Marseille: «Je viens leur dire au revoir», la mairie va détruire deux immeubles qui menacent de s’effondrer
DEMOLITION•Deux immeubles qui menacent de s’effondrer dans le quartier de Noailles vont être détruits après une décision de la mairieAdrien Max
L'essentiel
- Deux immeubles de la rue de la Palud à Marseille vont être détruits sur décision de la mairie.
- Le numéro 41 présente les mêmes risques que celui qui s’est effondré rue d’Aubagne le 5 novembre dernier.
- Ces immeubles sont emblématiques de cette rue auparavant l’une des plus animées de Marseille.
Beaucoup de curieux dans la rue de la Palud, à Marseille, depuis que la nouvelle a été rendue publique. Deux immeubles, les numéros 41 et 43, vont être démolis après un arrêté de péril imminent pris par la mairie le 20 janvier, comme le rapporte Marsactu. Le numéro 43 souffre des mêmes symptômes que l’immeuble de la rue d’Aubagne qui s’est effondré le 5 novembre dernier, entraînant la mort de huit personnes. L’arrêté prescrit des travaux pour « éviter le basculement, la déformation de la structure et l’amplification de l’affaissement des deux murs mitoyens ».
Il fait surtout état d’un « potentiel effondrement du 41, et dans sa chute l’embarquement de la structure des immeubles mitoyens » les 39 et 43 de la rue. Raison pour laquelle la mairie a décidé la « déconstruction » de ces immeubles aux pieds d’argile. Des maux dont souffrent le 43 depuis 2012, et un premier arrêté de péril. Au total, une vingtaine de familles vont, ou ont été, évacuées de ces immeubles, qui seront démolis dans les jours à venir, et de ceux aux alentours.
Comme un proche à qui l’on viendrait rendre une dernière visite, beaucoup de badauds viennent contempler ce bout d’histoire de Marseille, qui vit ses dernières heures. « Je suis venu leur dire au revoir », explique simplement Dominique à 20 Minutes.
« L’une des rues les plus animées de Marseille »
Elle vit dans le quartier depuis les années 1970. « Mon père avait son atelier d’artiste rue Chateauredon, à quelques dizaines de mètres. Il y avait beaucoup d’artistes dans cette rue, des tapissiers de meubles. Ce quartier, c’est toute ma jeunesse, c’était l’une des rues les plus animées de Marseille. Voir notre patrimoine partir à cette vitesse, ça me fait peur », témoigne-t-elle, assise sur un bloc de béton censé délimiter la zone de sécurité.
Selon les données de la Bibliothèque nationale de France, madame Moisson était repasseuse au numéro 41, Gustave Bonnet, y vendait des chocolats en 1900 tout comme le médecin spécialiste Mangin y consultait ses patients au début du XXe siècle. Au 43, Joseph Pujol était tapissier en 1852, Nicolas Signoret, professeur de piano en 1885 et monsieur Hermann, vendait des broderies orientales en 1914. Demain, ces deux numéros ne seront plus rien.
« Ça doit être bon signe »
Du sable a été disposé aux pieds des immeubles dès mercredi pour amortir leur chute, pourtant personne ne sait vraiment quand leur mort est programmée. La fille de Denis a acheté un appartement au numéro 39 en septembre dernier. « Ils n’ont pas mis de sable devant l’immeuble de ma fille, ça doit être bon signe, est-il obligé de déduire. Ils ont été évacués la semaine dernière, mais depuis aucune nouvelle. Je dois aller à la réunion de ce [jeudi] soir parce que ma fille est en stage en Afrique. »
Lassés par cette situation, les quelques commerçants des alentours encore présents ne veulent plus s’exprimer : trop fatigués, mais ils refusent le terme « peur ». Alors que plus de 2.000 personnes ont été évacuées de leurs domiciles depuis le 5 novembre, la mairie prévoirait la destruction de deux autres immeubles dont elle est propriétaire. Tout cela alors qu’une nouvelle marche, la seconde, « Pour le logement et le droit à la ville » s’élancera samedi du Vieux-Port à 14h.