L’armée française, cible d'intox autour des «gilets jaunes»

Quand l’armée française est ciblée par des intox autour des «gilets jaunes»

FAKE OFFPlusieurs intox liant l'armée française aux «gilets jaunes» rencontrent un grand succès sur les réseaux sociaux...
Alexis Orsini

Alexis Orsini

L'essentiel

  • Des militaires ont-ils soutenu les « gilets jaunes » le 17 novembre ? L'armée française déploie-t-elle des blindés pour mieux lever les blocages ?
  • De nombreuses intox circulent sur les réseaux sociaux autour de l'armée et des « gilets jaunes ».
  • 20 Minutes fait le point sur quatre d'entre elles, avec les précisions de l'armée de Terre.

Edit du 23 novembre 2018 : ajout de précisions apportées par le ministère des armées belges après publication de l'article.

A en croire les différentes rumeurs circulant ces derniers jours, l’armée française endosse bien des rôles vis-à-vis des « gilets jaunes » : certains soldats soutiendraient le mouvement, quand d’autres délogeraient au contraire les manifestants qui organisent des blocages… sur une directive du ministre de l’Intérieur, Christophe Castaner.

Si des canulars publiés par les sites parodiques Nordpresse et Secretnews ont pu entraîner la confusion de certains internautes, les contenus les plus viraux relèvent de l’intox, comme le confirme l’armée de Terre à 20 Minutes.

FAKE OFF

Les chars filmés à Guise.
Les chars filmés à Guise. - capture d'écran
  • Des chars à Guise… pour un exercice prévu de longue date

A Guise, dans l’Aisne (Hauts-de-France), l’arrivée récente de chars et de camions est loin d’être passée inaperçue. Et elle alimente les craintes de certains « gilets jaunes » : un internaute habitué à relayer des vidéos de blocages dans la région s’est ainsi filmé sur place en direct sur Facebook – une séquence supprimée de son profil depuis mais toujours accessible sur l’équivalent russe du réseau social, VK.

« Je suis venu à Guise aujourd’hui où on avait effectivement des informations sur la venue de chars. On a bien des chars qui sont à Guise. Je viens d’aller voir des militaires et je leur ai demandé pourquoi ils étaient là, […] et les militaires m’expliquent qu’ils ne peuvent pas me dire pourquoi ils ont été installés ici depuis hier » explique-t-il en guise d’introduction. « Ça commence à être très grave quand même. […] Je vous avouerai que j’y croyais pas trop […] mais des chars sont bien à Guise, c’est la réalité de la chose. […] Macron est en train de péter les plombs, je pense, c’est quand même assez inquiétant. […] Ces chars ont peut-être été envoyés pour dissuader » affirme-t-il ensuite.

Or, la présence de ces véhicules est simplement due à un « exercice prévu de longue date […] qui n’a rien à voir avec les gilets jaunes », comme l’explique l’Armée de Terre à 20 Minutes. Cet entraînement de la deuxième brigade blindée (2e BB) long de plusieurs jours avait en effet été annoncé par l’armée dès le 8 novembre dans un communiqué, et L’Aisne nouvelle s’en est fait l’écho dès le 21 novembre.

  • La fausse citation de Christophe Castaner

Dès le 16 novembre, à la veille de la première journée de mobilisation du mouvement, une citation prêtée à Christophe Castaner lors d’une interview avec Jean-Jacques Bourdin sur BFM TV sur une éventuelle intervention de l’armée contre les « gilets jaunes » connaissait un certain succès : « Si il (sic) faut envoyer l’armée pour empêcher le blocage, nous enverrons l’armée ».

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Elle a depuis été relayée sur différents sites, en plus de circuler sur les réseaux sociaux. Toutefois, malgré l’utilisation d’une prétendue capture d’écran d’un article de BFM TV reprenant cette citation – qui détourne en fait un véritable article publié à la même date –, la dernière interview en date de Christophe Castaner par Jean-Jacques Bourdin remonte au mardi 13 novembre 2018.

« Je demande qu’il n’y ait aucun blocage total […] Partout où il y aura un blocage, et donc un risque pour les interventions de sécurité et aussi la libre circulation, nous interviendrons » y affirmait-il, sans jamais évoquer l’armée.

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L’armée de Terre « confirme qu’à [sa] connaissance aucun déploiement militaire des armées n’est prévu sur le territoire national dans le cadre [du mouvement des « gilets jaunes »] », alors qu’une telle décision appartient par ailleurs – sauf exceptions précises – au président de la République, chef des forces armées.

Le soutien (fantasmé) de l’armée française… au passage de militaires belges

Dans la foulée de la mobilisation du 17 novembre, une vidéo qui prétendait montrer des militaires français exprimer leur soutien aux gilets jaunes en portant le même symbole lors de leur passage au péage de Virsac (Gironde), est vite devenue virale.

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Toutefois, les militaires vêtus de gilets fluo visibles dans cette séquence ne sont pas Français… mais Belges, comme l’ont relevé nos confrères de Checknews. Outre la plaque d’immatriculation belge, visible dans la séquence, le service de fact-checking de Libération en a eu confirmation par le ministère des armées belge.

Ce dernier précise à 20 Minutes : « Le film montre en effet du personnel du "Movement Control Group" (MCG) qui, à ce moment, accompagnait une colonne militaire [...] sur le chemin de retour du Portugal après un exercice. »

Pour assurer leur travail de coordination des transports de la Défense belge, les membres du MCG doivent « être identifiables par le port d’un gilet de sécurité rétro-réfléchissant », ce qui explique la confusion des manifestants.

Des blindés en route vers Paris ?

« URGENT - signalé. Unités blindés français en route vers Paris ce vendredi matin 16 novembre 2018. 200km ». Ce message Facebook, partagé plus de 8.000 fois, accompagne une photo de quatre blindés français qui avancent en file.

Le post Facebook viral qui s'alarme du passage de blindés.
Le post Facebook viral qui s'alarme du passage de blindés. - capture d'écran

Il laisse supposer que ces véhicules font route vers Paris par anticipation de la mobilisation du lendemain… alors qu’un tel convoi n’a en fait rien d’exceptionnel. « Ces blindés sont des Véhicules blindés de combat d’infanterie (VBCI). […] Ils sont […] en déplacement sur voie routière, sous autorisation préfectorale liée aux déplacements de convois exceptionnels (tout comme peuvent l’être des poids lourds civils ordinaires) », explique l’armée de Terre.

Avant de conclure : « Chaque jour, de nombreux véhicules militaires empruntent la voie publique pour effectuer des liaisons entre les différentes garnisons ou camps militaires. Il en existe un peu partout sur le territoire métropolitain, à des distances très variables de Paris. Lors de leurs déplacements, ils sont donc fort susceptibles d’être vus. »

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