TEMOIGNAGESOn a compilé les remarques racistes auxquelles vous faites face en 2019

«Les Arabes, tous des voleurs», «Tching tchong»... On a compilé les remarques racistes auxquelles vous faites encore face en 2019

TEMOIGNAGESA l'occasion de la Journée internationale pour l'élimination des discriminations raciales ce jeudi, 20 Minutes vous a demandé à quelles remarques racistes vous êtes confrontés
Florence Floux

F.F.

Propos injurieux à l'encontre des Réunionnais, rapport sur l'augmentation des actes antisémites, l’humoriste Yassine Belattar traité de « pourriture d'islamiste » sur Twitter… L’année 2019 commence fort en ce qui concerne l’intolérance. A l’occasion de la journée internationale pour l’élimination des discriminations raciales ce jeudi, 20 Minutes vous a demandé à quelles remarques et situations de racisme ordinaire vous devez encore faire face aujourd’hui en France. Les réponses ont afflué… En voici un aperçu.

Il y a d’abord les phrases qui se veulent « humoristiques », mais qui, note Sarah, « ne font rire que la personne qui les formule » : « C’est bien connu que les Arabes volent », « quand est-ce que tu nous fais un couscous ? », relate Sara, ou bien : « Ah ben on te voit plus quand on éteint la lumière, ah ah ah », se souvient Anaïs, ou encore « tu manges du chien ? », « Tching tchong », énumèrent Barbara et Ailin.

« Change la photo de ton CV, on voit trop que tu es juive »

Et puis bien sûr il y a les remarques qui ne s’abritent même plus derrière l’humour et relèvent au mieux d’une méconnaissance crasse, au pire, de racisme. Comme celle citée par Hanane : « D’origine marocaine, j’ai le droit de la part de mes collègues à : "Ça se passe comment chez vous, vous mangez avec les doigts ? Est-ce que ton mari te laisse sortir le soir ?" »… Ou « Change la photo de ton CV, on voit trop que tu es Juive », confie Alexandra, qui assure que « ce n’est qu’un exemple parmi tant d’autres qui prouve à quel point les stéréotypes physiques sur les Juifs persistent ».

Sandrine ne compte plus les remarques racistes du quotidien auxquelles elle et sa famille, originaires des Antilles ont eu droit, lorsqu’ils sont arrivés en Bretagne : « Vous vous exprimez bien en français quand même », « Vous vous habillez comment là-bas ? Avec les mêmes vêtements que nous ? », « De quel côté de l’Afrique se trouve la Guadeloupe ? »

N’aurait-il pas fait partie du commando du 13-Novembre ?

Anaïs énumère également les réflexions récurrentes : « Les gens qui te disent que c’est "cliché" que tu sortes avec un Noir, alors qu’eux-mêmes sont blancs et en couple avec des Blancs, […] ou les questions malveillantes quand je fais des rajouts : "Mais tu te laves les cheveux quand même ?" »

Beaucoup s’indignent d’être toujours renvoyés à des origines plus ou moins lointaines (voire imaginaires pour certains) : Sarah et Myriam en ont marre qu’on leur dise « dans ton pays », pour parler de l’Algérie ou du Maroc. Idem pour Gérald, dont la famille vient des Antilles mais qui a grandi en Picardie : « "Tu dois être tellement mieux là-bas, tu veux pas y retourner ?", "Tu sais cuisiner les plats des Antilles ?" (ma mère m’a élevé à la quiche lorraine, au gratin dauphinois et à la choucroute…) »

Camille, Strasbourgeois d’origine africaine, se souvient qu’on lui a déjà dit qu’il « parlait mal le français », alors qu’il est né en France et « ne parle pratiquement pas sa langue d’origine ». Flo se remémore des remarques comme « tu fais honneur à tes origines, tu travailles comme une Chinoise », et Nassim la fois où ses collègues se sont demandé s’il faisait partie du commando du 13 novembre car il ne travaillait pas les jours suivant, vit à Montreuil ( où l’on avait retrouvé une des voitures des terroristes le lendemain des attaques) et qu’il est d’origine algérienne et musulman…

« Je ne prends pas de femme voilée »

Il y a évidemment les situations blessantes de la vie de tous les jours, comme le raconte Mehdi. « Mon épouse réserve un covoiturage et précise au téléphone à la conductrice qu’elle ne peut pas la rater car elle porte un foulard. La conductrice ne vient pas, nous décidons de la recontacter : "Je ne prends pas de femme voilée", explique-t-elle. »

Tous les secteurs sont représentés dans vos témoignages, comme celui de la santé par exemple : Caméllia narre un mal de ventre qui la pousse à se rendre à la maison médicale de sa ville. « Là le médecin m’annonce que c’est sûrement parce que je mange trop de harissa… Petite, alors que j’avais mal au ventre, le médecin avait déjà dit à ma mère que "j’avais la maladie du couscous"…»

« C’est bon madame vous pouvez repartir, la poubelle est vide… »

Charlène de son côté nous raconte une expérience au travail : « Je suis médecin, originaire du Togo et du Bénin, quand je suis allée dans le bureau de la DRH pour signer mon contrat, en entrant dans son bureau j’ai à peine eu le temps de lui dire bonjour, elle m’a coupée la parole s’est penchée pour me montrer la poubelle : c’est bon madame vous pouvez repartir, la poubelle est vide… » Elle a également rencontré des problèmes pour se loger, comme beaucoup d’autres internautes qui nous ont écrit. Pas forcément de soucis au téléphone mais le malaise quand ils se présentent pour visiter l’appartement…

Pour Dorian, c’est ce racisme systémique, dans les faits, qui est le plus problématique : « Le véritable racisme ordinaire, c’est pas " tu parles africain ? ", c’est plutôt des caméras cachées qui montrent que des agences immobilières rejettent des Noirs, des films français avec peu de Noirs, d’Asiatiques sauf s’ils sont comiques car sinon "le public n’adhère pas". C’est un taux d’emploi plus faible. Bref c’est ce qui n’est pas dit, ce qui est parfois même inconscient qui est devenu la "normalité". »

Ailin confirme : « A cause de ce racisme ordinaire contre les Asiatiques, j’ai passé mon enfance à déprimer. C’est aussi à cause de cela que mon niveau de français n’a pas progressé car mes camarades de classe se moquaient de mon accent. » Quant à Jessica, métisse, elle a tellement souffert de l’intolérance, qu’elle s’est détestée pendant des années. « Toutes ces moqueries, cette méchanceté gratuite, m’ont détruite à l’adolescence. J’étais tellement traumatisée que je n’ai aucune photo de moi datant de cette époque, je ne me supportais plus. En grandissant, j’ai compris que le problème ne venait pas de moi, mais de ces gens qui manquent d’ouverture d’esprit et de culture. »