VIDEO. Levothyrox: Pourquoi l'audience au civil de lundi est capitale?
AUDIENCE•Le dossier de 4.113 plaignants sera examiné lundi par le tribunal d'instance de Lyon...Caroline Girardon
L'essentiel
- Le procès au civil du dossier Levothyrox se déroule ce lundi à Lyon.
- 4.113 plaignants se sont constitués partie civile.
- Il s’agira pour le tribunal de dire si le laboratoire Merck a commis une faute en ne prévenant pas que la formule de son médicament avait changé.
- Il devra aussi se déterminer sur le préjudice moral subi par les patients.
Une première audience à la portée symbolique. Le procès au civil de 4.113 plaignants de toute la France ayant attaqué le laboratoire pharmaceutique Merck pour ne pas leur avoir signalé que la formule du Levothyrox avait changé, se déroulera ce lundi à Lyon. Compte tenu de l’affluence attendue, le tribunal d’instance a été « délocalisé » au Double Mixte de Villeurbanne. 400 personnes devraient y assister.
« L’affaire n’a rien à voir avec le volet pénal du dossier qui est instruit à Marseille », expose en préambule Christophe Leguevaques, l’avocat du collectif de patients. Et de préciser : « Cette audience est capitale car pour la première fois, la justice va devoir dire si oui ou non, la dignité des malades a été bafouée. Jusque-là, des expertises ont été menées mais aucun juge ne s’est encore prononcé sur la question ».
Défaut d’information ?
L’enjeu de l’audience sera de savoir si Merck a fait preuve de défaut d’information en ne précisant pas que la formule de son médicament avait évolué. Et en ne prévenant pas non plus les principaux intéressés. Il s’agira également de déterminer si les plaignants ont subi un préjudice moral.
« Seule une condamnation leur permettra de retrouver cette dignité qu’ils ont perdue », poursuit Christophe Leguevaques, ajoutant que 10.000 euros de dommages et intérêts seront demandés pour chaque malade. « Perdre 41 millions d’euros va sûrement agacer Merck mais pour un groupe comme celui-ci, ce n’est pas grand-chose. Cela sera avant tout symbolique… Mais lourd de conséquence ».
« Au bout de vingt jours, ma vie est devenue un enfer sur terre »
Raphaëlle, âgée de 37 ans, souffrant d’hyperthyroïdie, attend de voir son préjudice reconnu. « On ne peut pas voler la vie des gens comme cela, ni se servir d’eux comme des cobayes, lance-t-elle, remontée. Au bout de vingt jours, ma vie est devenue un enfer sur terre ».
Le cauchemar a duré quatre mois. En juillet 2017, elle remarque que la boîte de médicaments, qu’elle prend depuis 15 ans, a changé de couleur et demande des précisions à la pharmacie. « On m’a répondu que le dosage restait le même ». Rassurée, elle poursuit son traitement avant de perdre rapidement pied. Dix kilos supplémentaires en un mois. Des poussées d’urticaire, d’eczéma. Ses cheveux commencent à se détacher par plaque de son crâne. Mais le pire n’est pas là.
Grande fatigue et troubles neurologiques
« J’étais complètement exténuée en dormant pourtant douze à quatorze par jour. Il fallait que je me motive deux heures avant de pouvoir me lever pour aller aux toilettes. Je ne pouvais pas effectuer plus de 20 mètres par jour », témoigne-t-elle. Son compagnon est obligé de la laver car elle est désormais incapable de se tenir debout. « Je voulais avoir un bébé par PMA. J’ai été exclue du programme », poursuit Raphaëlle. Sans compter l’impossibilité de travailler et les clients qui lui tournent le dos. Les troubles neurologiques ont fait ensuite leur apparition.
« J’avais perdu le sens du mot. C’était devenu compliqué de parler. Je pouvais identifier des objets mais je ne me souvenais plus de leur nom. Franchement, le ciel m’est tombé sur la tête ». Un matin, elle se retrouve « paralysée du bassin jusqu’aux pieds ». Sa tension, habituellement basse, monte à 22. « J’ai vraiment cru que j’allais mourir », confesse la trentenaire qui finira par abandonner son traitement, contre l’avis de ses proches. Le défi ensuite a été de trouver l'ancienne formule : « Le problème est que ces médicaments sont vitaux pour moi. Si je n’en prends pas, je crève… »