PEDOPHILIE DANS L'EGLISE«Le cardinal ne peut pas continuer à occuper son poste», selon les victimes

VIDEO. Affaire Barbarin: «Le cardinal ne peut en aucun cas continuer à occuper son poste», estiment les victimes

PEDOPHILIE DANS L'EGLISEAprès la condamnation du cardinal Barbarin, ce jeudi matin, les victimes ont fait part de leur grande satisfaction et ont estimé que le cardinal ne pouvait pas rester en poste après un tel jugement
Elisa Frisullo

Elisa Frisullo

L'essentiel

  • Ce jeudi matin, le cardinal Barbarin a été condamné à six mois de prison avec sursis devant le tribunal correctionnel de Lyon.
  • Une décision très attendue par les anciens scouts de la Parole Libérée qui reprochaient au Primat des Gaules de ne pas avoir dénoncé les agissements pervers du père Preynat, dont il avait connaissance.
  • Les victimes attendent désormais de l’archevêque qu’il prenne ses responsabilités et qu'il quitte son poste au sein de l’Eglise.

EDIT: Le cardinal Barbarin a annoncé ce mercredi à 13 heures qu'il allait remettre sa démission au pape.

A la sortie de la salle d’audience, Pierre-Emmanuel, sourire de satisfaction aux lèvres, affiche un air détendu. « Je me sens soulagé. Je suis content pour nous. Mais également pour les victimes d’autres affaires qui n’ont pas encore osé parler en pensant que la justice ne les entendrait pas », confie le jeune homme qui, aux côtés de huit autres plaignants, accusait le cardinal Barbarin de non-dénonciation d’agression sexuelle sur mineurs.

Contre toute attente, la justice lui a donné raison, en condamnant ce jeudi matin l’archevêque de Lyon à six mois de prison avec sursis pour ne pas avoir dénoncé à la justice les agissements pédophiles du père Preynat, dont il avait connaissance. Et ce, alors qu’à la fin du procès début janvier, la procureure Charlotte Trabut n’avait pas requis de peine à l’encontre de Philippe Barbarin, ni des cinq autres membres de l’Eglise présents à ses côtés sur le banc des accusés et relaxés ce jeudi.

« Nul n’est au-dessus des lois »

« On voit que la justice divine n’est pas exactement la même que la justice des hommes. Cela envoie un signal assez fort que nul n’est au-dessus des lois », a pour sa part réagi peu après l'énoncé de la condamnation François Devaux, cofondateur La Parole Libérée. L'association, composée d'anciens scouts, avait fait ressurgir du passé, début 2016, les agissements présumés du père Bernard Preynat.

« Si on est allés dans ce recours, c’est qu’on avait la conviction d’être fondés dans cette démarche. Beaucoup nous ont parlé d’acharnement, on a bien vu qu’on n’avait pas une grande écoute de la part du parquet. Mais aujourd’hui, on est entendu par le tribunal, c’est l’aboutissement d’un long parcours. C’est une victoire qui envoie un signal très fort à beaucoup de victimes, qui montre qu’elles sont entendues, écoutées », a ajouté l’ancien scout de Sainte-Foy-lès-Lyon, soucieux désormais que le cardinal prenne ses responsabilités.

«Il n'est pas conscient de la gravité des faits qui lui sont reprochés»

« L’Eglise fait ce qu’elle veut depuis toujours. On a beau lui dire les choses, elle ne les entend pas. Mais il semble évident, et on n’avait pas besoin de la décision de la justice pour le savoir, que le cardinal ne peut en aucun cas continuer à occuper son poste, car il est dans uns situation d’orateur, de directeur de conscience, et a priori absolument pas conscient de la gravité des faits qui lui sont reprochés », a ajouté le président de La Parole Libérée. « Il n’y a que deux personnes qui peuvent prendre cette décision : le cardinal Barbarin et le Pape. Visiblement, le Pape n’est pas enclin à prendre ce genre de décision. Est-ce que, de lui-même, le cardinal reconnaîtra qu’il ne peut plus continuer à occuper ses fonctions? Je n’en sais rien ».

Convaincu également de l’obligation de démission de l’archevêque, Pierre-Emmanuel Germain-Till attend également de cette condamnation qu’elle accélère la justice divine. « L''Eglise va devoir accélérer les choses, à commencer par le procès canonique engagé à l’encontre de Bernard Preynat », espère-t-il. Le curé, mis en examen pour agressions sexuelles sur mineurs en janvier 2016, n’a toujours pas été jugé au pénal. Et le procès canonique engagé par l’Eglise à son encontre, suspendu puis relancé, traîne en longueur.

Le cardinal doit s’exprimer à 13 heures

Absent au palais de justice ce jeudi matin, le cardinal Barbarin a prévu de s’exprimer sur sa condamnation à 13 heures. Dès le rendu du jugement, ses avocats ont fait part de leur volonté de faire appel. « La motivation du tribunal ne me convainc pas. Nous allons donc contester cette décision par toutes les voies de droit utiles », a indiqué Jean-Félix Luciani, en relevant qu’il « était difficile pour le tribunal de résister à une telle pression avec des documentaires, un film… Ça pose de vraies questions sur le respect de la Justice », a-t-il relevé. Reste à savoir si l’archevêque de Lyon adoptera la même posture ou annoncera une décision bien différente.