VIDEO. Affaire Barbarin : «Le Pape est en train de détruire l’Eglise...» Les victimes consternées du refus du Pape d’accepter la démission du cardinal
PEDOPHILIE DANS L'EGLISE•Le Pape François a refusé ce mardi la démission du cardinal Barbarin mais lui a demandé de se mettre en « retrait » quelque tempsCaroline Girardon
L'essentiel
- La décision du Pape François de refuser la démission du cardinal Barbarin a provoqué de vives réactions.
- Les victimes, qui avaient assigné l’archevêque de Lyon devant la justice pour non-dénonciation d’agressions pédophiles, se disent « scandalisées ».
- Elles dénoncent un double discours et vont même jusqu’à critiquer « la malveillance » de l’Eglise.
La décision du Pape François de refuser mardi la démission du cardinal Barbarin a provoqué une onde de choc parmi les victimes d’actes de pédophilie et les observateurs de l’Eglise.
« C’est incroyable », réagit, estomaqué, François Devaux, fondateur de la Parole Libérée pour lequel il s’agit de « l’erreur de trop ». « Quelque part, cela nous donne raison sur toute la ligne, sur ce que l’on dit depuis le départ, à savoir que le Pape est en train de détruire l’Eglise ». « Cette décision va avoir des conséquences catastrophiques », prédit-il. Et d’argumenter : « L’humanité entière constate désormais que le Pape n’est pas en phase avec les valeurs qu’il prône… Personne n’y comprend rien ».
« Un Pape louvoyant »
« En bon jésuite, le Saint-Père est louvoyant. Il fait un pas en avant et deux en arrière », enchaîne Christian Terras, fondateur de la revue progressiste «Golias », rappelant que le souverain Pontif avait exigé « une tolérance zéro » à l’égard des prêtres pédophiles en ouverture du sommet sur les abus sexuels, qui s’est tenu le 22 février à Rome. « Mais d’un autre côté, il refuse de condamner ceux qui les couvrent ou ne les ont pas dénoncés. D’un point de vue moral et éthique, cette décision est scandaleuse et désolante », poursuit-il, accusant le Pape de « jouer sur le droit ».
De son côté, Pierre-Emmanuel Germain-Thill, un autre porte-parole de la Parole Libérée, n’est « pas étonné » même s’il « reste scandalisé ». « Cette décision vient ajouter encore plus d’huile sur le feu, lâche-t-il. L’Eglise ne veut pas se réformer malgré le fait que de nombreux fidèles soient atterrés par son mode de fonctionnement. Elle ne prend aucune décision ferme, ne mène aucune action. Au final, rien ne bouge malgré les effets d’annonce et c’est une souffrance supplémentaire pour les victimes, un manque de respect ».
« La défense de l’Institution l’emporte sur la défense des victimes »
« Le Pape n’envoie pas un signe fraternel de compassion. La défense de l’Institution l’emporte sur la défense des victimes. Elle ne prend pas à bras-le-corps la question de la pédophilie. Le message envoyé n’est ni chrétien ni évangélique, analyse Christian Terras. A partir du moment où il laisse le cardinal Barbarin sur son siège, il cautionne quelque part les abus du chœur ».
« Les derniers espoirs se sont ainsi effondrés », abonde François Devaux. Et d’insister : « L’Evangile a enfanté un Alien. Les gens vont commencer à comprendre que l’Eglise est malveillante, qu’elle ne respecte rien, ni le droit canonique, ni même l’Évangile. A mes yeux, le Pape est coupable. Si les gens ne l’entendent pas, voici une démonstration de plus ».
Situation « inédite »
De son côté, la Conférence des évêques de France s’est « étonnée » de la situation « inédite du cardinal Barbarin ». Une situation qui résulte selon elle d'« un conflit entre deux exigences », celle de « respecter le cheminement de la justice » et celle de « se préoccuper du bien du diocèse de Lyon ».
Le cardinal Barbarin va se mettre « en retrait » pour quelque temps, laissant temporairement la place au vicaire général, Yves Baumgarten. Il reste archevêque de Lyon. « Accepter la démission du cardinal n’a pas paru opportun au Pape, vu que le procès civil n’est pas terminé », argumente Mgr Pontier, interrogé par l’AFP.
Le 7 mars, l’archevêque de Lyon a été condamné à six mois de prison avec sursis par le tribunal correctionnel de Lyon pour ne pas avoir dénoncé auprès de la justice les agressions pédophiles du père Preynat. Le cardinal et le parquet de Lyon avaient tout deux fait appel de cette décision.