévu de revenir rapidement à Marseille afin de continuer de rencontrer habitants et collectifs, mais aussi la mairie. Le rapport ne devrait pas être rendu au Premier ministre avant la rentrée 2019.