MOBILISATION«Journée morte» des barreaux contre une réforme de la justice

«Journée morte» des barreaux contre une réforme de la justice «illisible» et «inhumaine»

MOBILISATIONLes principaux syndicats de magistrats ont apporté leur soutien au mouvement...
Le palais de justice de Carcassonne.
Le palais de justice de Carcassonne. - Eric Cabanis / AFP
20 Minutes avec AFP

20 Minutes avec AFP

Vent debout depuis des mois contre le projet de réforme de la justice, les avocats se mobilisent à nouveau jeudi dans toute la France, en plein examen du texte à l’Assemblée nationale.

Le texte porté par la garde des Sceaux Nicole Belloubet entend moderniser une institution à bout de souffle, avec des tribunaux engorgés et des prisons surpeuplées : elle se veut « globale et concrète », au service d’un citoyen qui attend de trop longs mois pour être jugé ou obtenir réparation.

Si l’adoption d’une loi de programmation, qui aura fait progresser le budget de la justice de 6,7 à 8,3 milliards entre 2017 et 2022, est bien accueillie sur le principe, les grands axes de la réforme, qui prône une révolution numérique et la « simplification des procédures » civile et pénale, sont vertement critiqués.

Fronde

La fronde pourrait être attisée par l’annonce surprise de Nicole Belloubet mercredi sur un sujet hautement sensible : la garde des Sceaux a, pour la première fois, fait part de sa volonté d’utiliser son projet de loi pour permettre une réforme par ordonnances de la justice des mineurs afin notamment de les « juger plus vite ».

Premier syndicat de magistrats, l’USM a fait part de sa « consternation », ajoutant que la « nécessaire » refonte du droit des mineurs devait se faire dans la « concertation » et sans « occulter » le débat parlementaire.

À Grenoble, Bordeaux, Lyon, Dax, Grasse, Rouen, Dijon ou en Corrèze, les conseils de l’ordre ont voté la grève et demandé le renvoi de toutes les audiences. À Paris, aucune consultation gratuite d’avocats n’était assurée.

À Marseille, quelque 200 avocats en robe noire se sont rassemblés dans la matinée sur les marches du Palais de justice avant de se disperser, a constaté un photographe de l’AFP.

Les principaux syndicats de magistrats ont apporté leur soutien au mouvement.

Des droits de la défense et des victimes « diminués de manière drastique »

Principaux griefs : la fusion des tribunaux d’instance (TI, rebaptisé « tribunal de proximité ») et des tribunaux de grande instance (TGI) et une réforme pénale qui renforce encore les pouvoirs du procureur, au détriment du juge et des droits de la défense, selon avocats et magistrats.

L’expérimentation d’une spécialisation des cours d’appel, initialement prévue dans deux régions sur treize, a par ailleurs été étendue à cinq par amendement.

Les magistrats sont eux particulièrement préoccupés par le sort du juge d’instance, qui tranche les petits litiges civils du quotidien (dettes impayées, expulsions locatives, tutelles).

L’USM souligne que le siège, le ressort et les compétences du futur « tribunal de proximité » « seront fixés plus tard par décret de sorte que rien ne garantit le maintien de tous les sites actuels ».

En matière pénale, les avocats dénoncent des droits de la défense et des victimes « diminués de manière drastique ».

Pour les robes noires, le projet de loi aura pour conséquence la disparition pure et simple de l’avocat dans plusieurs procédures en privilégiant la médiation et les règlements à l’amiable, ou encore en développant la justice « en ligne ».

Autre sujet de mécontentement : l’expérimentation de tribunaux criminels départementaux, à mi-chemin entre tribunal correctionnel et cour d’assises. « C’est une étape vers la disparition des cours d’assises » et du jury populaire, a dénoncé Christian Saint-Palais, président de l’association des avocats pénalistes.