«Momo Challenge»: La grande prudence des enquêteurs après le suicide d’un adolescent en Bretagne
ENQUETE•Kendal, un adolescent de 14 ans, s’est donné la mort dans sa chambre. Son père accuse le « jeu » proposé via WhatsApp d’avoir poussé son fils au suicide…Camille Allain
L'essentiel
- Un garçon de 14 ans s’est suicidé le 14 octobre près de La Guerche-de-Bretagne (Ille-et-Vilaine). Son père soupçonne le « Momo Challenge » de l’avoir poussé à se donner la mort.
- Ce « jeu » lançant des défis dangereux serait a priori né en Argentine. Il aurait déjà fait plusieurs victimes dans le monde.
- Les enquêteurs se montrent très prudents quant à la relation entre le « Momo Challenge » et le décès de l’ado.
Qu’est-ce qui a poussé Kendal à se donner la mort ? Cet adolescent âgé de 14 ans a été retrouvé pendu à la porte de sa chambre avec la ceinture de taekwondo le 14 octobre. Son père en est persuadé : Kendal a été poussé au suicide par le « Momo Challenge ». Ce « jeu » proposé via la messagerie WhatsApp et utilisant un avatar effrayant lance des défis dangereux. « On a regardé sa boîte mail. Il avait plein de recherches qui faisaient référence à ça. Il avait cherché qui était ce Momo », témoigne son père René Gatineau.
Le drame s’est déroulé dans la chambre de la maison familiale située non loin de La Guerche-de-Bretagne. Habitué à surfer sur le Web, l’adolescent avait effectué d’étranges recherches avant sa mort. « Il a regardé comment se paralyser les jambes par exemple », raconte son père.
« Kendal allait bien »
C’est lui qui a découvert le corps sans vie de son fils un matin. Ses filles ont alors pensé que leur frère avait pu être influencé, gardant en mémoire le dangereux Blue Whale Challenge. Pour le père, aucun doute, ce sont ses recherches sur le net qui l’ont poussé à mettre fin à ses jours. « Personne n’avait rien remarqué. Ni ses copains, ni son cousin. Kendal allait bien. »
Un mois après le drame, les enquêteurs sont un peu plus mesurés. Très sollicité sur cette affaire, le procureur de la République de Rennes ne souhaite pas s’exprimer davantage. « L’enquête de la gendarmerie est en cours », se contente d’affirmer Nicolas Jacquet avant de nous glisser. « Je vous invite à la plus grande prudence. » Une autre source proche du dossier nous indique que « les premières auditions menées semblaient donner raison à la thèse du père ». Avant d’ajouter. « Nous restons très prudents. »
Le phénomène aurait commencé en Argentine
Menaçant l’utilisateur de dévoiler sa vie privée, le numéro caché derrière « Momo » est suspecté d’avoir causé la mort de plusieurs adolescents. D’abord en Argentine, où deux adolescents ont mis fin à leurs jours. Le phénomène a ensuite été signalé au Mexique, aux Etats-Unis, en Grande-Bretagne et a fait son apparition cet été en France.
Soucieux d’alerter la population sur les dangers du « Momo Challenge », le père de Kendal s’est régulièrement exprimé dans les médias. Il a porté plainte contre YouTube, WhatsApp, le site Jeuxvideo.com et l’Etat, qu’il accuse de manquements. « Je ne veux pas que ça arrive à quelqu’un d’autre. Je veux qu’on en parle aux ados, qu’on leur dise qu’Internet peut être dangereux et qu’il ne faut pas accepter n’importe qui sur les réseaux sociaux. »
Les gendarmes préfèrent ne pas en parler
Très médiatisé, le suicide de Kendal est remonté haut dans les sphères de la gendarmerie nationale. Mais là non plus, personne ne souhaite s’exprimer sur ce « Momo Challenge ». « Le sujet est sensible. On ne souhaite pas trop en parler pour ne pas donner des idées. » Pour protéger les adolescents, les autorités préfèrent ne pas ébruiter le phénomène.
En attendant de voir l’enquête avancer, le père de Kendal a choisi de faire l’inverse. Dans le collège où son fils était scolarisé, aucun temps d’échange n’a été organisé depuis le suicide de l’adolescent.