Lyon: Des réfugiés, anciens détenus et bénéficiaires du RSA intégrés comme bénévoles au festival Lumière
INITIATIVE•Parmi les centaines de bénévoles du festival Lumière, qui se déroule à Lyon du 13 au 21 octobre, les organisateurs intègrent des personnes réfugiées ou en situation de précarité dans le cadre d’une mission insertion…Elisa Frisullo
L'essentiel
- Le festival Lumière, qui se tient du 13 au 21 octobre à Lyon, fait appel à une centaine de bénévoles en situation de précarité dans le cadre d’une mission insertion.
- Six ans après le lancement de cette opération, qui bénéficiait au départ à des réfugiés, des bénéficiaires du RSA, des jeunes en foyer ou d’anciens détenus font également partie des personnes mobilisées sur le festival.
Lorsqu’il est monté sur scène l’an passé aux côtés de nombreux acteurs et cinéastes et tout près du réalisateur hongkongais Won Kar-waï, il a été submergé d’émotions. Jamais Joël Sousa, un trentenaire d’origine portugaise arrivé à Lyon il y a trois ans, n’aurait imaginé un jour mettre un pied dans les coulisses du 7e art.
Comme l’an passé, ce jeune homme fait partie des centaines de bénévoles et stagiaires mobilisés pendant le festival Lumière, qui se déroule à Lyon du 13 au 21 octobre. Parmi ces équipes, chargées d’accueillir le public ou les artistes, et de différentes missions tout au long de la semaine, les organisateurs font appel depuis six ans à près de 80 personnes réfugiées ou en grande précarité.
« Quel que soit leur métier d’origine ou leur niveau de français, nous les intégrons aux bénévoles pour leur permettre, dans le cadre de cette mission insertion, de s’extraire de leur statut pour participer au festival », explique Cécile Bougeat, secrétaire générale du festival.
Des bénévoles qui se sentent valorisés
Cette opération, un temps menée auprès des réfugiés, profite également aujourd’hui à d’autres publics en précarité. « D’anciens détenus, des jeunes accueillis en foyer ou encore des bénéficiaires du RSA suivis par des associations avec lesquelles nous travaillons », détaille la responsable.
Cette fois, Joël sera chauffeur sur le festival. « J’ai conduit beaucoup d’acteurs et de cinéastes que je n’ai pas forcément reconnus parce que je ne connais pas bien le cinéma français. Mais ce qui m’a marqué, c’est la gentillesse des gens pendant le festival. Même les stars nous considèrent comme si nous étions comme elles », confie le jeune homme, qui a clairement vu les effets bénéfiques de cette expérience sur son quotidien.
« Cela m’a permis de faire de grands progrès pour communiquer, d’être plus à l’aise pour parler français. Et puis, cela apporte forcément au niveau culturel. J’ai découvert l’histoire des frères Lumière et du cinéma français », ajoute cet ancien ouvrier du BTP, désormais en formation pour devenir web designer.
Une mission qui se poursuit après le festival
Un constat partagé, après plusieurs années d’expérience, par les équipes du festival. « Nous n’avons pas trop communiqué sur cette mission insertion, nous voulions attendre d’avoir un peu de recul et le retour des associations. L’action semble avoir une réelle efficacité d’après ce qu’en disent les bénévoles, qui se sentent utiles, reconnus. Ils expliquent avoir gagné en confiance sur leur pratique du français notamment », ajoute Cécile Bougeat.
Sur le plan culturel, l’initiative permet aussi de décloisonner et d’accueillir dans l’univers du septième art un public qui n’y a pas forcément accès. Pendant leur mission, les bénévoles peuvent profiter de quelques séances ou assister à quelques événements. « Certains, par exemple, n’étaient jamais allés au cinéma en famille avant », note Cécile Bougeat. Pour Joël, qui joue du violon depuis l’enfance, cette dixième édition devrait être une nouvelle fois l’occasion d’assister à un cinéconcert à l’auditorium.
Au-delà du festival, la mission insertion se poursuit avec l’aide des entreprises partenaires de l’événement. « L’idée est d’aller plus loin et d’amener ces entreprises à proposer à l’issue du festival des stages, des contrats en alternance ou des emplois à ces bénévoles », ajoute la secrétaire générale. Par le passé, l’un d’eux, accepté en stage chez EDF, a fini par décrocher un CDI. Preuve que les belles histoires n’arrivent pas qu’au cinéma.