SOCIETEQui sont les Loups noirs alsaciens, tag vu dans le cimetière juif profané?

VIDEO. Profanation d'un cimetière juif en Alsace: Qui sont les «Loups noirs alsaciens»?

SOCIETEL’inscription « Elsassiches schwarzen wolfe », soit « Loups noirs alsaciens », a été découverte sur une des nombreuses tombes profanées à Quatzenheim, mardi
Alexia Ighirri

Alexia Ighirri

L'essentiel

  • Au milieu des nombreuses tombes juives profanées au cimetière de Quatzenheim (Bas-Rhin), une inscription « Elsassiches schwarzen wolfe » soit « Loups noirs alsaciens » a été découverte le 19 février.
  • Il s’agit d’une référence à un ancien petit groupe autonomiste et terroriste alsacien actif dans les années 1970. Les « Loups noirs » ont été les auteurs d’un incendie dans l’ancien camp de concentration du Struthof mais aussi d’une double destruction contre une croix de Lorraine à Thann.

Parmi les tombes profanées au cimetière israëlite de Quatzenheim, village situé au nord-ouest de Strasbourg dans le Bas-Rhin, l’une a été recouverte d’un tag à la bombe bleue. On pouvait y lire « Elsassiches schwarzen wolfe », soit après traduction « Loups noirs alsaciens ». Une inscription qui, de l’avis de plusieurs personnes sur place mardi 19 février, a étonné.

Qui sont les « Loups noirs alsaciens » ?

Il s’agit d’un groupe autonomiste et terroriste alsacien, trois leaders et moins d’une dizaine de membres, actif à la fin des années 1970. Les « Loups noirs » ont notamment été les auteurs d’un incendie en 1976 du musée à l’ancien camp de concentration du Struthof (Bas-Rhin). Visant les symboles de la France en Alsace, ils ont détruit, par deux fois à l’explosif, une croix de Lorraine, symbolisant la résistance française, à Thann en 1981 (Haut-Rhin). La même année, les autonomistes, alors âgées de la cinquantaine, sont arrêtés. Ils seront jugés et condamnés à des peines de prison en 1982.

Leurs actions n’ont ni blessé ni tué. Philippe Breton, directeur éditorial de l’Observatoire de la vie politique et sociale en Alsace (Ovipal) résume : « Ce sont des autonomistes radicaux, des gens violents, mais d’un “terrorisme soft” si on peut dire cela ainsi au vu de leurs actes, qui étaient à la marge du mouvement autonomiste mais aussi issus d’une mouvance autonomiste qui avait collaboré avec les nazis pendant la guerre. Ils sont marqué idéologiquement de ce point de vue là aussi. »

Est-ce qu’ils sont toujours actifs ?

Le dernier membre fondateur des « Loups noirs » encore en vie, Pierre Rieffel, est aujourd’hui nonagénaire. Le groupuscule n’est plus actif et la profanation de Quatzenheim n’est pas forcément signe d’une réactivation. « Il ne faut pas s’imaginer une reconstruction d’un groupe terroriste qui avait disparu, assure Philippe Breton. On ne connaît pas toujours parfaitement sa région, mais j’observe ces choses : je n’ai aucun signal, même faible, d’une remontée ou reconstitution d’un groupe de ce genre. »

Le sociologue fait part de sa « surprise. Ça ne veut pas dire qu’il n’y a pas chez l’une ou l’autre personne ce fantasme. Mais comme on ne sait rien sur les auteurs, l’intention, il y a toujours l’hypothèse d’une fausse piste, d’une volonté de brouiller les pistes. »

Qui peut se retrouver dans cette référence ?

Si l’ancien groupuscule autonomiste n’est plus actif, ses idées peuvent-elles être reprises ? Un drapeau avec un loup avait été aperçu dans des manifestations contre la fusion de l’Alsace avec la Lorraine et la Champagne-Ardenne au moment de la réforme territoriale. Le fondateur historique du mouvement Pierre Rieffel avait été invité par le Bastion social de Strasbourg l’été dernier : il avait alors expliqué s’être rétracté « ne voulant pas faire partie de “l’extrême droite” ».

Le nom d'un vieux groupuscule autonomiste alsacien (Les loups noirs) a été taggé dans la nuit sur une des tombes du...

Posted by Guillaume Krempp on Tuesday, February 19, 2019

L’accès à ce contenu a été bloqué afin de respecter votre choix de consentement

En cliquant sur« J’accepte », vous acceptez le dépôt de cookies par des services externes et aurez ainsi accès aux contenus de nos partenaires.

Plus d’informations sur la pagePolitique de gestion des cookies

« Pour l’instant, il n’y a pas de revendication. Or les terroristes agissent pour qu’on parle d’eux. Là, il n’y a même pas de revendication fantaisiste », rappelle le sociologue, qui « n’exclut pas la possibilité néo-nazie, dont des groupuscules étrangers ont fait parler d’eux dans la région en organisant des réunions dans les Vosges ». Et puis, « il y a toujours une sensibilité autonomiste en Alsace. Mais, contrairement à avant, elle s’est un peu gauchisée », juge-t-il, soulignant par ailleurs qu’Unser Land (principal parti autonomiste alsacien) a immédiatement condamné la profanation du cimetière israélite de Quatzenheim. « Ces agissements sont aux antipodes des valeurs alsaciennes et de nos convictions. […] La revendication truffée de fautes trouvée au cimetière profané renvoyant à un quelconque mouvement identitaire est incongrue et imbécile », a réagi Unser Land par communiqué.