BEBES NES SANS BRASLes habitants de l'Ain ne cèdent pas à la panique mais « veulent savoir»

Bébés nés sans bras: « Ce n'est pas la panique, mais on veut savoir», témoignent des habitants de l'Ain

BEBES NES SANS BRAS«20 Minutes» est allé à la rencontre des habitants de Druillat et de ses alentours, où ont été recensés les cas des bébés nés sans bras entre 2009 et 2014 dans l’Ain…
Elisa Frisullo

Elisa Frisullo

L'essentiel

  • Entre 2009 et 2014, sept bébés sont nés sans bras ou sans main autour du village de Druillat, dans l’Ain. Mais aucune de ces familles ne vivait dans ce petit village.
  • Après l’annonce de onze cas suspects, 20 Minutes est allé à la rencontre des habitants de ce secteur, où les interrogations se font de plus en plus nombreuses, sans pour autant que la population ne cède à la panique.

Druillat, mercredi matin. Dans ce petit village de l’Ain, niché en pleine campagne à une vingtaine de kilomètres de Bourg-en-Bresse, seul le carillon de l’église vient perturber le calme des lieux. L’école est fermée en ce jour, tout comme les deux commerces du bourg. La petite place bordée de maisons en pierre est déserte, tout comme les ruelles de cette commune qui a été au cœur de l’actualité ces dernières semaines. Bien malgré elle.

Ce village de 1.150 âmes est en effet l’épicentre de la zone dans laquelle sept bébés sont nés sans bras entre 2009 et 2014, selon une étude dévoilée en septembre par le réseau des malformations en Rhône-Alpes (Remera). Une enquête qui a fait grand bruit, au point d’amener le gouvernement à lancer récemment et, après moult rebondissements, une enquête nationale sur les foyers observés dans l’Ain, mais également dans le Morbihan et en Loire Atlantique.

Les familles des enfants nés avec des malformations vivaient en pleine campagne aux alentours de Druillat dans l'Ain.
Les familles des enfants nés avec des malformations vivaient en pleine campagne aux alentours de Druillat dans l'Ain.  - E. Frisullo / 20 Minutes

« On a appris ça comme tout le monde, le jour où cela a été médiatisé. Avant cela, on n'en avait jamais entendu parler. Les journalistes viennent dans le village, mais on ne sait rien. On se pose les mêmes questions que tout le monde sur ces bébés nés avec des malformations », confie une habitante de la commune, un brin agacée de voir le nom de Druillat revenir en boucle dans cette affaire. D’autant qu’aucune famille du bourg n’est concernée par une telle malformation, selon la mairie, qui précise sur son site internet n’avoir jamais « eu connaissance de la naissance d’enfants nés sans bras ou sans main sur son territoire ».

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« Tout de suite, on pointe du doigt les paysans »

« C’est vrai que les habitants ont un peu peur que tout cela fasse mal au village. On parle de Druillat mais tous les cas ont été observés autour, pas ici », ajoute un riverain croisé dans le village. « Après, forcément, les gens se posent des questions. Ce n’est pas la panique, mais nous en parlons et nous voulons savoir pourquoi il y a une telle concentration de cas dans ce secteur. Est-ce que c’est lié à l’environnement ? », s’interroge une habitante.

Les onze nouveaux cas suspects d’enfants nés avec des malformations des membres supérieurs, signalés la semaine dernière dans l’Ain par Santé publique France, n’ont fait qu’ajouter aux interrogations. « Ce serait bien que l’on connaisse les causes de ces malformations », acquiesce un agriculteur installé à quelques kilomètres de Druillat. « Notre secteur se trouve sur le trajet de la ligne aérienne Lyon-Genève, nous ne sommes pas loin de la centrale du Bugey, mais tout de suite on pointe du doigt les paysans, l’agriculture, regrette-t-il. Mais aujourd’hui, personne ne sait rien. Il faut attendre les résultats de l’enquête et rester prudent, ne pas faire de raccourci ».

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« On pense vivre préservés à la campagne »

A quatre kilomètres de là, à Pont d’Ain, les habitants croisés sous la grisaille ce mercredi sont peu loquaces lorsqu’il s’agit d’évoquer l’affaire. « Ce n’est pas vraiment que c’est tabou, mais les gens ne se sentent pas trop concernés car les familles touchées par ces malformations vivaient en zone très rurale », explique Marie, mère de quatre enfants.

Si ces quelques kilomètres de distance suffisent à en rassurer certains, ils n’effacent pas les questions soulevées par l’affaire, restées sans réponse à ce jour. « On parle de 18 cas maintenant, ce n’est pas rien. On pense à ces familles et ces enfants qui doivent savoir. On se demande forcément ce qui a pu se passer autour de chez-nous, on s’interroge sur notre environnement. On pense vivre préservés à la campagne, mais nous ne sommes pas plus à l’abri ici qu’ailleurs », soupire une commerçante de Pont d’Ain, peu optimiste sur ce qui ressortira de l’enquête sanitaire.

« Est-ce que nous aurons les réponses à nos questions ? Est-ce que les familles sauront ? Si ces malformations n’avaient pas été médiatisées, personne n’en aurait rien su et il n’y aurait pas eu d’enquête », lâche Marie, en baladant la poussette dans laquelle est installée sa petite dernière, âgée de quelques mois. Une naissance récente qui, forcément, donne un écho particulier à cette affaire pour cette mère de famille.

« Maintenant, pour que tout cela ne retombe pas, pour que la population se sente davantage concernée, il faut que les parents de ces petits nés avec des malformations continuent de témoigner et de se battre ».